Les politiques réfléchissent aux solutions pour faire voter les Tchèques
16,7% : jamais dans l’histoire de la République tchèque le taux de participation pour un vote à l’échelle nationale n’avait été aussi faible que lors du second tour des élections sénatoriales, vendredi et samedi derniers, qui ont permis le renouvèlement d’un tiers des membres de la Chambre haute du Parlement. Une semaine plus tôt, le taux de participation s’était élevé à 38,6% pour le premier tour, mais celui-ci était organisé parallèlement aux élections municipales, qui, elles, avaient intéressé 44,4% des électeurs. Aussitôt l’annonce des résultats, plusieurs voix de dirigeants politiques se sont élevées pour proposer des solutions visant à réduire une abstention toujours plus importante.
Le président de la République a profité des dernières élections sénatoriales pour répéter qu’il souhaitait l’instauration du vote obligatoire, comme dans des pays comme la Belgique ou le Luxembourg, où ne pas se rendre aux urnes un jour de scrutin est passible de sanctions. Ce n’est pas la première fois que Miloš Zeman se prononce en faveur d’une révision de la loi électorale en vigueur. Et une telle révision ne serait pas non plus tout à fait une première dans l’histoire tchèque puisque, comme le rappelle le chef de l’Etat, le vote était déjà obligatoire à l’époque de la Première République tchécoslovaque dans l’entre-deux-guerres, et pas seulement sous le régime communiste. En mai dernier, Miloš Zeman s’était déjà ému de la très faible mobilisation de ses concitoyens lors des « européennes ». L’élection de vingt-et-un députés tchèques au Parlement européen avait alors été marquée par une participation de seulement 18,2%, taux le plus faible des Vingt-huit (qui affichaient une moyenne d’ensemble de 43%) derrière la Slovaquie voisine (13%) et de toute l’histoire de la République tchèque depuis la révolution et la chute du régime communiste.
Ce record a donc été battu le week-end dernier. Toutefois, déjà pour les seconds tours des élections sénatoriales en 2004 et 2012, le taux de participation était resté inférieur à 19%, les « meilleurs chiffres » pour ces douze dernières années remontant à 2002 et 2008 avec respectivement 32,5% et 29,85%. C’est une évidence, le Sénat et sa composition n’intéressent pas ou peu les Tchèques. Premier président de la Chambre haute au moment de sa création en 1996, puis de nouveau entre 2000 et 2004, Petr Pithart pense toutefois que les sénateurs eux-mêmes sont les premiers responsables de ce désintérêt pour une institution dont l’utilité est parfois remise en cause et l’abolition envisagée :
« Chaque sénateur devrait être capable d’expliquer de façon concise et simple aux gens quel est le rôle fondamental du Sénat. Or, ce que j’ai vu et entendu lors de la campagne, ce sont plutôt des absurdités. Les candidats promettaient d’amener des subventions dans leur circonscription ou de régler telle ou telle chose. Mais ce n’est pas le sens du Sénat ! Un sénateur n’est pas là pour faire le lobby de sa circonscription. Le sens du Sénat est de veiller au respect de la Constitution et de l’adoption de bonnes lois. Mais visiblement, la majorité de ses membres ne l’a pas compris, et c’est aussi de ma faute. » Pour tenter de remédier à une situation qui a permis à certains candidats d’être élus sénateurs en recueillant moins de 6 000 voix dans leur circonscription, diverses solutions sont donc envisagées. Le Premier ministre Bohuslav Sobotka propose que deux semaines, et non plus une seule comme cela est le cas actuellement, séparent les premier et second tours, histoire de permettre l’envoi des bulletins de vote chez les électeurs et ainsi de laisser le temps à ces derniers de faire leur choix entre les deux derniers candidats.Pour le vice-Premier ministre et leader du mouvement ANO Andrej Babiš, les élections en République tchèque, et pas seulement sénatoriales, pourraient être organisées les jeudi et vendredi jusqu’à 14 heures, et non plus les vendredi et samedi, journées que nombre de Tchèques passent loin de chez eux à la campagne. D’autres enfin suggèrent que les scrutins ne se tiennent plus que sur une seule journée, et évidemment pas le samedi, les Tchèques ayant visiblement ce jour-là d’autres préoccupations, bien plus importantes que l’élection de leurs représentants politiques.