La « mère de toutes les villes » n’a plus de maire
Les troubles au sein du conseil municipal de Prague duraient depuis des semaines, et un accord entre les deux partis conservateurs ODS et TOP 09 était activement recherché ces derniers jours pour permettre de faire survivre une coalition sous perfusion. Aucun accord n’ayant été trouvé, le maire a été destitué hier.
Bohuslav Svoboda, 69 ans, signe l’épilogue de cette dynastie. Maire depuis les dernières élections municipales en 2010, il a été renversé ce jeudi par le conseil de la ville sur fond de désaccords récurrents avec TOP 09 concernant des dossiers de transports publics et de financement de grands chantiers. Au micro de la télévision tchèque, il exprime son mécontentement et se positionne en chef de la vraie droite praguoise : « Maintenant, nous allons jouer le jeu à fond. Pas seulement dans l’idée d’être une opposition digne, mais parce que nous sommes la seule véritable droite qui existe à Prague. Désormais, il n’y a plus que cela qui compte. Ce qui s’est passé est une farce. C’est tout simplement une trahison contre tout. »
L’ODS, ou la véritable droite comme l’appellerait donc Svoboda, n’a pas pris part au vote sur l’avenir du maire. Peut-être pour masquer ses propres divisions, alors que deux conseillers municipaux du parti ont déjà claqué la porte il y a à peine un mois. Résultat, la gauche et TOP 09 se sont mis d’accord, et avec 41 voix pour sa destitution sur 42 votants, on peut dire que Bohuslav Svoboda n’a pas été épargné. Et avant la tenue d’un nouveau scrutin, c’est le TOP 09 Tomáš Hudeček, 34 ans, précédemment adjoint au maire, qui assure la transition. Hier matin, avant la destitution, le leader des conseillers municipaux sociaux-démocrates, Miroslav Poche expliquait le vote de son groupe : « Je pense que l’ensemble du groupe social-démocrate va voter comme un seul homme en faveur de la demande de destitution de Bohuslav Svoboda, parce que je pense qu’on lui doit tous les problèmes qui se sont accumulés ces derniers temps à Prague. Et puis le fait qu’il ait réussi à briser deux coalitions en trois ans ne devrait pas lui permettre d’avoir le droit de continuer à diriger la ville. Alors étant donné que les événements de cette semaine ont complètement paralysé la ville, il faut en finir d’une manière radicale. » Voyant son parti autant malmené à Prague, le Premier ministre ODS Petr Nečas a voulu taper du poing sur la table : « La formation d’un accord entre Monsieur Hulínský des sociaux-démocrates et Monsieur Hudeček de TOP 09 nous amène à l’existence d’un ‘accord Hu-Hu’, sur la base duquel se construira une ‘coalition Hu-Hu’, qui choisira son ‘maire Hu-Hu’. »Il est bien normal de voir le Premier ministre inquiet d’apprendre que dans la capitale, ses alliés gouvernementaux de TOP 09 se tournent vers le parti social-démocrate qui est presque assuré de le battre aux législatives de 2014. Il ne se prive donc pas, on vient de l’entendre, de dénoncer une alliance apparemment contre-nature et ostensiblement intéressée par des jeux de pouvoir à un an des municipales et des législatives. Mais peut-être oublie-t-il un peu vite que de 2010 à 2011, c’est avec ces mêmes sociaux-démocrates que l’ODS, arrivé deuxième derrière TOP 09, avait fait une coalition pour conserver le pouvoir.
En guise de riposte, Miroslav Kalousek, ministre des Finances et numéro deux de TOP 09, a signé une concise mais violente charge contre l’ODS praguois : « Les démocrates civiques de la ville de Prague se sont avant tout comportés comme une meute de chiens sauvages. »Ayant fait tomber le maire et deux de ses adjoints, TOP 09 a désormais toutes les cartes en main pour gouverner la capitale. Ils disposent d’un an pour montrer en quoi leur gestion serait meilleure, et surtout pour calmer des tensions à droite qui ne servent personne, probablement pas même eux s’ils veulent en prendre le leadership ; ce qui est désormais leur objectif clair.