Michael Wellner-Pospisil, du cinéma à la direction des centres culturels tchèques

Michael Wellner-Pospisil

Un petit garçon au regard clair, un joli sourire, portant un gros matou tigré dans ses bras : c’est une image célèbre tirée du film ‘Un jour un chat’ de Vojtěch Jasný, avec le tout aussi célèbre Jan Werich, dans lequel Michael Wellner-Pospisil, à 8 ans, fait sa première apparition cinématographique. Quatre ans plus tard, il joue à nouveau dans un autre film de la nouvelle vague tchèque, ‘Le dirigeable volé’, de Karel Zeman. Ce début de carrière précoce l’a naturellement influencé, puisqu’il est devenu cinéaste. En 2000, il change de métier. Il devient directeur du centre tchèque de Paris, puis du centre de Sofia, en 2007. Aujourd’hui, il dirige depuis Prague l’institution qui chapeaute tous les centres tchèques, dont il explique le fonctionnement.

On travaille souvent avec des artistes tchèques, de l’art contemporain, des choses les plus récentes et les plus modernes. Nous avons aussi vocation à aider le développement du tourisme en République tchèque, et d’aider les activités économiques en coopération avec d’autres agences. Pour le tourisme, c’est CzechTourism, et pour les affaires économiques, c’est le réseau des CzechInvest et CzechTrade, qui sont également des agences d’Etat. »

Michael Wellner-Pospisil dans le film 'Un jour un chat'
« Ces centres tchèques sont un réseau de vingt-quatre centres culturels, à travers le monde, sur trois continents. Les activités des centres tchèques consistent notamment à propager la culture tchèque à travers le monde. On essaie de créer une image de la République tchèque à l’étranger.

Quelle est l’histoire de ces centres tchèques, quand ce réseau a-t-il été créé ? Dans quel contexte ?

« Les centres tchèques ont été créés juste après la deuxième guerre mondiale. Evidemment, après 1989, il y a eu des changements de noms, de présentation, il y eu beaucoup d’ouvertures de centres, notamment en Europe de l’Ouest puisqu’avant, les centres n’existaient que dans les ‘pays frères’. Le centre le plus ancien est un centre que j’ai dirigé pendant deux ans, avant de venir à Prague. C’est le centre tchèque de Sofia, qui a été fondé en 1949, donc d’une très longue tradition. Ce centre a joué un rôle très important pour les Bulgares et pour les intellectuels bulgares puisque nous étions toujours un peu plus libres qu’eux. Nous avons donc pu présenter nos films des années 1960 qui n’étaient pas vraiment visibles dans ce pays. Les Bulgares, dès le départ, ont beaucoup aimé ce centre tchèque, et même soixante ans après l’ouverture de ce centre, nous pouvons toujours bénéficier de cette énorme popularité parmi les Bulgares. »

Votre première expérience d'un centre tchèque était à Paris, pendant plusieurs années. Vous êtes arrivé à Paris via le cinéma. Pouvez-vous raconter ce parcours, ce passage du cinéma à celui de directeur du centre tchèque de Paris?

« J'ai commencé à vivre en France en 1980, et j'ai exercé mon métier de cinéaste pendant vingt ans. En 2000, j'ai posé ma candidature pour devenir directeur du centre culturel tchèque de Paris. J'ai été choisi et j'y suis resté jusqu'en 2007. C'était un changement dans ma vie professionnelle qui m'a beaucoup plu et qui me plaît d'ailleurs toujours. Après sept ans j'ai quitté Paris pour devenir directeur du centre culturel de Sofia. J'y suis resté deux ans et au bout de deux ans, j'ai été plus ou moins appelé à travailler comme directeur général de tous les centres tchèques. »

Vous avez une histoire familiale qui est liée à la Bulgarie. Avez-vous fait la demande d'aller en Bulgarie ou était-ce un hasard ? Et pouvez-vous raconter cette histoire familiale?

« Dans le vie il y a peu de hasards et effectivement j'ai des liens avec la Bulgarie. J'étais donc très content de retrouver une tante qui est encore là-bas et quelques cousins. Pendant deux ans, j'ai retrouvé cette famille. Ça m'a aussi aidé dans mon travail parce que c'est aussi le réseau familial qui fonctionnait. L'histoire est très simple. Mon grand-père paternel, qui vivait sous l'empire austro-hongrois, n'appréciait pas beaucoup la situation des Tchèques et des Slaves sous cet empire. Lui comme beaucoup d'autres Tchèques ont trouvé dans la Bulgarie un pays slave complètement indépendant, à l'époque. Ils se sont donc installés en Bulgarie pour aider, avec leur expérience et leurs connaissances, leurs frères slaves. C'était donc la raison pour laquelle il a émigré là-bas. Mon père avait à l'époque deux ou trois ans. Ses sœurs sont nées en Bulgarie. Elles se sont mariées là-bas, d'où viennent tous mes cousins qui sont à moitié bulgares, à moitié tchèques. »

Vous venez de prendre la tête de tous les centres tchèques. Quels sont les nouveaux projets que vous allez mettre en place?

« Les projets sont évidemment nombreux. Chacun des directeurs a sa ligne, son idée. Chacun a ses sensibilités ; certains sont plus orientés vers la musique, d'autres vers les arts plastiques, le cinéma etc. Ce qui influence aussi beaucoup la programmation sont les conditions dans lesquelles on travaille. Nous avons des centres qui ont leur propre bâtiment par exemple avec des galeries, des possibilités de projection etc. Mais d'autres centres sont réduits à un bureau avec un ou deux travailleurs, le directeur et son assistant par exemple, et tout ce qu'ils organisent se trouvent dans des galeries professionnelles qui sont dans la ville ou le pays dans lequel ils travaillent. C'est naturellement une approche tout à fait différente. Evidemment, nous voulons continuer à faire notre travail de présentation de la République tchèque comme un pays contemporain très actif au niveau culturel mais aussi économique et touristique. Il est vrai aussi que nous faisons face à une crise très grave qui a touché le monde entier. Nous devons prendre quelques mesures pour survivre à cette crise. Notre but est d'y survivre sans que l'on voit au résultat que nous avons des budgets réduits. C'est le problème très grave et très dense que je règle tous les jours, malheureusement beaucoup plus que des questions de programmation ou de stratégie culturelle. »

Quelle a été votre plus grande satisfaction pendant ces années de direction, que ce soit à Paris, à Sofia, ou à Prague ?

« Le plus grand succès est peut-être le festival international de jazz que j'ai fondé à Paris et qui s'appelle 'Jazzycolors'. Ce festival maintenant vit sa vie, même depuis que j'ai quitté Paris. C'est la septième ou huitième année. Je pense que c'est très bien parce que nous avons pu montrer aux Parisiens, et pas seulement aux Parisiens, non seulement le jazz tchèque mais aussi celui des pays qui peuvent être encore plus étrangers que la République tchèque pour les Français comme par exemple l'Estonie. Nous avons pu organiser ce festival qui se porte bien. Je reçois régulièrement des nouvelles. C'est un petit bébé qui grandit avec succès et j'espère qu'il vivra encore longtemps. »