Un prix européen pour l'intégration des Roms dans une commune tchèque
Une municipalité du nord de la République tchèque a reçu il y a quelques mois un prix du Conseil de l'Europe pour ses initiatives visant à intégrer la communauté rom locale, qui représente environ la moitié de sa population. Sous l’impulsion de la maire et malgré les difficultés de cette région industrielle, Obrnice, près de la frontière allemande, a fait un effort important au cours des dernières années pour améliorer la sécurité, l'éducation, l'emploi et les services sociaux, dans un contexte national difficile.
Mais un véritable effort a été entrepris pour faire d’Obrnice un endroit plus agréable à vivre, et cet effort semble porter ses fruits. Deux assistants de prévention de la criminalité, Zdeněk Nistor et Milan Grundza, sont très vite prévenus par des adultes et viennent déloger les jeunes – poliment mais fermement - et ça marche, ils s’en vont, avec même un geste amical. Rémunérés grâce à une aide du ministère de l’Intérieur, Milan et Zdeněk apprécient leur job.
Milan Grundza : « Oui, nous aimons ce travail. Nous parlons à beaucoup de monde tous les jours. Et je pense que les gens commencent à nous respecter. S’il se passe quelque chose, ils viennent nous voir. Ils pensent que nous sommes la police, à cause des uniformes, mais nous sommes seulement des assistants. »
Zdeněk Nistor : « Au début, les gens ne nous respectaient pas vraiment. Mais ça a changé au fil du temps. En particulier chez les jeunes. A 19h30, on leur dit de rentrer à la maison, c'est la chose principale. Nous leur disons qu’à 15 ans ils ne doivent pas passer leur soirée à fumer devant l'école. Ce genre de choses. Et je pense qu'ils sentent qu'ils peuvent se tourner vers nous maintenant quand ils ont des problèmes. »
Cette scène de la vie quotidienne avait un caractère assez exceptionnel : car Milan et Zdeněk sont Roms et les adolescents ne le sont pas. Pas vraiment ce que les Tchèques sont habitués à voir et à entendre à propos des Roms en marge de la société, dans un pays où les problèmes sociaux finissent souvent par être présentés comme des problèmes ethniques.
Milan et Zdeněk battent le pavé - sans armes, mais avec un téléphone portable et le numéro de tous les parents qu’ils connaissent en général personnellement… C’est l’avantage de la petite taille d’Obrnice, qui n’aurait pas reçu son prix européen sans le travail de la maire, Drahomira Miklošová:« L’histoire et l’économie de la région ont fait qu’il y avait ici un terreau favorable pour les conflits entre habitants, pour la criminalité, la prostitution et la drogue. Si vous ajoutez en plus les salles de jeux avec machines à sous, ce n’était pas un endroit agréable à vivre. »
Quand elle a été élue il y a sept ans, Drahomira Miklošová (ODS) a voulu sortir sa commune de la spirale qui a transformé en véritables ghettos des dizaines de localités voisines.
Grâce à la vente d’anciennes casernes militaires et aux fonds européens, elle a élaboré un plan détaillé pour améliorer la vie de ses administrés – d’abord la sécurité - Obrnice dispose désormais d'un système de vidéosurveillance, avec aussi Milan et Zdenek et deux autres assistants en patrouille. Mais également en faisant de priorités l'éducation, le logement, l'emploi et les services sociaux - tous ces domaines ont été gérés grâce à des programmes innovants. Avec succès, comme le prouve la reconnaissance par le Conseil de l'Europe et le prix Dosta.
Drahomira Miklošová: « La réception de ce prix à Strasbourg a été un moment formidable et m'a donnée l'énergie de continuer. Cela m'a convaincue de ne pas céder aux voix négatives, à ceux qui disent que la situation exige des solutions radicales. Pour moi, il est crucial que rien ne soit donné gratuitement - Je dis toujours que les récompenses doivent être données en échange de quelque chose. Je vais vous aider, mais seulement si vous faites quelque chose en ce sens. Et si vous prenez cette approche, alors je pense que toutes les villes du pays pourraient faire les mêmes progrès et recevoir un tel prix. »La maire souligne que même après sept ans d’efforts pour revitaliser Obrnice il reste encore beaucoup à faire. Elle critique le manque de courage des politiciens au niveau national et regrette que la Cour constitutionnelle ait annulé un système, bénéfique à ses yeux, dans lequel les chômeurs étaient obligés de faire des travaux communautaires en échange de leurs prestations.
Mais il y a eu des améliorations notables et contrairement à d’autres localités tchèques à forte population rom, il n’y a eu ici aucun défilé de néo-nazis, qui prétendent défendre la population blanche pour commettre des violences.