Harcèlement sexuel : l’eurocommissaire Věra Jourová témoigne
En pleine affaire Weinstein, ce producteur hollywoodien accusé de viol et de harcèlement sexuel par des dizaines d’actrices aux Etats-Unis et en France, l’eurocommissaire tchèque Věra Jourová a brisé, elle-aussi, le silence sur les violences sexuelles. Mercredi à Bruxelles, elle a révélé avoir été victime d’une agression sexuelle dans sa jeunesse. Le même jour, la chef de la diplomatie suédoise Margot Wallström dénonçait le harcèlement sexuel « au plus haut niveau politique ». Les deux femmes politiques ont ainsi soutenu la campagne #metoo (#moiaussi) qui incite les victimes à témoigner sur les réseaux sociaux.
Pour Věra Jourová, commissaire européenne en charge de la justice, de la protection des consommateurs et de l’égalité des genres, le dossier n’est pas nouveau : en novembre 2016, l’Union européenne a lancé une campagne pour combattre les violences envers les femmes. Elle s’est appuyée sur une enquête alarmante témoignant de l’étendue de la violence, notamment domestique, en Europe. D’après ce travail, dans l’Union européenne, une femme sur trois âgée de plus de quinze ans a été victime de violence physique ou sexuelle, plus d’une sur deux a été victime de harcèlement sexuel et une sur vingt a été violée.
L’association Konsent fait partie des nombreux organismes qui luttent contre le harcèlement sexuel en République tchèque, à travers des campagnes sur Internet et sur les réseaux sociaux, des expositions, des conférences et workshops organisés dans des écoles, ainsi que des articles dans les médias. Co-fondatrice de Konsent, Johanna Nejedlová salue la démarche de la commissaire Věra Jourová :
« Sa déclaration a beaucoup de poids, d’autant plus que l’égalité des genres fait partie de son portefeuille. Je crois que son soutien a une grande importance pour les femmes, de même que l’encouragement de la part de Brigitte Macron. Une campagne similaire à #metoo a eu lieu il y a quelques années de cela en Israël. Elle a suscité un afflux de témoignages des femmes politiques, des femmes qui s’engagent au sein de l’armée israélienne, des présentatrices de télévision aussi. Il est important de se rendre compte que toutes les couches sociales sont concernées par le phénomène. C’est un débat dont nos sociétés ont besoin. »En République tchèque aussi, les violences à caractère sexuel sont entourées de nombreux mythes et préjugés. Et tout comme dans les autres pays européens, elles concernent un nombre non-négligeable de la population : une femme tchèque sur dix a subi un viol, mais seulement 8% des femmes déposent une plainte à la police qui, quant à elle, n’identifie que 2% des agresseurs, selon les données communiquées par l’association Konsent. Dans ce contexte, des hashtags comme #metoo sur Facebook, ou #balancetonporc, devenu ces derniers jours viral sur le Twitter français, jouent un rôle important. Des témoignages affluent également sur les réseaux sociaux tchèques. Johanna Nejedlová :
« Certaines femmes écrivent juste #metoo, d’autres racontent leur histoire. Ce qui est important, c’est que les femmes évoquent toute sorte d’expériences, aussi des formes considérées comme ‘moins graves’ de harcèlement sexuel, comme le fait que quelqu’un se soit masturbé devant elles dans la rue, les a pelotées dans un moyen de transport, ou alors quand un proche les a harcelées au cours d’une fête familiale. Souvent, les femmes adoptent différentes stratégies pour éviter ce genre de situations, mais cela les limite dans leur vie quotidienne. »
Pour élargir le débat, Johanna Nejedlová incite les hommes, eux-aussi, à se confier et à faire part de leur expérience du harcèlement sexuel.