L’exposition Bacon-Hrabal suscite la polémique

bacon_hrabal.jpg

La galerie GATE à Prague, propose en collaboration avec la Galerie Vernon, une exposition intitulée « Francis Bacon & Bohumil Hrabal, deux génies ». L’idée de mettre en parallèle l’un des plus grands peintres du XXe siècle et l’un des plus grands écrivains tchèques peut paraître incongrue. L’exposition elle-même a d’ailleurs suscité une polémique dans le monde de l’art tchèque. Monika Burian, commissaire de l’exposition sur la genèse du projet :

« L’exposition sur Francis Bacon est née il y a environ trois ans. Notre amie Maria Gloria Grifoni est écrivain et poète. Elle a remarqué que les deux vies de Bacon et Hrabal étaient très similaires. Nous avons commencé à élaborer des parallèles. Tous les deux ont été très seuls. Leur vie s’est terminée dans la solitude. Tous deux ont utilisé l’art et l’écriture pour exprimer celle-ci. Ils étaient tous les deux dans une cage. Hrabal dans la cage du système communiste. Et Bacon dans la cage de son orientation sexuelle. A l’époque, la justice poursuivait les personnes qui se déclaraient homosexuelles. »

Justement, comment articulez-vous ce dialogue Bacon-Hrabal ? Je crois savoir qu’il va y avoir une sorte d’improvisation théâtrale…

L'etude d'après le portrait du Pape Innocent X par Velazquez
« Maria Gloria Grifoni a écrit un dialogue imaginaire entre les deux personnalités. Dans ce texte, ils parlent de la création, de la solitude, de l’art. Ce sera une performance artistique donnée les 20 et 21 juin avec de jeunes acteurs tchèques. Pour l’exposition, on a intégré, grâce à la participation d’un expert de Hrabal, ses citations sur l’art. Elles sont placées à côté des dessins de Bacon. »

Ces dessins de Francis Bacon représentent notamment un pape. Pourriez-vous rappeler d’où viennent ces dessins ?

« Il y a trois thèmes. Les thèmes du pape, du portrait et de la crucifixion. Ces dessins ont été créés de 1977 jusqu’à sa mort. Bacon a beaucoup voyagé en Italie et en Espagne. Il a été inspiré par de nombreux artistes italiens. La première exposition de ces dessins a eu lieu à Bologne en 1988. »

Cette exposition a créé la polémique dans le monde de l’art à Prague, notamment sur l’authenticité de ces dessins. Qu’en est-il ?

« Prague est toujours en retard sur le monde. La polémique née ici se rapporte à de très vieux arguments. De 1994 à 2004, il y a eu un procès. A la fin, le tribunal italien a établi que ces dessins étaient vrais. Ensuite la question a été de savoir : comment intégrer ce portfolio de dessins au reste du corpus des œuvres de Bacon. Jusqu’à aujourd’hui, il n’existe pas de catalogue raisonné parce qu’on débat du fait si l’on doit intégrer ces dessins dans la collection complète ou si l’on doit laisser à part, comme une collection des dessins italiens de Francis Bacon. »

Car ce qui est exposé de Francis Bacon, en général, ce sont ses peintures…

'Crucifixion'
« Francis Bacon avait signé un contrat avec la galerie Marlborough, très jeune. La galerie a pratiquement contrôlé toute sa production. Bacon a détruit à peu près la moitié de ses œuvres. Marlborough a essayé de faire de Bacon ce génie qui n’avait pas besoin de faire de dessins. Ce que l’on voit ici en réalité ce ne sont pas des dessins. Quand Bacon dit qu’il ne sait pas dessiner, il parle des dessins détaillés. Ce que l’on voit ici, ce sont de vraies œuvres. Un tableau a besoin d’un atelier, de temps. Francis Bacon n’avait pas d’atelier en Italie, mais il a eu cette nécessité de créer. Ce sont des œuvres finies. »

L’exposition s’achèvera le 22 juillet.