Munich, un événement devenu un concept pour les relations internationales

85 ans se sont écoulés depuis la signature des Accords de Munich qui ont conduit à l’annexion des Sudètes par l’Allemagne d’Hitler. L’espoir occidental d’avoir « apaisé » les ambitions hitlériennes a été de courte durée puisque quelques mois plus tard, l’armée allemande entrait en Tchécoslovaquie marquant le début d’une occupation totale qui n’allait s’achever qu’au printemps 1945. Pour évoquer cette conférence historique qui a scellé le sort de la Tchécoslovaquie, ses échos en France à l’époque mais aussi ses échos jusqu’à nos jours, Radio Prague Int. a discuté avec l’historien Antoine Marès, auteur notamment d’une biographie du président Edvard Beneš.

Antoine Marès | Photo: Martin Vaniš,  Radio Prague Int.

« A titre personnel, Munich est au cœur de ma trajectoire d’historien depuis qu’en été 1970 j’ai été accueilli par une femme de ménage à la résidence universitaire Budec, en pointant son doigt sur moi en reconnaissant que j’étais un Français et en disant : ‘Mnichov !’ A l’époque, je ne parlais pas du tout le tchèque et je ne savais pas ce que ça voulait dire. Elle assimilait ce jeune étudiant de 19 ans à Munich. Cela m’avait beaucoup frappé. Sept ans plus tard, j’assistais aux cours d’été de l’Université Charles. Il y avait une conférence de l’historien Václav Král, grand normalisateur d’histoire tchèque, sur Munich justement. A un moment donné, il a pointé son doigt vers nous et il a dit : ‘vous les Occidentaux, vous êtes coupables !’ Je m’étais levé et j’étais sorti de l’amphithéâtre. Je ne suis pas revenu à Prague pendant des années après cet incident et d’autres qui avaient émaillé l’été 1977. Quand j’ai inauguré au Památník narodního písemnictví en octobre 2018 l’exposition Naše Francie, consacrée à la poésie française dans les traductions tchèques au XXe siècle, j’ai dit dans mon introduction que cette exposition était ma réponse à cette femme de ménage 48 ans plus tard. Ceci pour dire que Munich est au cœur de mes émotions personnelles, ce qui explique qu’un de mes premiers articles des années 1970 aient été consacré à Munich, que le premier colloque que j’ai organisé en 1978 à l’Institut d’études slaves ait été consacré à Munich. Par la suite, j’ai publié six articles sur Munich dans des revues scientifiques. Et bien sur cet événement est au cœur de ma biographie d’Edvard Benes, publiée en 2015. »

Les visées d’Hitler sur les Sudètes n’étaient pas nouvelles en 1938. On voit bien comme tout s’accélère après l’Anschluss en mars de cette même année : il revendique à la suite de cette annexion de l’Autriche les Sudètes en Tchécoslovaquie. Peut-on revenir avant sur le contexte dans ces régions germanophones du pays et rappeler en quelques mots les origines de cette mixité ethnique dans ces zones frontalières ?

Des Allemands des Sudètes | Photo: Muzeum dělnického hnutí/e-Sbírky,  Musée national,  CC BY-NC-ND

« Cette mixité est quelque chose de très ancien puisqu’elle remonte au XIIIe-XIVe siècle, à une époque où la définition des individus ne passait pas par une définition nationale, mais par une définition d’appartenance à des ensembles princiers, royaux, voire impériaux. Le problème de coexistence de ces différentes nationalités s’est vraiment posé à partir de 1848. C’est le moment où il y a commencé à avoir de revendications du côté des Allemands des Sudètes, de cette population allemande arrivée à des fins de développement économique, appelée par les rois de Bohême et qui, dans le contexte de la montée générale des nationalismes en Europe, a commencé à revendiquer son appartenance à une autre entité qu’à l’entité autrichienne, habsbourgeoise, et à regarder du côté de l’Allemagne. Le mouvement s’est accéléré avec la constitution d’une Allemagne unie. Les Etats successeurs, donc nés après 1918, étaient des états à très forte mixité nationale. Un autre élément fondamental expliquant la situation à laquelle on va arriver à la fin des années 1930, c’est la crise économique. Alors que ces Allemands sont ralliés à la Tchécoslovaquie dans les années 1920, au moins pour les deux tiers la situation se dégrade avec la situation économique. Les Allemands de Tchécoslovaquie ont le sentiment d’être plus maltraités que les Tchèques et sont travaillés par la propagande nationale-socialiste très fortement qui leur promet une situation bien meilleure s’ils regardent du côté d’Hitler. On oublie souvent cet élément de la crise sans lequel il y aurait probablement eu une coexistence beaucoup plus pacifique entre Tchèques et Allemands. »

Paradoxalement, la Tchécoslovaquie a été une terre d’accueil pour de nombreux intellectuels allemands fuyant le nazisme… Leur expérience n’a-t-elle pas trouvé d’écho auprès des germanophones de Tchécoslovaquie ?

« Non parce que cette population s’est radicalisée pour des raisons à la fois économiques, idéologiques, sociales. Finalement, on voit très bien que les dernières élections municipales en mai 1938 donnent 90 % de partisans du parti de Konrad Henlein, qui réclame le détachement de ces territoires et leur rattachement à l’Allemagne hitlérienne. »

Adolf Hitler et Konrad Henlein en Sudètes,  1938 | Photo: Bundesarchiv,  Bild 183-H13192/Wikimedia Commons,  CC BY-SA 1.0

En 1938, l’écrivain tchèque Jiří Weil écrit une nouvelle intitulée La Cathédrale de Strasbourg où il relate un séjour en Alsace. Sous prétexte de rechercher des statues d’un sculpteur tchèque, il donne à voir une image de l’Alsace et des Alsaciens, fidèles à la France, qu’il met en contrepoint avec les Sudètes tentées par le rattachement au Reich. Cette mise en parallèle est-elle pertinente ?

« Oui, par antithèse. Cela dit les Alsaciens sont partagés d’ailleurs : ils ne sont pas de façon univoque pro-français, on le verra puisque certains éléments préféreront la collaboration avec l’Allemagne, pour des raisons soit idéologiques soit nationales. Mais c’est vrai qu’il y a une forte contradiction. Chez Jiri Weil, il y a aussi le souvenir de la réaction des Tchèques à l’annexion de l’Alsace en 1870-1871. Cela lui rend forcément les Alsaciens très sympathiques comme à l’ensemble des Tchèques et des tchécophones. »

Le conférence de Munich  (Neville Chamberlain,  Edouard Daladier,  Adolf Hitler,  Benito Mussolini) | Photo: Bundesarchiv 183-R69173/Wikimedia Commons,  CC BY-SA 4.0 DEED

Historiciser Munich

Tout ou presque a été dit sur ces journées qui à Munich rassemblent Hitler, Mussolini, Chamberlain et Daladier, sur le fait que les Tchèques aient été exclus d’une réunion qui décidait de leur sort – le tristement célèbre « o nás, bez nás » (à propos de nous, sans nous)… Peut-on rappeler quelle était l’atmosphère qui prévalait en ces journées de fin septembre ? Dans quel était d’esprit se rendent Chamberlain et Daladier à la conférence ?

Edouard Daladier  (à gauche) et Adolf Hitler | Photo: Bundesarchiv,  Bild 183-1982-1020-502/Wikimedia Commons,  CC BY-SA 3.0

« Avant toute chose, il faut historiciser cet événement. Il faut s’abstraire, car c’est quelque chose que j’ai vécu très concrètement dans mes contacts avec les Tchèques. Je ne faisais pas de conférence à Prague ou en province sans qu’on me pose la question de Munich. Je répondais toujours que c’était un événement qu’il fallait historiciser et qu’il fallait aujourd’hui s’abstraire des émotions pour essayer de comprendre ce qu’il s’était passé. De ce point de vue-là, il y a deux camps, voire trois camps, parmi ceux qui représentent les Occidentaux à Munich : Chamberlain est persuadé qu’il va à Munich pour sauver la paix. Les Britanniques sont pacifistes, pour toutes sortes de raisons, et notamment parce qu’ils regardent beaucoup plus vers le dominions que vers l’Europe et qu’ils sous-estiment le danger que représente Hitler. Daladier, lui, est beaucoup plus conscient de ce danger et il y va un peu forcé. Il suffit d’ailleurs de regarder les photos et les documents filmés de cette conférence où l’on voit sa mine extrêmement renfrognée. Daladier n’est pas content du tout des Accords de Munich. En revanche, Mussolini est très fier d’avoir joué un rôle d’intermédiaire, là encore pour sauver la paix. Quant à Hitler il n’est pas content du tout : ce qu’il recherche ce n’est pas du tout un accord qui rattacherait uniquement les Sudètes. Mais son objectif, on le verra quelques mois plus tard, dès décembre 1938, c’est le rattachement de la Tchécoslovaquie pour récupérer le potentiel économique du pays, en prévision de ses opérations militaires. »

En France, un clivage entre munichois et anti-munichois

C’est ce manque d’anticipation mêlé à une forme d’aveuglement qui fait que quand Hitler, quelques mois plus tard, envahit la Tchécoslovaquie, il récupère toutes les usines d’armement, ces mêmes usines qui vont continuer de fonctionner à fond mais cette fois pour le régime hitlérien. Et parmi les chars qui entreront en France plus tard, il y aura justement des chars produits en Tchécoslovaquie…

Des chars allemands en France,  1940 | Photo: Imperial War Museums/Wikimedia Commons,  public domain

« Oui, on estime à un tiers le nombre de chars légers de fabrication tchécoslovaque, qui ont participé à la campagne de France. Ce n’était pas marginal. Ça a été un apport massif à l’armement allemand. En même temps, les Accords de Munich ont pu avoir une apparence de légitimité : des germanophones, des polonophones et des hungarophones ont rejoint les Etats voisins conformément au droit des nationalités. Ce n’était seulement qu’une apparence parce que les territoires annexés comprenaient aussi des Tchèques, des Slovaques, et des gens de gauche : vous avez fait allusion aux Allemands qui ont trouvé refuge à Prague, qui n’avaient aucune envie d’être rattachés à un pays autoritaire. Au fond, cet acte des relations internationales et ses suites expliquent que Munich, plus encore que Yalta, soit devenu un véritable concept des relations internationales. »

La presse française à l’époque a unanimement salué cet accord : y a-t-il eu pourtant en France des voix qui se sont élevées contre cette volonté d’apaisement à tout prix et si oui lesquelles ?

Photo: Muzeum dělnického hnutí/e-Sbírky,  Musée national,  CC BY-NC-ND

« Il est vrai que si l’on regarde les votes parlementaires, on a l’impression que 90 % de la population française a approuvé Munich. Mais il se trouve que début octobre, il y a le premier sondage d’opinion en France : un sondage qui donne des résultats différents. On se rend compte qu’à peu près les deux tiers de la population soutiennent les Accords de Munich et qu’il y a un tiers qui y est hostile. Une partie importante de ces opposants sont des communistes : le parti communiste a officiellement déclaré son hostilité. Il y a trois autres groupes : des patriotes de droite traditionnellement anti-allemands, des individus qui sont avant tout des défenseurs de la démocratie sans être nécessairement d’une gauche radicale et enfin ceux qui ne se sont aucune illusion sur les intentions d’Hitler et sur le nazisme. Parmi ces derniers, il y a le général De Gaulle. Comme il est militaire, il n’a pas droit à la parole publique, mais dans ses correspondances, avec sa femme notamment, il note très clairement son désaveu des Accords de Munich en disant que c’est le début de la fin. Il est très lucide sur ce qui va se passer. Ce clivage entre munichois et anti-munichois va être fondamental en France. Il va d’ailleurs se combiner avec le clivage pétainisme/résistance par la suite et puis se déliter au fur et à mesure de la guerre. Comme vous le savez, à Londres, il n’y a aucune ambiguïté puisque dès 1942, le général De Gaulle et Maurice Dejean, son commissaire aux Affaires étrangères, dénoncent les Accords de Munich. Une dénonciation qui sera reprise plus officiellement en 1944. Par rapport aux Britanniques, il est intéressant de remarquer que c’est une dénonciation ab initio, donc au départ. Alors que les Britanniques considèrent qu’ils peuvent les annuler à partir du 15 mars 1939, donc à partir de l’invasion de ce qui reste de la Tchécoslovaquie. »

Quelques jours avant la signature de ces accords, le 23 septembre exactement, le chef de la mission militaire française en Tchécoslovaquie, le général Faucher, donne sa démission au gouvernement français et se met à la disposition de l’armée tchécoslovaque. Dans nos archives sonores, Hubert Beuve-Méry, le futur fondateur du quotidien Le Monde, alors professeur à l’Institut Ernest Denis à Prague, dit de ce moment : «  Le malheur immérité qui a frappé la Tchécoslovaquie a causé au chef de la mission militaire française une douleur égale à celle de tous les Tchécoslovaques »  Quel écho a eu ce geste fort à l’époque dont on peut dire aujourd’hui qu’à lui seul, il a sauvé l’honneur de la France ?

Le général Louis-Eugène Faucher | Photo: VHÚ

« Le général Faucher est une icône des relations franco-tchécoslovaques. C’est évident, mais il a peut-être un peu perdu de la force de ses arguments en passant à Paris pour une sorte de porte-parole de la situation tchèque et de l’Etat-major tchécoslovaque. Mais c’est vrai que c’est une très haute figure morale et qu’il l’a montré par la suite en entrant dans la Résistance. Ces propos, selon lesquels il a sauvé l’honneur de la France, sont tout à fait justifiés, même s’il n’a pas été le seul à le faire. Il y a eu un mouvement en France parmi les slavistes : je pense à André Mazon, notamment. Mais vous avez raison de rappeler cette place du général Faucher. Une amitié très forte lui sera conservée et maintenue jusqu’en 1948 par le président Benes. »

Dans ce contexte, comment a été perçue en France quelques mois plus tard, en mars 1939, l’invasion  de la Tchécoslovaquie par les troupes hitlériennes ? Est-ce la fin des illusions pour l’opinion publique française ? Prend-on conscience que la guerre est aux portes ?

« Il est clair que c’est un désaveu de tous les munichois. C’est un choc chez les Occidentaux. On sait que c’est le moment où un retournement se produit aussi en Grande Bretagne : Chamberlain a ce mot qui est resté ‘Monsieur Hitler n’est pas un gentleman’, comme s’il ne s’en était pas aperçu avant. C’est un tournant, mais c’est aussi la suite logique de ce qui s’est passé entre Munich et mars 1939 puisqu’en décembre les Français se tournent vers les Allemands en leur demandant s’ils confirment leurs garanties de ce qui reste de la Tchécoslovaquie – or les Allemands refusent. C’est un aveu très clair de leurs ambitions et de leurs intentions. Le 15 mars 1939 ne fait que confirmer ce que disaient les anti-munichois dès septembre 1938. »

Des troupes hitlériennes au Château de Prague le 15 mars 1939 | Photo: public domain

Ce qu’il reste à dire sur Munich

Si l’on s’intéresse à l’actualité très récente, on a pu entendre en Tchéquie, suite aux premiers mois de la guerre en Ukraine, des réactions évoquant le retour d’un esprit munichois alors que la France était perçue comme trop frileuse dans son aide à l’Ukraine et Emmanuel Macron trop enclin à discuter avec Vladimir Poutine. Est-ce compréhensible selon vous, excessif, une comparaison trop facile ? Comment expliquer que ce « fantôme de Munich » n’ait pas disparu 85 ans plus tard ?

Chamberlain  (couvert par Hitler),  Hitler,  Mussolini et Daladier négociant à la Conférence de Munich | Photo: Wikimedia Commons/Bundesarchiv,  Bild 146-1970-006-11,  CC BY-SA 3.0

« Vous avez raison, c’est un phénomène très intéressant : Munich, comme je le disais il y a quelques instants, est devenu un concept pour les relations internationales. Il n’y a pas beaucoup de cas similaires en histoire : qu’un événement historique soit devenu un concept des relations internationales – avec des fonctions extrêmement paradoxales souvent. Munich, c’est la justification de l’expulsion des Allemands en 1945 et après, c’est aussi une justification de l’Etat tchécoslovaque qui n’était pas acquise, notamment aux Etats-Unis où il y avait des forces très importantes contre le renouveau de l’Etat tel qu’il existait avant la guerre. Cette instrumentalisation, on la retrouve à tous les niveaux : Munich, c’est le symbole du recul des démocraties de manière générale, ponctuellement face à l’Allemagne nazie, mais plus généralement face aux régimes autoritaires et aux dictatures. C’est le symbole de la lâcheté et de l’abstention des démocraties en période de crise, c’est la fin de la France comme puissance porteuse des idéaux démocratiques, c’est la trahison de l’Occident. Pendant la période soviétique, on est même allé jusqu’à dire que les Etats-Unis étaient responsables de Munich, dans un amalgame de l’Occident, alors que les Etats-Unis n’avaient pas grand-chose à voir avec Munich. Ça a été aussi le symbole de la trahison nationale des bourgeoisies, de l’innocence de l’URSS aussi, car c’était une façon de masquer son alliance avec l’Allemagne nazie. C’était aussi le synonyme de l’expansion de l’impérialisme à l’Est et il n’est pas étonnant dans ces conditions que Munich soit revenu sur le devant de la scène à propos de l’Ukraine. Il y a une utilisation permanente de Munich : on a parlé de Munich également à propos de 1956, plus en lien avec Suez qu’avec l’invasion soviétique à Budapest. Munich est revenu constamment sur le terrain des relations internationales à propos du Proche-Orient, notamment du conflit israélo-palestinien. On a vu comment les autorités israéliennes ont de façon récurrente utilise ce concept pour justifier leurs positions. Munich est particulièrement fertile dans le domaine politique français où on l’utilise à tout bout de champ. Mais pour l’Ukraine, c’est une utilisation très fondée puisqu’on retrouve un Occident confronté à la force brutale de la Russie poutinienne avec l’interrogation fondamentale de son soutien dans la durée à l’Ukraine. Dans une première phase, ce soutien a été effectif. Peut-être pas aussi important qu’il aurait dû l’être mais c’est une autre question. »

Du point de vue historiographique, y a-t-il encore des questions qui se posent sur les Accords de Munich ?

Lancement du croiseur lourd Prinz Eugen en 1938 | Photo: Wikimedia Commons/Bundesarchiv DVM 10 Bild-23-63-14,  CC BY-SA 3.0

« C’est une excellente question : on sait à peu près tout sur Munich. Il y a trois points qui restent encore un peu obscurs. C’est l’état des forces militaires de l’Allemagne nazie et de ses adversaires en septembre 1938 par rapport à septembre 1939. C’est une question fondamentale pour savoir s’il aurait été préférable d’entrer en guerre en 1938 plutôt que d’y être contraint en 1939. Nous n’avons que des éléments partiels pour répondre à cette question qui nécessiterait la construction de plusieurs scénarios possibles : avec ou sans l’URSS, avec ou sans la Grande Bretagne, avec ou sans l’Italie. Il y a encore là du travail pour les historiens, notamment les historiens militaires. La deuxième question est celle de l’intervention soviétique : quelles auraient pu être les forces que l’URSS aurait effectivement lancées dans la bataille, même si nous savons aujourd’hui de façon à peu près certaine que Staline n’avait rien préparé pour intervenir ? Il faudrait avoir accès aux archives russo-soviétiques. Il restera toujours l’inconnue des pensées profondes de Staline en septembre 1938. Il est clair que Munich a été vraisemblablement une des causes majeures du pacte germano-soviétique d’août 1939, avec la perte de confiance totale en l’Occident. Le troisième point qui n’est pas suffisamment exploré : l’impact de Munich dans le monde, en-dehors de l’Europe et des Etats-Unis. Voilà ce qui a mes yeux, malgré l’immense littérature consacrée à Munich, resterait encore à approfondir. »