Madeleine Albright : « Nous devons nous préparer à vivre dans un autre monde »
La visite actuelle de l’ancienne secrétaire d’Etat américaine Madeleine Albright en République tchèque est très suivie et commentée par les médias. L’ancienne diplomate née en 1937 en Tchécoslovaquie semble resserrer les liens avec son pays d’origine. Venue officiellement pour assister à l’inauguration de la statue du président américain Woodrow Wilson, cofondateur de la Tchécoslovaquie indépendante, Madeleine Albright était aussi une des invitées de marque de la soirée-concert donnée, samedi, par Václav Havel à l’occasion de la célébration de ses 75 ans. Elle a profité de l’occasion pour assister à la première du film documentaire consacré à son père Josef Korbel, diplomate tchèque devenu professeur d’université aux Etats-Unis.
« Je suis en train d’écrire un livre. Je suis née en 1937 et je me concentre sur la période entre 1937 et 1948 historiquement très importante. Et je vois cette période un peu sous le prisme de l’histoire de la vie de mon père. (…) Le ministère des Affaires étrangères a mis à ma disposition beaucoup de documents. C’est très intéressant et je cherche à rassembler toutes ces informations. »
D’après Madeleine Albright, le monde au seuil du XXIe siècle n’est plus ce qu’il a été et continue à changer rapidement. Elle se montre optimiste cependant en ce qui concerne l’avenir des Etats-Unis :
« Je pense toujours que l’Amérique restera le pays le plus influent, mais elle aura d’autres partenaires parce qu’elle en aura besoin. Il y a les problèmes actuels comme par exemple le nucléaire, le terrorisme, l’environnement, et pour les résoudre nous avons besoin d’une coopération entre les pays. Il est vrai également que les gens ne croient plus nulle part aux institutions existantes. Il y aura donc beaucoup de changements. (…) Nous devons donc nous préparer à vivre dans un autre monde. »
Dans ce nouveau monde, toujours selon Madeleine Albright, l’Occident devra collaborer avec l’Orient, le Nord avec le Sud. A son avis, nous faisons partie d’un ensemble et devons par conséquent apprendre à suivre la situation dans les autres pays et sur les autres continents, que ce soit l’Amérique latine, l’Afrique du Sud ou la Chine. Nous dépendons donc tous de plus en plus les uns des autres, et Madeleine Albright espère que notre coopération ne sera pas freinée par de nouveaux nationalismes. La coopération est nécessaire aussi dans la lutte contre le terrorisme :« Je pense que les gens ont vraiment compris qu’il fallait faire quelque chose en Afghanistan contre Al-Qaida et Oussama Ben Laden. On se demande maintenant s’il était vraiment nécessaire d’intervenir en Irak. On peut se poser la question, mais le fait qu’Oussama Ben Laden et d’autres leaders d’Al-Qaida soient morts est très important. La lutte contre le terrorisme est un travail interminable. Nous serons malheureusement contraints de passer toute notre vie avec le terrorisme, mais Al-Qaida n’est plus aussi forte qu’elle ne l’a été. »
La vague des révolutions qui a récemment déferlé sur les pays musulmans est, selon Madeleine Albright, un de ces événements majeurs de notre époque, mais il ne faut pas espérer que ce processus aboutira rapidement à l’instauration de la démocratie dans ces pays. « Cela va prendre beaucoup de temps et nous devons tous les aider », souligne-t-elle.