Les évolutions révolutionnaires de la langue tchèque
La révolution de Velours de 1989 n'aura pas entraîné que des changements politiques. Etouffé pendant plus de quarante ans sous la lourde couverture de fer soviétique, le peuple tchèque avait besoin de s'ouvrir au monde. Mais le pays, futur centre géographique de la nouvelle Union européenne des 25, était aussi idéalement situé sur la carte pour que le monde vienne à lui. Aujourd'hui encore, cette ouverture sur l'extérieur continue d'avoir des conséquences difficilement imaginables treize ans plus tôt. La langue, ainsi, pourtant mystérieuse et à priori impénétrable, connaît une évolution qu'elle n'a sans doute jamais connue dans sa longue histoire.
Le tchèque appartient au groupe des langues slaves. Un groupe de la famille indo-européenne important, puisqu'au total, de l'extrême nord de la Russie à la mer Noire, et des monts Oural aux Balkans, ce sont 315 millions de locuteurs qui parlent aujourd'hui une des douze langues slaves vivantes. Les linguistes divisent celles-ci en trois groupes, le tchèque faisant partie des langues slaves occidentales, en compagnie notamment du slovaque, très ressemblant, et du polonais.
Comme toute langue, le tchèque porte à travers le temps les traces de l'histoire d'un peuple et de sa culture, en l'occurrence celle des Pays tchèques. Aujourd'hui pourtant, beaucoup s'accordent pour dire que, depuis 1989, le tchèque connaît l'une des périodes les plus significatives en termes d'évolution. C'est que, comme un peu partout en Europe, le tchèque ne résiste pas aux pressions provenant de l'extérieur de ses frontières.
C'est le vocabulaire qui subit principalement l'influence de l'anglais. Une influence nettement plus forte que n'a pu être celle du russe, pourtant langue slave aussi, tout au long de la seconde moitié du XXe siècle, et ce pour une raison très simple, puisque l'apprentissage du russe, langue du dominateur honni, était obligatoire. Les jeunes sont logiquement les initiateurs les plus friands de cet afflux d'anglicismes dans la langue tchèque. Des anglicismes souvent synonymes d'un apport lexical certain, notamment dans le domaine technologique, mais nettement moins appréciés par les traditionalistes lorsqu'il ne s'agit que d'expressions résultant d'une mode lancée par les jeunes entre eux.
Les nouveaux moyens de communication, comme le courriel (mail) ou le message SMS, jouent également un rôle prépondérant dans l'évolution de la langue, notamment par l'emploi des multiples abréviations qu'ils nécessitent. A ce sujet, rappelons que les Tchèques font partie des plus gros consommateurs de messages SMS en Europe. C'est pourquoi certains linguistes n'hésitent désormais plus à parler de la naissance d'une nouvelle langue, tant son utilisation a désormais dépassé le simple cadre du message SMS.