En République tchèque, le programme d’aide aux réfugiés irakiens est remis en cause
L’intégration des quatre-vingt-neuf réfugiés irakiens de confession chrétienne qui ont été accueillis en République tchèque depuis le début de l’année ne rencontre pas le succès espéré. Après qu’une famille de huit personnes a d’abord demandé, la semaine dernière, à pouvoir rentrer en Irak, un groupe de vingt-cinq autres auxquelles la République tchèque avait accordé l’asile, a été arrêté en Allemagne samedi, remettant ainsi en cause le programme d’aide qui prévoyait l’accueil au total de trente-sept familles et 153 réfugiés irakiens.
« Nous avons besoin de nous assurer que les intentions des réfugiés irakiens sont sérieuses. La République tchèque n’est pas une agence de voyage, et même si leur accueil est financé majoritairement par des fonds privés, nous ne pouvons pas nous permettre de faire venir ces gens en Europe centrale de façon à qu’ils poursuivent ensuite leur transit vers d’autres pays européens. Je comprends que tout le monde ne s’adapte pas à sa nouvelle vie dans un pays où l’environnement est très différent de celui dans lequel ils ont vécu jusqu’alors, comme je comprends que tout le monde ne veuille pas rester en République tchèque. Mais cela ne m’empêche pas non plus de penser que les efforts qui ont été entrepris pour les accueillir méritent un minimum de respect de la part de ceux qui aspirent à ce qu’une aide leur soit apportée en République tchèque. »
L’accueil de ces familles irakiennes, qui bénéficie du soutien du gouvernement, est organisé par Generace 21, une organisation tchèque qui s’efforce d’aider les chrétiens d’Orient. Malgré sa légitime déception, son directeur Jan Talafant s’efforce de comprendre les motivations des vingt-cinq personnes qui ont décidé de quitter la République tchèque pour l’Allemagne :« Cela est très fâcheux et nous attriste grandement, même s’il ne faut pas oublier que la majorité des réfugiés qui ont été accueillis restent en République tchèque. Il existe tout un tas de raisons possibles à la volonté des autres de partir. Une des principales raisons est d’ordre psychologique et les spécialistes des processus d’intégration nous en avaient avertis. Une fois l’euphorie de leur arrivée dans un pays d’accueil retombée après une longue période passée dans un camp de transit, certains réfugiés peuvent être confrontés à une période de crise. Cette crise peut prendre différentes formes et ils se rendent alors compte qu’ils aspirent à autre chose que ce qui leur est proposé. Une autre raison est que des personnes bien avisées leur ont fait comprendre qu’ils pouvaient vivre mieux ailleurs et leur ont donné de fausses informations. On peut aussi penser qu’ils ne se sentent pas les bienvenus dans notre pays compte tenu de ce qu’ils ont pu lire ou entendre sur le compte des migrants. Ils peuvent donc avoir le sentiment que les gens ne veulent pas d’eux. Les possibles raisons de leur comportement sont donc multiples, mais nous ne savons pas laquelle d’entre elles prévaut. »
Ce jeudi, le gouvernement prendra une décision concernant la suite qui sera donnée au programme d’accueil des réfugiés irakiens. Tandis que le ministre de l’Intérieur souhaite que celui-ci soit interrompu ou supprimé, Jan Talafant se veut, lui, plus optimiste :« Nous espérons qu’il ne s’agit bien là que d’une mesure provisoire. Si les cinquante-six autres réfugiés restent en République tchèque, s’ils poursuivent leur apprentissage du tchèque et cherchent un emploi, nous espérons que ce programme d’aide sera renouvelé et qu’il pourra se poursuivre de façon à parvenir au nombre de cent-cinquante-trois personnes que nous avons prévu d’accueillir. Mais c’est une décision qui dépend du gouvernement. »
Quoiqu’il en soit, le départ des réfugiés irakiens a apporté de l’eau au moulin aux opposants en République tchèque à l’accueil de migrants. Et ce même si selon Jan Schroth, un responsable du bureau tchèque de l’Organisation internationale pour les migrations, les choses ne sont pas si simples :
« Qu’une minorité de gens au sein d’un groupe changent d’avis et ne respectent pas les règles qui ont été convenues ne signifie pas qu’il faille généraliser. On ne peut pas affirmer que personne ne veut venir ou que les demandeurs d’asile ne veulent pas vivre en République tchèque. Il ne faut pas oublier par exemple que plusieurs milliers de Syriens se sont intégrés dans le passé. Et selon les informations dont je dispose, je crois savoir que la majorité des réfugiés irakiens qui sont arrivés cette année envisagent toujours leur avenir en République tchèque. »
Il faudra toutefois désormais attendre pour savoir si les soixante-quatre autres ressortissants irakiens qui devaient encore être accueillis en République tchèque cette année, le seront bien eux aussi.