Ils glanent le vent et récoltent des comètes. Débusquent des fauves et cueillent des phalènes. Ils tutoient la lune et valsent avec les loups. Ils sont deux et, à travers leur musique, nous invitent à explorer les incommensurables potentialités mélodiques que recouvre le monde. DVA, un si petit nom pour un si grand univers. Avis aux explorateurs de contrées musicales inconnues : les mélanges électro-acoustiques composés par ce binôme tchèque bourré de créativité opèrent avec la même magie qu’une course à travers champs par une nuit d’été.
Dva, photo: Minority Records
Bára et Jan Kratochvíl se sont rencontrés il y a quinze ans sur les planches du Théâtre DNO à Prague. Entre une pièce de théâtre et un spectacle de rue, ils tentent de rassembler le reste de la troupe autour de projets musicaux. Mais la taille du groupe pose des problèmes d’organisation et de synchronisation. Bára et Jan se retrouvent donc à deux et choisissent tout naturellement de baptiser leur duo DVA (qui signifie « deux » en tchèque). Né au printemps 2006, DVA fonde son propre label, Home Table, et enregistre « Nunovó Tango », leur premier grand succès, qui sera utilisé plus tard dans une publicité de Deutsche Telekom.
Dva, photo: Ben Skála, CC BY-SA 2.5 Generic
DVA, c’est un cocktail de tango, de pop, de beatbox, d’électro, d’acoustique, de cirque et de cabaret ; un alliage de guitare, de saxophone, de clarinette, de banjo, d’accordéon, de chant, de jouets électroniques, de sonnettes de vélo, de curseurs, d’ordinateurs, de microphones, de mégaphones et de loop station (ces appareils permettant d’enregistrer des sons en boucle). Bref, DVA est surtout un concentré de tout ce qui valdingue sur leur chemin : clapotis, bruissement, cliquetis, crépitement. Ils échantillonnent les bruits, collectionnent les sons. Ils essayent, expérimentent, hasardent, jusqu’à ce que tout concorde. Et si un avion vient à passer synchro durant l’enregistrement, ils gardent. On écoute « France trance » et « Lalabile », morceaux tirés de l’album Fonók, pour lequel DVA a reçu en 2008, dans la catégorie « Musique alternative », le prix Anděl, équivalent des Victoires de la musique en France.
Dva, photo: Minority Records
Les oreilles attentives auront tenté de chercher dans quelle langue chantent Jan et Bára, et pour ceux y ayant reconnu des accents suédois, allemand, hongrois, roumain, russe et parfois français, banco : c’est un peu de tout cela à la fois. Car l’une des originalités qui distingue définitivement DVA de n’importe quel autre groupe, c’est que le duo a inventé son propre langage. Il ne porte pas de nom en particulier, mais son dictionnaire est riche. Pour composer les paroles d’une chanson, Jan et Bára partent de son humeur, de son atmosphère, et déterminent de quelles régions d’Europe elle pourrait bien venir : plutôt du sud ou plutôt du nord ? Suite à quoi, ils écoutent des fréquences radio de cette région et tricotent un texte à partir des sonorités qu’ils entendent. Ainsi, ils décrivent Fonók comme « le folklore d’une nation qui n'existe pas » et leur deuxième album Hu comme « la pop d’une radio qui n'existe pas ». De ce dernier opus, on écoute « Tatanc » et « Tropikal Animal », dans lesquels le hip-hop de la jungle et le rap de la forêt ont, semble-t-il, inspiré les deux musiciens.
En parallèle de leurs productions personnelles, Bára et Jan participent à des projets divers et variés, comme la composition de musique de films, de spectacles, de sonneries de téléphone portable et de jeux vidéos. Ils ont par exemple composé la bande-son de « Botanicula », un jeu vidéo indépendant réalisé par un collectif tchèque et sorti en 2012, qui met en scène une expédition d’êtres de la forêt. On écoute « Juchu ».
À n’en pas douter, nous avons tous quelque chose à trouver dans l’univers de DVA. À deux, ils ont engendré un monde qui ne cesse d’étendre ses frontières. « À deux, disait Ovide, nous formons une multitude ».
Les trois derniers morceaux sont extraits de l'album Hu : « Hap hej », « Numie », « Valibela ».