Liberté de la presse : le gouvernement adoucit la « loi-muselière »

Le gouvernement a adopté, mercredi, un amendement à la loi controversée sur les médias appelée « loi muselière ». Très critiquée, y compris en Europe, depuis son entrée en vigueur en avril dernier, cette loi limite la liberté de la presse tchèque dans l’information sur les affaires criminelles, et notamment le journalisme d’investigation. Au nom de l’intérêt public, la coalition a toutefois donné son aval à l’amendement présenté en fin d’année dernière par le ministère de la Justice.

Selon cet amendement, les journalistes devraient avoir la possibilité à l’avenir de publier des informations sur les procédures pénales en cours. Ces informations pourront être publiées si l’intérêt public prévaut sur l’intérêt privé de la ou des personnes impliquées. Il s’agirait donc d’une modération de l’application de la « loi-muselière » puisque, jusqu’à présent, celle-ci interdit en effet aux médias de publier les noms des personnes impliquées dans des affaires criminelles ou des informations provenant de sources policières anonymes et d’écoutes téléphoniques. Dans le cas contraire, les journalistes et éditeurs encourent jusqu’à cinq ans de prison.

Jiří Pospíšil
Selon le ministère de la Justice, la question de savoir si l’intérêt public prévaut sur la protection des donnés personnelles devrait être examinée au cas par cas : le but, le moyen et l’effet ou le résultat de la diffusion des informations seraient alors notamment passés au crible. En dernière instance, c’est le tribunal qui pourrait juger si le journaliste ou l’éditeur avait le droit ou non de publier l’information, comme l’a expliqué le ministre de la Justice, Jiří Pospíšil :

« C’est un tribunal indépendant qui décidera si un intérêt, qu’il soit public ou privé, prévaut sur l’autre intérêt. Nous pensons que c’est là un compromis tout à fait raisonnable où la volonté est de tenir compte des deux intérêts. Il y a d’un côté l’intérêt de l’opinion publique soucieuse d’être informée et de l’autre côté l’intérêt de la personne impliquée dans une affaire qui peut bénéficier de la protection de ses données personnelles, de sa vie privée. »

Toujours selon le ministère, les cas de figure classiques où les médias seraient autorisés à informer le public sont les enregistrements d’écoutes téléphoniques desquels il ressortirait qu’une personnalité politique ou un haut fonctionnaire aurait violé le code pénal. En République tchèque, les affaires de corruption, comme celle dans laquelle est actuellement impliqué l’ancien ministre de l’Environnement, sont probablement les plus nombreuses.

Photo: Archives de Radio Prague
A l’origine, l’objectif de la « loi-muselière » était de protéger les personnes soupçonnées d’être impliquées dans des affaires criminelles d’une médiatisation pouvant nuire à leur vie privée. Les médias avaient alors critiqué la lourdeur des peines pouvant être infligées aux contrevenants. Si l’amendement adopté mercredi par le gouvernement l’est aussi par le Parlement, comme cela est fort probable, il s’agira néanmoins d’un premier pas en vue de réaligner la législation tchèque dans ce domaine précis avec les standards européens.