Vivre avec un nouveau coeur
L'Institut de la médecine clinique et expérimentale à Prague a organisé, ce jeudi, une curieuse rencontre. Les médecins ont invité à l'Institut les personnes qui ont subi une greffe du coeur. Cette rencontre, qui a réuni près de 130 greffés du coeur, les médecins de l'Institut, la ministre de la Santé publique, Marie Souckova, et de nombreux journalistes, a été organisée à l'occasion de la 500e transplantation du coeur réalisée dans notre pays. Vaclav Richter s'est entretenu à cette occasion avec la traductrice Alena Lhotova, qui, elle aussi, a un nouveau coeur.
"Il y a trois ans et demi. Bien sûr, je retiens a jamais la date de mon opération. C'était le 6 mars 2000, donc vous voyez, ça fait maintenant plus de trois ans et demi que j'ai un nouveau coeur."
Est-ce que c'était pour vous un grand changement?
"Pour vous dire franchement, non. C'était surtout un grand soulagement. Dans ce sens-là, c'était un changement important, parce que j'ai passé les derniers mois avant l'opération à l'hôpital dans un état vraiment moribond. Je ne pouvais pratiquement pas respirer, j'avais tout le temps mal au coeur, je ne pouvais pas manger, mes organes vitaux était en train de défaillir. Donc, pour moi, le fait d'avoir un coeur m'a apporté un grand soulagement."
Avez-vous pu commencer une nouvelle vie après la transplantation?
"Une nouvelle vie, on ne peut pas le dire ainsi. J'ai bien sûr commencé une autre phase de ma vie, mais en tâchant de renouer avec ce que j'avais fait avant. Je suis traductrice, je traduis la littérature française en tchèque, et c'est le genre de travail que j'ai pu faire après l'opération comme avant. Donc, logiquement, pour moi, ce n'était pas une nouvelle vie, c'était la poursuite, la continuation de ce que j'avais fait avant, et grâce à ce nouveau coeur, j'ai pu faire ce travail avec une nouvelle énergie."Maintenant, sur le plan physique, vous pouvez faire tout ce qu'on fait normalement?
"Il faut être prudent, je ne fume pas, je n'exagère pas, j'essaie de vivre une vie régulière, je suis sage, entre guillemets. Cela me permet de faire pratiquement tout ce que je veux. C'est-à-dire, l'hiver je fais du ski, l'été je nage, je fais du vélo. J'aime beaucoup la randonnée, je me promène dans les montagnes. Il y a quelques jours, je suis rentré des Alpes où je faisais des promenades de plusieurs heures dans les moyennes montagnes. Vous voyez, cela me permet de vivre plus ou moins normalement. Je ne suis pas des plus jeunes, j'ai plus de cinquante ans, mais je ne me sens pas physiquement plus handicapée que mes contemporaines."
Quels sont vos projets professionnels?
"J'aimerais bien finir cette traduction à laquelle je travaille depuis presque deux ans. C'est la traduction d'un livre sur l'histoire de l'Europe écrit par un groupe d'historiens de Montpellier, dont le professeur Carbonel et autres. Un autre projet, c'est d'essayer de réussir à un concours à l'Institut français de Prague qui me permettrait de faire un séjour de traducteur de six à sept semaines en France."
Est-ce que vous ressentez de la reconnaissance à la personne qui vous a donné son coeur?
"Bien sûr. Je ne connais pas son nom, parce que les médecins ne le disent pas. Je suis très, très reconnaissante à cette jeune femme qui a eu le malheur, à 31 ans, de perdre sa vie. Je lui suis très reconnaissante de m'avoir permis de vivre. Parce que sans elle, et sans son coeur, je vous dis, je serais morte comme elle."