Des chargés d'affaires pour mettre fin à la querelle sur les ambassadeurs ?
Le ministre des Affaires étrangères Karel Schwarzenberg (TOP 09) est fatigué de la querelle sur la nomination des ambassadeurs qui l’oppose au président de la République Miloš Zeman. Or il se pourrait qu’il ait trouvé la parade : il envisage de nommer des chargés d’affaires dans les pays problématiques. L’affectation de ces diplomates ne nécessitant pas l’accord du chef de l’Etat, cette mesure pourrait être une solution provisoire en attendant la nomination de vrais ambassadeurs.
Pour éviter que la situation ne s’enlise davantage et pour que la diplomatie tchèque reste opérationnelle, le ministre des Affaires étrangères a donc annoncé jeudi son intention de mettre fin à la vacance de certaines ambassades en y installant des chargés d’affaires, des diplomates au statut inférieur à celui d’ambassadeur, mais dont l’affectation ne requiert pas l’aval du chef de l’Etat. Johana Grohová, porte-parole du ministère :
« Le ministre tchèque des Affaires étrangères fait actuellement tout son possible pour trouver une solution afin d’assurer autant que possible le bon fonctionnement de nos missions diplomatiques à l’étranger. »
Ne seraient envoyées en tant que chargé d’affaires que des personnalités ayant reçu l’aval de leur pays d’accueil et dont l’envoi avait déjà été accepté par Václav Klaus. Johana Grohová évoque une procédure exceptionnelle. De dix à quinze personnes devraient être concernées selon des informations non officielles relayées pas la Télévision tchèque. Sont évoqués les cas de la Suisse, de la Croatie, de la Biélorussie, du Danemark, de l’Irlande ou encore du Kazakhstan. A terme, si Karel Schwarzenberg et Miloš Zeman parviennent finalement à s’entendre, ces chargés d’affaires pourraient devenir ambassadeur à part entière.Le tour de passe-passe du chef de la diplomatie est accueilli avec circonspection dans les rangs mêmes de la majorité. L’un de ses prédécesseurs, Cyril Svoboda du parti chrétien-démocrate, en poste entre 2002 et 2006, a exprimé ses réserves à la Radio tchèque. Pour lui, la nomination de chargés d’affaires n’est pas un bon signal envoyé aux partenaires de la République tchèque :
« Cela marque le fait que quelque chose ne va pas entre deux pays. Par exemple, nous avons un chargé d’affaires à Téhéran en Iran, nous en avons également un à Cuba. Cela signifie que quelque chose se passe entre ces pays et le nôtre et c’est pourquoi nous n’y avons pas d’ambassadeurs en tant que tels. Selon moi, ce que fait actuellement le ministère des Affaires étrangères est une erreur. Le seul intérêt véritable de la République tchèque est de nommer de réels ambassadeurs. Le reste, c’est de la décoration tchèque et ce n’est pas une bonne chose. »L’opposition, sociale-démocrate comme communiste, a également fait part de sa désapprobation, évoquant une diplomatie au rabais. On écoute Lubomír Zaorálek, ministre des Affaires étrangères du cabinet fantôme de la social-démocratie :
« Si dans des pays qui sont des destinations significatives pour nous économiquement et politiquement, nous avons seulement des chargés d’affaires à la place d’ambassadeurs durant un an ou plus, alors c’est quelque chose qui affaiblit incontestablement le niveau de notre diplomatie, qui en affecte la qualité. Il a y toute une série de personnes qui ne voudront pas traiter avec ce genre de représentant car ils le considéreront inadéquat. »
Miloš Zeman a réagi ce vendredi par un communiqué dans lequel il annonce vouloir rencontrer le premier ministre Petr Nečas dans les jours prochains pour tenter de trouver une solution à une querelle qui endommage singulièrement l’image de la République tchèque à l’étranger. Karel Schwarzenberg avait sans doute raison la semaine dernière quand il déclarait que cette crise pourrait bien perdurer.