Lycée Waldorf, une alternative surprenante
Selon les résultats de l´enquête internationale PISA dernièrement publiés, parmi les 65 Etats examinés en matière de niveau scolaire, les élèves tchèques arrivent à la moitié du classement. En comparaison avec l´Asie, qui se trouve en tête du palmarès, les Tchèques ont devant eux une nette marge d'amélioration, notamment à l´heure actuelle où la simple transmission d´un grand nombre de savoirs ne suffit pas. Un enseignement nouveau, basé sur une approche critique et permettant de développer chez les élèves un jugement autonome, est devenu un trait caractéristique revendiqué par les écoles alternatives. Radio Prague a assisté à une journée porte-ouverte au Lycée Waldorf, l´alternative la plus répandue en République tchèque, afin de regarder sous le capot et découvrir leur savoir-faire. Un reportage de Michaela Mizeráková.
« Je me tourne vers le monde
Où brille le soleil
Scintillent les étoiles
Où reposent les pierres.
Les plantes vives y croissent
Les animaux sensibles y vivent
Et l´homme doué d´âme
Donne asile à l´Esprit. »
Au Lycée Waldorf, la journée commence d'ordinaire par une récitation en chœur de ces paroles qui marquent ainsi le début du cours, mais qui, selon des critiques, servent plutôt à planter dans la tête des élèves les pensées anthroposophiques de Rudolf Steiner, fondateur de ce mouvement pédagogique.
Si on oublie ce poème d'introduction et le fait que les élèves, jusqu'au baccalauréat, ne prennent aucune note durant les cours mais recopient ce que l'enseignant écrit au tableau, à première vue le contenu et la façon d'enseigner ne diffèrent pas fondamentalement d'un cours en lycée « classique ». Prenons l'exemple d'un cours d'histoire sur la Révolution française. La surprise intervient au moment d'écouter la 'Marseillaise' et que les élèves sont invités à marcher comme des soldats. Et cela ne s'arrête pas là : les élèves revivent de l'intérieur les Etats généraux de 1789 et réfléchissent sur la manière de condamner Louis XVI et Marie Antoinette. Un élève propose leur décapitation ce qui déclenche chez l'enseignant une réaction enthousiaste : « Finalement un bon citoyen ! ».
Cette exclamation, controversée pour les non-initiés, s'explique par le principe même de la pédagogie Waldorf, qui vise à susciter de vives émotions afin ue les élèves comprennent le fond de la situation enseignée. Pourtant, la frontière entre le jeu et la réalité reste très floue.Le directeur du lycée Ivan Smolka nous éclaire sur la spécificité de la pédagogie Waldorf :
« Ce qui est intéressant, c'est la façon de travailler avec les étudiants. Notre » approche permet d'aller au fond de la problématique et ainsi, cela rentre dans les couches profondes de la mémoire, et rend efficace toute notre pédagogie. J'ose dire qu'un élève de notre école retient plus de choses qu'un élève ayant suivi un lycée 'classique'. »
Cette démarche est encore renforcée par l'enseignement « concentré » qui se fait dans les « époques », c'est à dire des unités de deux heures où une matière est traitée de façon intensive tous les jours pendant trois semaines.Si la pédagogie de Waldorf est efficace, pourquoi n'est-elle pas plus répandue en République tchèque ? Selon Ivan Smolka, cela est lié avec l'attitude réservée des Tchèques :
« Il est assez étrange que des mythes sur l'école Waldorf persistent jusqu'à nos jours. Aux yeux de la société, c'est comme i c'étaient des enfants qui jouaient sans rien apprendre. Selon certains, c'est une école pour enfants difficiles, pour enfants handicapés et ainsi de suite. Or, les chiffres prouvent le contraire : avant d'être le directeur ici, j'ai travaillé à l'école élémentaire Waldorf où le taux d'admission des élèves au 'gymnázium' était entre 40-50%, tandis que la moyenne pragoise était de 12%. Alors on a eu un succès énorme. Mais pourtant les écoles Waldorf sont perçues comme quelque chose d'étrange, de bizarre. »
Probablement, si l'expansion de cette pédagogie n'est pas si importante, cela ne tient pas de la cécité de la société tchèque ni de son dégoût de découvrir de nouvelles choses, mais du fait que ce courant s'oriente vers un public particulier en utilisant des méthodes qui ne conviennent pas à tout le monde.