L’univers disparu des cafés de Prague

Café Slavia

Le monde enfumé des cafés de la première moitié du XXe siècle revit ces jours-ci grâce à une exposition présentée au Musée de la ville de Prague (Muzeum hlavního města Prahy). Photos, documents écrits, œuvres d’art, objets authentiques, tout cela a été réuni pour évoquer devant le visiteur ce monde irrémédiablement disparu, un monde plein de vie et d’inspiration dont les cafés actuels ne sont qu’un pâle reflet.

Les cafés existaient à Prague déjà aux XVIIIe et XIXe siècles, mais leur période de gloire n’est venue que dans la première moitié du siècle dernier lorsque certains de ces établissements ont joué un important rôle dans la société et sont devenus une espèce d’institutions culturelles. Dominik Hrodek, commissaire de l’exposition du Musée de la ville de Prague, évoque cette célèbre période :

«Dans l’entre-deux-guerres, le rôle des cafés était différent de celui qu’ils jouent aujourd’hui. C’était non seulement un lieu de rencontres, le théâtre de la vie sociale, mais aussi un lieu de travail. Les journalistes, par exemple, écrivaient leurs articles dans les cafés et les remettaient ensuite à un garçon de course qui les amenait à la rédaction de leur journal. Mais le rôle le plus important des cafés était probablement celui de vecteur d’informations. Les cafés suppléaient aux médias d’aujourd’hui. Un bon café mettait à la disposition de ses clients des journaux et des revues et souvent aussi des périodiques étrangers.»

C`est dans les cafés que se rencontraient des célébrités et des artistes, c’est dans les cafés que se formaient des mouvements artistiques et des avant-gardes, c’est dans le feu des discussions de café que se forgeaient de nouvelles idées.

«A l’époque que nous évoquons, il y avait à Prague entre 100 et 150 cafés d’un certain renom. Evidemment, au total il y en avait beaucoup plus. Parmi les cafés les plus renommés il faut citer le café ‘Union’ (la célèbre Unionka), ‘Louvre’, ‘L’Impérial’, et aussi le café ‘Slavia’. Ceux de ces établissements qui existent encore aujourd’hui, ont complètement changé.»

Les cafés étaient également une source d’inspiration pour plusieurs générations d’artistes. Poètes, romanciers, peintres, sculpteurs nous ont laissé de nombreux témoignages de cette atmosphère créatrice, et l’exposition réunit toute une série d’oeuvres d’art qui n’auraient sans doute jamais vu le jour, si leurs auteurs n’avaient pas été ce qu’on appelait péjorativement des ‘coureurs de café’. Pour faire comprendre au visiteur l’engouement de ses clients de jadis, la seconde partie de l’exposition du Musée de la ville de Prague lui donne l’occasion de s’abandonner, lui aussi, au charme de ses établissements disparus. Dominik Hrodek :

«Ici, le visiteur est invité à s’asseoir, à prendre un café et à lire les documents imprimés que nous avons préparés pour lui, dont « Kavárenské listy (Les lettres de café). Dans la première partie de l’exposition, nous avons évité de fatiguer le visiteur de commentaires et de notes explicatives pour lui permettre de s’imprégner de l’atmosphère des vieux cafés. Dans la seconde partie, il peut s’asseoir, se reposer et lire quelque chose, par exemple les souvenirs de l’écrivain et journaliste Karel Poláček.»

L’exposition ‘Le monde des cafés de Prague’ sera ouverte jusqu’au 31 août.

Photo: Musée de la ville de Prague