Migrants : le « non » d’Andrej Babiš suscite indignation et colère
Le refus d’Andrej Babiš et de son gouvernement de répondre favorablement à la demande formulée par l’Italie pour accueillir quelques-uns des 450 migrants qui ont débarqué en Sicile dimanche dernier n’a pas laissé indifférent tout le monde en République tchèque. Plusieurs réactions ont été publiées et diffusées dans les médias pour critiquer cette position souvent qualifiée d’inhumaine.
L’auteur explique pourquoi la République tchèque aurait pu - et dû - faire un geste de bonne volonté en accueillant, ne serait-ce que symboliquement, sept de ces migrants. Et pourquoi sept précisément ? « La République tchèque, par la voix de son Premier ministre Andrej Babiš a refusé d’apporter son aide. La France, Malte, l’Allemagne, l’Espagne et le Portugal ont promis de prendre 50 personnes chacun. Si le gouvernement tchèque avait raisonné comme l’a fait la France, il aurait pu accueillir 7 migrants (la France a environ 6,7 fois plus d’habitants que nous). […] Soyons sérieux, ne sommes-nous vraiment pas prêts, comme l’affirme le vice-Premier ministre (le leader de la social-démocratie qui remplit également les fonctions de ministre de l’Intérieur et des Affaires étrangères, ndlr), le prétendument ‘prooccidental’ Jan Hamáček ? C’est un mensonge, nous avons plein de spécialistes de l’intégration, de programmes d’intégration, nous sommes prêts », s’emporte-t-il.
De son côté, iRozhlas.cz, le site de la Radio tchèque, a mis en ligne un article dans lequel il est mentionné que selon l’administration chargée de la gestion des centres pour les réfugiés, la République tchèque dispose théoriquement d’au moins 620 places libres actuellement. Autrement dit, peut-on lire entre les lignes, le « non » catégorique opposé à la demande italienne par le gouvernement tchèque n’est rien d’autre qu’une volonté politique.
Cette volonté, ce refus obstiné d’accueillir le moindre migrant illégal qui serait relocalisé après être arrivé dans un pays de l’Europe du Sud, a été mal perçue à Rome aussi. C’est la raison pour laquelle le président du Conseil italien, Giuseppe Conte, a adressé une lettre ouverte à l’attention de son homologue tchèque dans laquelle, tout en le tutoyant, il l’appelle à discuter avec lui en tête-à-tête des possibles solutions à la crise migratoire ; une invitation à laquelle Andrej Babiš s’est empressé de répondre favorablement :
« J’ai proposé la date du 30 juillet à monsieur le Premier ministre italien, qui m’a invité à lui rendre visite. Il sera malheureusement à Washington ce jour-là, nous cherchons donc un autre créneau disponible. En attendant, nous allons répondre par écrit à la lettre de monsieur Conte et nous nous efforcerons de lui expliquer notre position, qui est la même depuis longtemps déjà. »Cette position, défendue depuis l’adoption du principe de quotas de réparation entre pays en 2015 et qui s’est renforcée suite à leur suppression en juin dernier, consiste à n’accueillir aucun migrant, Andrej Babiš faisant désormais valoir que cet accueil repose de toute façon sur le principe de bonne volonté.
Mais si tout le monde a bien compris que la République tchèque n’accepterait personne, le reproche que beaucoup lui adresse est que son gouvernement ne propose aucune autre solution pour les migrants qui arrivent en Europe que celle de les renvoyer dans les pays d’où ils proviennent. Or, comme le notait dans son édition de lundi Hospodářské noviny, cela est bien souvent tout bonnement impossible pour différentes raisons. « Nous devons vraiment laisser les migrants mourir ? », se demande ainsi le commentateur du quotidien économique, qui remarque que le discours d’un Andrej Babiš qui s’est singulièrement radicalisé sur le sujet ces derniers mois n’a absolument pas été critiqué par aucun parti de l’opposition, pas même par les chrétiens-démocrates, et fait l’objet d’un « consensus politique ». « C’est pourtant une erreur », regrette-t-il, « tant du point de vue des relations qu’entretient la République tchèque avec les autres pays [de l’Union européenne], que d’un point de vue humanitaire plus généralement. » L’auteur note qu’un pays ne peut avoir des alliés que s’il est disposé à aider ceux-ci de manière désintéressée lorsqu’ils en ont besoin. « On nous a demandé une aide concrète et nous l’avons refusée », constate-t-il en se demandant comment la République tchèque réagira à l’avenir lorsqu’elle aussi, aujourd’hui « si duplice et cynique », aura besoin à son tour de l’aide des autres pays ?
Enfin, le commentateur conclut son analyse en précisant que « le nouveau gouvernement italien a clairement fait savoir qu’il fallait réduire la migration, et si possible l’arrêter. C’est une décision adaptée aux problèmes actuels en Europe. Le gouvernement tchèque prétend la même chose. Mais la différence entre les deux pays est que les politiques italiens, que l’on qualifie pourtant de ‘populistes’, ne sont disposés pour remplir cet objectif à sacrifier des vies humaines concrètes… » En d’autres termes aussi, tirez le rideau, la (triste) farce est jouée...