A qui profite le piratage des courriels du premier ministre

Photo: ČT24

Cette semaine, l’agenda politique et médiatique a été dominé par le piratage des courriels du premier ministre Bohuslav Sobotka. Certains médias ont rappelé le lancement par les autorités communistes, au début des années 1970, d’un document qui a défini le climat dans la société pendant la période dite de normalisation qui a suivi après l’écrasement du Printemps de Prague par les chars soviétiques. Deux décès ont trouvé un large écho dans les pages culturelles des journaux. S’agissant de Pierre Boulez, les critiques de musique tchèques ont apprécié non seulement les qualités artistiques uniques de ce compositeur et chef d’orchestre français, mais aussi les liens qui l’attachaient à la Tchéquie. La mort de David Bowie a également offert l’occasion de rappeler ses nombreux séjours à Prague. Un mot enfin dans cette revue de presse sur le goût croissant des Tchèques pour les musées.

Photo: ČT24
L’affaire des courriels du premier ministre Bohuslav Sobotka qui ont été piratés et diffusés par des hackers d’extrême droite ne cesse d’alimenter les médias qui proposent différentes analyses. Une des hypothèses les plus probables table sur une attaque opérée par des néonazis. Dans un entretien mis en ligne sur le site aktuálně.cz, Lukáš Nový, expert en informatique et qui se présente comme un hackeur éthique, soulève une autre éventualité :

« Je pense d’abord que cette attaque est menée de l’intérieur. Son auteur, ça peut être un collègue délaissé ou un expert en sécurité qui a accès à l’architecture des serveurs. Mais il est vrai que porter préjudice au premier ministre et à sa réputation peut profiter à des groupes variés, depuis ceux d’extrême droite jusqu’à ses collaborateurs proches... »

L’hebdomadaire Respekt publie un texte qui examine les différents aspects de cette affaire. Une occasion pour ses auteurs, Ondřej Kundra et Jiří Sobota, de constater que la protection des outils de communication est sous-estimée dans les milieux politiques tchèques. Ils remarquent à ce sujet :

« Les onze ministres qui sont membres du Conseil de sécurité de l’Etat et qui ont en charge les plus importantes questions en rapport avec la protection de la Tchéquie, ont le droit de disposer de téléphones spécialement protégés, mais ceux-ci ne sont pas employés par tout le monde. En plus, la communication électronique des ministères n’est pas gérée sur la base d’un compte commun qui serait contrôlé et sécurisé par l’Etat. Le fait qu’un tiers des ministères soit géré par des sociétés privées augmente le danger d’intervention d’espions étrangers. L’Office national de sécurité ne cesse d’inviter les représentants politiques à prendre au sérieux les risques de cette situation mais, jusqu’à présent, sans grand succès. »

L’incident concernant les courriels du chef de l’Etat semble pourtant pouvoir changer les choses. Alors que des recommandations ont été communiquées à l’ensemble des députés, le Bureau du gouvernement a adopté des mesures sécuritaires plus strictes. Bohuslav Sobotka, quant à lui, a cessé d’utiliser son adresse électronique privée.

Pierre Boulez connu et reconnu en Tchéquie

Pierre Boulez
Pierre Boulez faisait partie des artistes les plus influents du XXe siècle. C’est ce qu’ont constaté à l’unisson l’ensemble des journaux tchèques à l’occasion du décès de cet illustre compositeur et chef d’orchestre français. Dans une note signée Boris Klepal et publiée dans le quotidien économique Hospodářské noviny, on peut ainsi lire :

« Il se peut que dans la musique du XXe siècle, Boulez ait joué en premier lieu un rôle prophétique, car il défendait et mettait la musique contemporaine en valeur partout où il pouvait le faire. Le besoin de se rapprocher du public l’a finalement dirigé vers des activités de chef d’orchestre. La gloire que Boulez a atteinte dans cette discipline a fini, paradoxalement, par dépasser sa gloire de compositeur. Lorsque Boulez, qui choisissait soigneusement son répertoire, a décidé de présenter une œuvre, il s’agissait toujours d’une sorte de consécration. Et peu importe s’il dirigeait un grand orchestre ou son Ensemble intercontemporain. »

Enfin, Boris Klepal rappelle qu’en 2007, Pierre Boulez a dirigé au Theater en der Wien l’opéra De la maison des morts de Leoš Janáček. Une mise en scène signée de Patrick Chéreau qui, d’après ce que le critique de musique écrit, coupe le souffle encore en DVD, des années après. Par ailleurs, Boulez s’est consacré à l’œuvre de Janáček en dirigeant également certaines autres de ses compositions, comme la Messe glagolitique ou Sinfonietta. En 2009, Boulez s’est vu octroyer le titre de docteur honoris causa de la JAMU, l’ Ecole supérieure de musique de Brno, pour l’excellence de l’interprétation et pour la propagation du travail de Janáček. Un an après, Boulez s’est produit avec son Ensemble intercontemporain au festival de musique du Printemps de Prague.

Le jour où la dite normalisation a frappé

Photo: ČT24
Ce 14 janvier, le site echo24.cz a rappelé la publication, il y a 45 ans de cela, d’un document intitulé La leçon tirée de l’évolution de la crise dans le pays et dans la société, qui aurait « gelé le pays et donné le coup d’envoi à des purges ». Le texte publié sur le site indique aussi :

« Le document lancé par les autorités communistes de l’époque est devenu une norme contraignante pour l’interprétation des événements de l’année 1968 et une base pour les appréciations politiques mises en œuvre au sein du parti communiste dans le cadre de la dite normalisation. Ainsi, le Printemps de Prague de 1968 a été qualifié de contre-révolution, tandis que l’entrée des troupes du Traité de Varsovie en août de la même année a été présentée comme une aide fraternelle et internationale. Dès l’adoption de ce document, chaque individu qui refusait de se soumettre pour le moins formellement au langage du document pouvait s’attendre à une sanction, comme la perte de son emploi, le frein mis dans sa carrière, l’interdiction d’étudier ou d’autres représailles. »

Le site rappelle également que dans les années 1970, 27% des membres du parti communiste, soit plus de 470 000 personnes, ont quitté ou ont été contraint de quitter le parti.

David Bowie et Prague

David Bowie,  photo: ČTK
Le décès du chanter britannique David Bowie, qui était aussi très populaire en République tchèque, a trouvé un large écho dans les pages culturelles des journaux nationaux. Retraçant sur le site ihned.cz les points clés de sa biographie et de sa carrière artistique, Josef Vlček a également rappelé les séjours et les productions du chanteur dans le pays en écrivant :

« Dans les années 1990, qui constituaient la deuxième période la plus créatrice de sa carrière, David Bowie prenait plaisir à séjourner en Tchéquie. Il aimait y donner des concerts, et c’est encore dans les studios de Barrandov de Prague qu’il a tourné un de ses meilleurs clips vidéo. Les témoins se souviennent qu’après un de ses concerts, il s’est établi dans un hôtel pragois près du Château de Prague pour y enregistrer plusieurs démos. »

L’auteur écrit que Prague a joué dans la vie de Bowie un rôle fatal, car le 23 juin 2004, en plein milieu d’un concert donné dans la capitale tchèque, il a été affecté de douleurs, prémices d’un infarctus. Les spectateurs tchèques ont alors été parmi les derniers à avoir eu la possibilité de voir David Bowie « en live ».

L’intérêt pour les musées en hausse

Photo: Martina Schneibergová
L’intérêt des Tchèques pour les musées et les sites historiques du pays est en hausse. C’est ce que constate dans une interview pour le quotidien Lidové noviny Ondřej Dostál, le nouveau président de l’Association des musées et des galeries tchèques. Cette tendance semble entre autres traduire la volonté des gens de passer leurs vacances et leurs loisirs plus souvent qu’auparavant dans leur propre pays. En Tchéquie il existe plus de 300 musées, dont l’importance est pour Ondřej Dostál irremplaçable. Il a expliqué pourquoi :

« Les musées, au gré du contenu de leurs collections et de leur orientation, constituent un réseau supplémentaire de mémoire et de formation. A souligner dans ce contexte le rôle des musées régionales qui, souvent, représentent un important moteur communautaire, car ils organisent des expositions d’artistes locaux et d’autres activités tout en étant porteurs et conservateurs des traditions... Aujourd’hui, les musées peuvent contribuer à éclaircir différentes questions en les situant dans un contexte historique. Cela concerne, par exemple, celle des migrants et de leur intégration. »

Le dernier supplément Orientace du quotidien Lidové noviny a informé pour sa part des grands travaux de rénovation qui se déroulent à l’heure actuelle dans le bâtiment principal du Musée national de Prague situé en haut de la place Venceslas. Dès l’achèvement de cette reconstruction générale, le musée ouvrira ses portes au public avec de nouvelles expositions. Leurs préparatifs étant tenus jusqu’ici secrets, le journal observe tout de même que leur objectif consistera à offrir une image authentique de la nation tchèque, ainsi que celle qu’elle présente au monde.