L'histoire de la famille Spaniel

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Cette page d'histoire est consacrée au lieutenant Ivan Spaniel, officier de l'armée tchécoslovaque en France, mort en 1944 près de Strasbourg, après avoir pris part aux combats pour la libération de la France, un thème qui nous a été suggéré par notre auditeur de France.

Occupée, en mars 1939, à la suite du diktat de Munich et transformée en Protectorat de Bohême-Moravie, la Tchécoslovaquie ne pouvait pas combattre. Des milliers de jeunes hommes démobilisés contre leur gré sont alors partis en France, pour se faire recruter par la Légion étrangère. Une fois Paris tombée, ils ont continué de combattre contre Hitler en Grande-Bretagne et sur d'autres fronts en Europe et en Afrique. Ivan Spaniel était l'un de ces Tchèques héroïques. A une exposition au musée de l'armée tchécoslovaque à Darney, en France, dédiée aux combattants tchèques et slovaques des deux guerres mondiales, on a pu lire au-dessous de la photo d'Ivan Spaniel le texte suivant: « Le lieutenant d'infanterie en réserve 1918 - 1944, officier de l'armée tchécoslovaque à l'étranger en France, en Grande Bretagne, colonel de l'armée de la France libre, fils d'un grand sculpteur Otakar Spaniel. Il combattit en Tunisie et en Algérie. En 1944, il prit part à la libération de Paris. Mort près de Strasbourg. »

La France a mis à l'honneur l'engagé volontaire Ivan Spaniel : Légion d'honneur au grade de Chevalier à titre posthume, Croix de Guerre 1939-1945 avec étoile d'argent, Croix de Guerre avec palme, médaille commémorative française de la guerre 1939-1945.

Dans son pays natal, Ivan Spaniel est moins connu que son père, le sculpteur Otakar Spaniel, fondateur de l'école tchécoslovaque de médaille et représentant du courant néoclassique dans la sculpture. Otakar Spaniel est, entre autres, l'auteur de la première pièce de monnaie de la république tchécoslovaque indépendante, de médailles, plaques, reliefs et bustes de nombreuses personnalités tchèques dont Tomas Garrigue Masaryk.

Son fils, Ivan Spaniel, est né à Prague le 23 juillet 1918. Etudiant en médecine à l'université Charles de Prague, la guerre le trouve à Paris où il part continuer ses études. Déjà en septembre 1939, il se fait recruter volontaire engagé au camp d'Agde. En 1940, il fréquente l'école pour officiers d'artillerie en réserve à Poitiers.

Ivan Spaniel
Après l'occupation allemande de la France, il la quitte, à bord d'un bateau, pour débarquer d'abord au Portugal, avant d'arriver en Grande-Bretagne. En octobre 1940, Ivan Spaniel rejoint les unités du mouvement des FFL - Forces Françaises libres. En 1941, au grade d'adjudant des FFL, il débarque sur les côtes africaines. Au printemps de l'année suivante, il dirige une batterie d'artillerie motorisée et s'illustre lors de la prise de la forteresse médiévale de Gatroun. En 1943, il participe à la campagne du général Leclerc dans le Sahara, en Tunisie et au Tchad. Il lutte sur la ligne de Mareth construite par les Français pour prévenir toute attaque venant de la Libye. En mai 1944, Ivan Spaniel se déplace avec la IIe division blindée des FFL en Grande-Bretagne. En août de la même année, il participe aux combats acharnés en Normandie. Il est dans les premiers rangs des soldats qui pénètrent dans Paris et il participe à la défense des Invalides et de l'aéroport Le Bourget. Lors de l'avance suivante, dans les Vosges, il détruit une formation d'artillerie allemande. Pour ses mérites, il est décoré Chevalier de la Légion d'honneur et de la troisième Croix de Guerre.

Le 23 novembre 1944, Ivan Spaniel participe à la libération de Strasbourg. Sept jours plus tard, il est atteint par les éclats d'une grenade est meurt, dans la commune de Krafft. En 1945, un tank participant au défilé de la victoire à Paris est baptisé de son nom. En 1947, les cendres d'Ivan Spaniel retournent à Prague pour être déposées dans le caveau de la famille au cimetière national de Vysehrad.

S'il n'avait pas trouvé la mort sur le champ de bataille en France, Ivan Spaniel aurait sans doute subi le sort des milliers de combattants tchécoslovaques sur les fronts de l'Ouest - prison communiste, travaux forcés, persécutions... Décédé en 1944, il est lauréat de hautes distinctions militaires : Croix de guerre tchécoslovaque et Médaille pour bravoure face à l'ennemi. Lors de la recherche de documentation sur le parcours exceptionnel de cet homme, j'ai trouvé des mentions intéressantes dans la publication de l'historien Tomas Jakl intitulée « La lutte pour la liberté 1938 - 1945 », ainsi que des photos saisissant la première division blindée des Forces Françaises libres commandées par un Tchécoslovaque - le lieutenant Ivan Spaniel. Les documents mentionnant son nom sont en effet plutôt rare. « Je voudrais que la ville de Krafft où est mort ce héros pérennise sa mémoire », nous a écrit notre auditeur de France, que nous remercions pour cette révélation qu'est l'existence d'Ivan Spaniel.