Imbroglio du logement : les propriétaires d'immeubles s'en prennent à l'Etat

Suite à la décision du gouvernement tchèque, en décembre dernier, de geler le montant des loyers pour les trois prochains mois, soit jusqu'à la fin mars, les propriétaires d'immeubles, mécontents, ont décidé de réagir. Sûrs de leur bon droit, ils se préparent à réclamer massivement auprès de la Cour constitutionnelle des dommages et intérêts à l'Etat, dont le montant pourrait s'élever à plusieurs milliards de couronnes.

Le vide législatif était apparu au grand jour en novembre dernier. A l'époque, Paul Nissl, propriétaire d'un immeuble à Brno, en Moravie, avait décidé d'augmenter de six fois le montant de ses loyers. Une décision qui avait alors choqué l'ensemble de l'opinion publique tchèque, mais pas la Cour constitutionnelle. Celle-ci donna, en effet, raison à Paul Nissl, et réaffirma le principe de la liberté des loyers en annulant le décret du ministère des Finances sur leur contrôle.

De crainte de voir les propriétaires augmenter unilatéralement et fortement les loyers, le gouvernement fixa donc, en décembre, un moratoire de trois mois renouvelable d'un nouveau trimestre à son expiration, le 21 mars prochain. Un délai stratégique qui permettrait ainsi au gouvernement de contrôler le montant des loyers jusqu'à fin juin. C'est en effet à cette date qu'un nouvel amendement de la loi sur les loyers, à l'étude au ministères des Finances et de l'Aménagement du territoire, devrait être soumis à l'approbation du Parlement.

Mais le Consortium civique des propriétaires d'immeubles ne s'en laisse pas compter. C'est pourquoi il a appelé tous ses membres à engager des procédures en justice sous forme de demandes de dommages et intérêts à l'Etat tchèque. La raison : le manque à gagner subi par les propriétaires depuis le 1er janvier 2002. Et si les quelque 25 000 membres du Consortium venaient à saisir la Cour constitutionnelle, le montant total des dommages et intérêts pour l'année 2002 pourrait atteindre la somme de 7,5 milliards de couronnes, soit 250 millions d'euros ! Le Consortium estime, en effet, que la perte mensuelle moyenne subie par les propriétaires sur un appartement serait de l'ordre de 100 euros. Toujours selon le Consortium, le montant des loyers ne serait même pas suffisant à l'entretien nécessaire des immeubles. De ce fait, ses représentants estiment qu'un loyer régulé à Prague devrait augmenter de 20% par an, alors qu'actuellement, ce taux n'est que de 7%. Rappelons qu'en Tchéquie, un tiers des ménages sont locataires de leur logement pour lequel ils laissent, en moyenne, chaque mois, 20% de leurs revenus. Une réalité dont semblent, heureusement, apparement conscients politiques comme propriétaires.