L’impression traditionnelle sur étoffes indigo, reconnue par l’UNESCO

Photo: Gernek, CC BY-SA 2.5

Le Blaudruck, ou « modrotisk » en tchèque, une technique ancestrale d’impression sur étoffes commune à la Tchéquie, la Slovaquie, l’Autriche, l’Allemagne et la Hongrie, vient d’être inscrit sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO. En République tchèque, seuls deux ateliers pratiquent encore cet artisanat qui remonte au XVIIIe siècle.

Photo: Gernek,  CC BY-SA 2.5
Un tissu d’un bleu profond d’où ressortent en blanc des motifs floraux la plupart du temps, géométriques, ou encore des dessins. C’est ce que produisent encore aujourd’hui, dans cinq pays d’Europe centrale, dont la Tchéquie, quelques rares ateliers familiaux, où le savoir-faire se transmet de génération en génération.

Le Blaudruck, ou « modrotisk », se traduit littéralement par « impression » ou « teinture en bleu de réserve ». Il s’agit d’une technique, proche du principe du batik indonésien, où l’on applique sur un tissu une pâte résistante à la coloration avant de le surteindre avec un colorant indigo. La pâte résistante, de la cire le plus souvent, empêche la teinture de pénétrer le motif, lui permettant ainsi de rester blanc ou non teint après la teinture.

Jiri Danzinger est le propriétaire et l’artisan principal de l’atelier de Blaudruck à Olešnice en Moravie. Son savoir-faire lui a été transmis par son père qui, lui-même, l’avait appris de son propre père. En 2016, l’atelier a fêté ses 200 ans d’existence. Pour fabriquer plusieurs mètres de tissu bleu aux imprimés blancs délicats, il faut quatre jours à l’artisan :

« J’ai une réserve de pâte à imprimer qui est faite à partir de gomme arabique notamment. Mais il y a aussi quelques autres éléments qui y sont mélangés et qui étaient et resteront un secret bien gardé. »

L’application manuelle des planches à imprimer, trempées auparavant dans la pâte, peut prendre jusqu’à cinq heures de travail pour une vingtaine de mètres de tissu. Les artisans utilisent encore des planches fabriquées à la main. Certaines remontent parfois à trois siècles et représentent des motifs d’inspiration régionale, la faune et la flore ou encore des motifs chrétiens.

Après l’étape de l’impression, vient celle de la teinture.

Photo: Claude Truong-Ngoc,  CC BY-SA 3.0

« Tout le processus de teinture dure huit heures. Toutes les demi-heures environ, je plonge le tissu dans la couleur et le retire de manière régulière. En haut, en bas, en haut, en bas… »

Puis l’étoffe est nettoyée, la pâte qui y avait été appliquée disparaît, laissant surgir les motifs choisis.

De cette teinture traditionnelle à l’indigo découle toute une série d’activités, à côté du processus d’impression. Les artisans et leurs familles, impliquées dans ces créations, préparent les matières premières, mais aussi la confection de produits réalisés à partir de ces tissus : sacs, torchons, tabliers, et autres produits dérivés.

Si le Blaudruck évoque par son aspect les traditions régionales et folkloriques, il est, ces derniers temps, remis au goût du jour dans une version plus contemporaine. Certains designers et stylistes, qui vont puiser leur inspiration dans le fonds traditionnel, utilisent ces tissus pour créer vêtements ou objets d’ameublement intérieur, comme des coussins, mais de façon plus moderne et revisitée. Le goût actuel de nombreux consommateurs pour les choses « authentiques » ou « ethniques » y est pour beaucoup.

Ainsi, tout comme le classement récent à l’UNESCO, c’est là une façon de faire perdurer un artisanat qui, sinon, pourrait être voué à disparaître peu à peu.