L’union bancaire, un défi pour la République tchèque comme pour la présidence irlandaise de l’UE
« Pour la stabilité, l'emploi et la croissance » : tel est le slogan de la présidence irlandaise de l’Union européenne qui a été entamée en début d’année. Une des priorités de l’Irlande sera de faire avancer le projet de l’union bancaire. Sa mise en œuvre s’annonce pourtant compliquée. Le projet représente un défi aussi pour la République tchèque qui, aux côtés de la Grande-Bretagne, souligne le besoin de maintenir une capacité de décision au niveau national et d’introduire plus de flexibilité dans les délibérations européennes.
Dans le contexte actuel de crise, quel rôle peut réellement jouer l’Irlande, actuellement chargée de la présidence tournante ? Et où se positionne la République tchèque par rapport aux nouvelles initiatives négociées ? Même si le principe de la présidence tournante a été maintenu dans le Traité de Lisbonne, dans la pratique son influence a été réduite au profit du Conseil européen. Cette institution, qui réunit régulièrement les chefs d’État et de gouvernement européens, détermine les grandes orientations de la politique européenne. Le projet de l’union bancaire, qui représente un pas important pour l’approfondissement de l’intégration, a ainsi été négocié au plus haut niveau au sein de cette institution. Analyste et chercheur au Centre d’études des politiques européennes à Bruxelles, Aleš Chmelař évalue le potentiel de la présidence irlandaise :
« Il faut avouer que l’atmosphère est assez tendue ici à Bruxelles, mais il faut dire que la présidence irlandaise a une marge de manœuvre très limitée. Cela est dû certainement à la poursuite de la crise au plan politique, qui se manifeste notamment à travers la préparation de l’union bancaire, actuellement dans les tuyaux de la législation européenne, mais dont le Conseil européen aura toujours le Conseil européen. Aujourd’hui bien plus encore qu’avant le Traité de Lisbonne, la présidence tournante du Conseil de l’UE a très peu de pouvoirs en comparaison avec le Conseil européen qui prend les décisions les plus importantes. »« De ce fait, l’Irlande veut certainement mettre en avant certaines priorités, mais la présidence, telle qu’elle est définie par le Traité de Lisbonne, a très peu d’espace pour faire prévaloir des projets qui ne seraient pas approuvés par le Conseil européen. Conséquemment, l’Irlande poursuit le projet de l’union bancaire, dont elle profite le plus par rapport aux autres Etats. Même si j’estime que cette union bancaire ne sera pas mise en place avant la fin de ce semestre, l’Irlande tentera certainement plusieurs fois de la mettre en avant. »
La République tchèque appréhende avec beaucoup de réserves les nouvelles initiatives européennes. En témoigne notamment la récente intervention de Vojtěch Belling, secrétaire d’Etat chargé des affaires européennes, dans le débat sur la légitimité de l’Union. Lors de la rencontre informelle des ministres des affaires européennes à Dublin, mercredi dernier, Vojtěch Belling a confirmé la vision tchèque des initiatives européennes. Comme on peut le lire dans le compte-rendu publié sur le site du gouvernement, le secrétaire d’État a souligné le manque de légitimité du projet européen en raison des réticences de l’opinion publique.
Quelles sont donc les propositions tchèques pour consolider la légitimité sociale de l’UE ? Il s’agit du renforcement du rôle des parlements nationaux, du respect du principe de subsidiarité et de la limitation de l’action européenne aux sujets nécessaires. Or, c’est précisément là que se trouve le cœur de la discorde entre les dirigeants européens. Si certains pays, comme la République tchèque, jugent que le projet de l’union bancaire va au-delà de ce qui est nécessaire, ses défenseurs, notamment la présidence irlandaise, le considèrent comme indispensable. Reste à voir s’il s’agit de deux visions exclusives ou si celles-ci peuvent être réunies sous la forme d’un compromis à l’européenne.