Quand un champion du monde de pétanque passe en Tchéquie
Plus de 260 joueurs de pétanque étaient réunis, jeudi dernier, dans les jardins du château de Troja, à Prague, pour participer à la 11e édition du tournoi organisé par la Chambre de commerce franco-tchèque. Parmi tous ces pointeurs et tireurs amateurs pur jus, un joueur se distinguait un peu plus que les autres quand même. Ancien triple champion du monde de pétanque entre 2001 et 2003, Eric Sirot était en effet l’invité de marque de ce tournoi. Si la pétanque est le dixième sport en France par le nombre de licenciés (un peu plus de 300 000), en République tchèque, en revanche, elle reste encore essentiellement un loisir assez représentatif de l’art de vivre à la française comme se l’imaginent les Tchèques. Et c’est entre autres cela qu’Eric Sirot a évoqué au micro de Radio Prague.
« C’est la conjonction de plusieurs facteurs J’ai rencontré Pierre Fuksa, l’organisateur, il y a quelques années quand je suis venu pour ce tournoi. Nous sommes restés en contact et je suis revenu parce qu’il a eu la gentillesse de me dire que je pouvais jouer avec lui samedi à un tournoi, et puis il y avait le tournoi de la Chambre de commerce. C’est avec plaisir que je suis revenu dans votre belle ville de Prague. »
Qu’est-ce qu’évoque pour vous en tant que joueur français de pétanque la République tchèque ?
« Au niveau de la pétanque, la République tchèque est un des pays qui émergent et qui essaient de faire leur trou. Pierre, les autorités et la fédération tchèque essaient de sortir des bons joueurs pour pouvoir s’améliorer, progresser, etc. La République tchèque fait partie des pays émergents qui peuvent, à mon avis, dans quelques années, rapidement progresser si on leur en donne les moyens au niveau humain, financier et au niveau de la détection et de la formation. Ils sont assez motivés et c’est un des pays qui commencent à arriver sur la planète pétanque. »Quelles sont les conditions pour qu’un pays progresse dans une discipline comme la pétanque ? En France, c’est le jeu de la moitié sud, il faut certaines conditions météo, on joue quand il fait beau, alors que la République tchèque a un climat continental et il ne fait pas toujours très beau…
« Ce que vous dites est vrai aussi, mais moi, qui suis de la région parisienne, je peux vous affirmer que tout au long de l’année, il y a également des tournois de haut niveau, que la pétanque s’est énormément développée et qu’il y a eu des champions, et notamment ces dernières années, qui viennent de la partie nord de la France et non plus de la partie sud, où traditionnellement cela avait été au départ inventé. Le climat, ça y fait, c’est évident. Jouer sous les trompes d’eau ou dans la neige, on ne peut pas, mais par contre jouer pas forcément sous les températures caniculaires et sous un climat tempéré, cela peut être agréable aussi. A mon avis ce qu’il faut c’est justement une politique de formation, un entraînement et une prise en charge régulière d’une élite. Le plus bel exemple de cela est la Thaïlande dont la reine est venue en France un jour et elle a été séduite par ce jeu et elle l’a imposé aux militaires comme une professionnalisation. Maintenant les gens sont payés pour jouer aux boules et ils ont des résultats extraordinaires. Ils s’entraînent et donc forcément on trouve des gens adroit et en Tchéquie il doit y avoir aussi. Avec un entraînement régulier et une participation, ils viennent en France pour faire des tournois pour s’habituer etc. Maintenant, ils sont les vice-champions du monde et des fois ils nous battent. »Alors que quand un Français ou des Français deviennent champions de pétanque, on va dire que c’est logique. Néanmoins, comment devient-on champion du monde, comment arrive-t-on jusque-là ?« Il y a plusieurs facteurs. Moi, c’était un tout petit peu, pas par hasard, mais cela a été une lente évolution. J’ai été champion de France, après j’ai intégré une équipe de haut niveau, après j’ai été repéré par la sélection, j’ai été sélectionné, puis on est devenu les champions du monde. C’est vrai qu’en France nous avons encore aujourd’hui une petite marge. Par rapport aux autres pays, nos meilleurs sont un tout petit peu plus forts notamment dans les parties importantes parce que nous avons plus de tournois, plus d’habitude de jouer des compétitions importantes que des autres pays. Je pense que c’est ce qu’il faut la différence. Mais les équipes comme la Thaïlande, comme Madagascar qui font des gros efforts au niveau de la pétanque nous rattrapent et réduisent l’évcart d’année en année. »
Vous êtes ici pour la deuxième fois en République tchèque. Vous aviez eu l’occasion de participer à des tournois ici. Que pensez-vous de l’ambiance autour de ce jeu ? En France, on l’image de ce sport où on joue et on boit un coup de pastis, ici c’est plutôt de la bière, des brasseries. Pas loin de Prague, il y a justement des beaux terrains installés au-dessus d’une brasserie locale…
« Cette ambiance me plaît beaucoup. J’avais été justement dans cette brasserie et dans ce terrain que vous évoquez. C’est une autre approche que nous on peut connaître en France. Il ne faut pas confondre la partie loisir et la partie compétition. C’est vrai qu’aujourd’hui encore comme le tournoi de la Chambre de commerce ou d’autres tournois peuvent être assimilés à des tournois qui ressemblent au loisir. En France, ce sont des compétitions structurées avec des équipes et des joueurs de très haut niveau, ça fait plus compétition que loisir. En Tchéquie, la plupart de tournois est peut-être liée au loisir. Si vous voulez vous développer et grimper dans la hiérarchie, il faudra petit à petit amener ce loisir à détacher une élite et à devenir la compétition de haut niveau. »Justement, les tournois auxquels vous participez en République tchèque sont essentiellement des tournois amateurs. Qu’est-ce qui vous plaît dans la façon de vivre et de pratiquer la pétanque des Tchèques ?
« Etre ici parmi vous est déjà quelque chose de magnifique. Prague est une ville superbe avec une ambiance tout à fait sympathique. Pour nous, c’est donc un régal de venir dans ce genre d’endroit pour pratiquer notre loisir dans les meilleures conditions. Tout le monde est très accueillant, on signe des autographes, etc. Par contre, c’est vrai que ce n’est pas du tout la même ambiance que celle que nous connaissons dans les grands tournois auxquels nous participons en France et dans lesquels il y a beaucoup plus de rivalité et d’esprit de compétition. Ici, ça reste beaucoup plus convivial que chez nous, sauf, bien évidemment et comme partout, dans les parties finales où, là, on retrouve les meilleurs joueurs tchèques et où la compétition reprend ses droits. Mais pour moi qui suis un compétiteur, ce n’est pas pour me déplaire. »
Et pour vous, c’est un peu une obligation de gagner… Un Français, ancien champion du monde, qui vient ici et ne gagne pas, ça fait un peu tâche, non ?« Non, ça dépend. La pétanque est l’un des rares jeux où un amateur peut battre un champion du monde. Déjà parce que l’on ne joue pas seul et ensuite parce que c’est un jeu d’adresse. Et il y a des fois où vous êtes bon, d’autres fois très bon et d’autres fois pas bon. Et quand on n’est pas bon, il suffit que votre adversaire soit, lui, dans un bon jour pour perdre… »
Surtout quand le terrain se trouve dans une brasserie comme dans les environs de Prague…
« Effectivement, d’autant plus quand il y a d’autres facteurs (rire)… Mais même… C’est un jeu d’adresse que je compare souvent au basket. Prenez les meilleurs joueurs du monde, un gars comme Tony Parker. Un match, il va rentrer huit ou neuf paniers sur dix, mais quand il n’est pas bon, il en met un sur dix. Et ce jour-là, eh bah, lui ou son équipe perd. Il est comme tout le monde. Bon, c’est vrai que quand vous avez la chance de jouer à un haut niveau, vous êtes plus régulier que la plupart des joueurs, c’est ce qui fait la différence, mais cela n’enlève rien au fait que vous pouvez perdre à n’importe quel moment. En tennis, un joueur comme Djokovic ne peut pas perdre contre un amateur, alors qu’en pétanque, cela peut arriver. C’est une des particularités de ce sport ou de ce jeu. »
Vous êtes présent à ce tournoi aussi pour présenter votre savoir-faire avec une exhibition. Que montrez-vous aux gens ?« Je ne sais pas encore si nous allons faire une partie contre les vainqueurs ou intégrer certaines personnalités pour jouer avec nous et faire ça dans une ambiance conviviale. Je suis ouvert à tout mais, généralement, c’est comme ça que ça se passe. Soit ce sera une partie avec les finalistes, soit des mènes avec certaines personnes auxquelles ça peut faire plaisir. Et on fera un peu le show, comme on dit. »
Quand vous venez en République tchèque, le programme de votre séjour, c’est pétanque et encore pétanque ou vous avez le loisir de faire aussi un peu autre chose ?
« Personnellement, je viens pour la pétanque. Il y a ce tournoi de la chambre de commerce, puis un autre samedi dans les environs de Brno, en Moravie. Mais cela ne m’empêche pas de visiter la ville. On arrive toujours à trouver un peu de temps pour découvrir votre superbe pays ! »