A la Commission européenne, un portefeuille composite mais important pour Věra Jourová
Jean-Claude Juncker a annoncé ce mercredi la composition de la future Commission européenne. La candidate tchèque, Věra Jourová occupera le poste du commissaire à la justice, à la protection des consommateurs et à l’égalité des sexes. Même si ses ambitions pour la politique régionale ou les transports n’ont pas été satisfaites, la nouvelle commissaire retrouve sur son agenda des sujets éminents, comme la protection des consommateurs dans les négociations du Traité transatlantique, les quotas pour les femmes en politique, la discrimination des minorités ou la libre circulation des personnes.
« C’est notre dernière chance. Nous présentons aux yeux des citoyens de l’Europe une Union européenne qui est en charge des grands problèmes et qui est modeste, timide, presqu’inexistante lorsqu’il s’agit des problèmes mineurs. »
Dans cette nouvelle architecture, Věra Jourová ne s’est pas vue accorder le poste de coordinatrice, réservé aux poids lourds de la politique européenne que représentent les anciens Premiers ministres. En revanche, elle sera en charge d’un véritable portefeuille. L’actuelle ministre tchèque pour le Développement local, présidente adjoint du mouvement ANO, leparti de centre-droit fondé par le milliardaire Andrej Babiš, Věra Jourová est avocate de formation qui a ses propres expériences avec la justice. Accusée de corruption en 2006, elle a finalement été innocentée et dédommagée. La future commissaire à la justice, à la protection des consommateurs et à l’égalité des sexes, a livré, depuis Bruxelles, ses premières impressions :
« Ici à Bruxelles, le portefeuille de la protection des consommateurs, de la justice et ainsi que l’agenda de la protection des données est vu comme influent. Son attribution est une surprise pour moi, mais certainement pas une déception. Je considère qu’il s’agit d’une grande confiance que m’accorde le président de la Commission, Jean-Claude Juncker. »Les premières réactions sur la scène politique nationale ont été plutôt négatives. Le président Miloš Zeman ainsi que les partis d’opposition ont critiqué l’incapacité du gouvernement de Bohuslav Sobotka à négocier avec Bruxelles. Andrej Babiš, le supérieur de Věra Jourová, a même parlé d’une grande déception. Néanmoins, il est paradoxal que le chef du mouvement ANO, fervent combattant contre la corruption et le clientélisme en politique, se dise déçu par l’attribution du portefeuille de la justice. En plus, c’était Andrej Babiš qui avait écarté le candidat social-démocrate, l’économiste Pavel Mertlík, malgré le fait qu’il possède une qualification professionnelle pour un poste économique que revendiquait la République tchèque.
Contrairement à ce que disent certains acteurs politiques tchèques, Věra Jourová aura de l’influence dans la nouvelle Commission. Tout s’abord, elle reprend le portefeuille de la justice de l’ancienne commissaire Viviane Reding, qui était elle-même une des vedettes de la deuxième commission Barroso. En plus, la justice représente au XXIe siècle ce qui a été le marché commun au XXe siècle, c’est-à-dire un élément fédérateur qui fait avancer l’intégration européenne. Ensuite, la protection des consommateurs est un sujet qui se situe au premier plan des négociations du Traité transatlantique de commerce et d’investissement entre l’Union européenne et les Etats-Unis. Enfin, la mise en place concrète de l’égalité des sexes continue à diviser l’UE notamment quand il s’agit des quotas pour les femmes dans le monde de l’entreprise comme en politique. Věra Jourová, qui refuse elle-même les quotas, aura donc à gérer ce sujet controversé. Grâce à toutes ces thématiques, la commissaire a le potentiel de devenir un des visages les plus exposés de la nouvelle commission.