Photographie : les pèlerins et les carnavals de Markéta Luskačová s’exposent à Paris

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« Pour Markéta Luskačová, la photographie est un moyen efficace de lutter contre l’oubli ». C’est ainsi que le Centre tchèque de Paris présente son exposition des clichés du premier et du dernier cycle de la célèbre photographe tchèque. Des clichés qui documentent les pèlerinages et les carnavals dans les pays tchèques, deux traditions qui, selon l'artiste, ne devraient pas être oubliées.

Veronika Řeháčková et Markéta Luskačová,  photo: Facebook du Centre tchèque de Paris
Née en 1944 à Prague, Markéta Luskačová découvre la photographie à l’âge de vingt ans, alors qu’elle achète son premier appareil photo. Pendant sa carrière d’artiste, elle vit en Tchécoslovaquie, mais aussi en Angleterre et en Irlande. Entre 1976 et 1980, l’artiste collabore avec la célèbre agence Magnum Photos regroupant les plus grands photographes du monde. Son œuvre s’intéresse plus particulièrement aux gens et à leur histoire. Pour parler davantage de la photographe et de l’exposition, Radio Prague a rencontré Veronika Řeháčková du Centre tchèque de Paris :

« Avant ses études de photographie à l’école pragoise de cinéma FAMU, Markéta Luskačová a fait des études de sociologie culturelle à l’Université Charles. A cette époque, elle a commencé à s’intéresser à la religion et aux traditions. Elle est souvent évoquée en lien avec l’un des meilleurs photographes tchèques, Josef Koudelka, vivant actuellement à Paris, qui l’a initiée à l’art et aux techniques de la photographie. Il a d’ailleurs aussi participé au vernissage de l’exposition de Markéta Luskačová au Centre tchèque à Paris le 15 juin dernier. Une chose intéressante : l’écrivain britannique John Berger a comparé les deux artistes en disant : ‘Tandis que Koudelka dans ses photographies laisse le monde parler, Luskačová, dans les siennes, écoute son silence.’ »

Photo: Facebook du Centre tchèque de Paris
Une rétrospective au Centre tchèque de Paris reflète actuellement plus de cinquante années de sa création. Intitulée « Markéta Luskačová : les premières et les dernières », cette exposition propose de découvrir quelque 45 clichés :

« L’exposition est divisée en deux parties liées l’une à l’autre. La première présente le cycle de photographies en noir et blanc intitulé ‘Pèlerins’. Ce cycle documente les pèlerinages en Tchécoslovaquie et en Pologne entre 1964 et 1971. Markéta Luskačová a beaucoup voyagé avec des pèlerins. Parfois, les voyages s’effectuaient la nuit, les pèlerins ne pouvant pas traverser la frontière et voyager légalement dans d’autres pays… Elle a créé ce premier projet pendant ses études pour apporter son témoignage sur ces pèlerins et leurs voyages avant qu’ils ne disparaissent à jamais.

La deuxième partie de l’exposition est consacrée au cycle le plus récent, intitulé ‘De la mort, des chevaux et d’autres hommes’. Il s’agit de photos en couleur et en noir et blanc qui présentent des carnavals en République tchèque. Ce projet a été créé après la chute du régime communiste. Il a aussi une valeur politique puisque dans les moments difficiles de l’histoire du pays, comme pendant la Première Guerre mondiale, sous l’occupation nazie ou sous le régime communiste, les carnavals n’ont pas pu être célébrés. Ce cycle a donc pour objectif de montrer que la tradition des carnavals a été reprise dans la République tchèque démocratique. »

Markéta Luskačová,  photo: Facebook du Centre tchèque de Paris
Auteur d’une vingtaine de cycles photographiques et de photos documentant entre autres l’invasion soviétique en Tchécoslovaquie en 1968, Markéta Luskačová a par le passé exposé ses œuvres dans le monde entier :

« Nous pouvons trouver les photos de Markéta Luskačová dans les collections des grands musées et galeries du monde, comme la Tate Britain, la Bibliothèque nationale de France, le Musée d’art moderne à New York, la Galerie nationale d’Australie à Canberra ou le musée d’Israël à Jérusalem. Elle a exposé ses œuvres dans différentes institutions de prestige dont par exemple le Victoria and Albert Museum et la Whitechapel Gallery à Londres. Mais elle n’a eu qu’une seule exposition à Paris, c’était en 2001 à Fait et Cause, une petite galerie orientée vers la photographie. L’année dernière, elle s’est aussi présentée, avec Josef Koudelka, au festival Paris Photo. Quand j’ai découvert que ses clichés étaient exposés en Espagne et qu’ils devraient être transportés ensuite en Angleterre, j’ai eu l’idée d’organiser sa première exposition rétrospective à Paris, et plus généralement en France. »

L’exposition au Centre tchèque de Paris est ouverte jusqu’au 18 août et l’entrée est libre. Veronika Řeháčková nous y invite :

« Je recommande de ne pas manquer cette exposition car son travail est extraordinaire et a non seulement une grande valeur documentaire mais contient aussi un important message éthique. »