Numérisation : de nombreux cinémas municipaux menacés faute de moyens
Depuis quelques années, les cinémas tchèques ont entamé une importante mutation. Les métiers de projectionniste et de technicien de laboratoire se raréfient et les copies argentiques des films disparaissent peu à peu alors que les salles se numérisent. Seulement, ce processus a un coût important et la survie de nombre de petits cinémas municipaux, de cinémas d’été ou de cinémas indépendants est largement remise en question. Seuls 36% des équipements cinématographiques tchèques ont jusqu’à présent opéré cette transition.
En République tchèque, les 27 multiplexes n’ont pas eu de mal à adapter leurs 214 salles à ce nouveau standart. Les cinémas des villes importantes ont également investi dans cette nouvelle technologie à l’image de Příbram, où le cinéma de la ville a de plus pu bénéficier de subventions pour moderniser ses installations. Petr Rybka, le directeur de cet établissement, est satisfait de cette évolution qui lui permet enfin de rivaliser avec la programmation cinématographique de la capitale, distante de quelques dizaines de kilomètres seulement :
« Cela s’est réalisé de façon remarquable, positive, car grâce à cela nous avons en fait accès aux films tout de suite. Il n’y a donc plus ce monopole lié à l’ancien format qui voyait les multiplexes disposer de l’intégralité des copies des films de l’ensemble des distributeurs et les programmer un mois durant. Les autres cinémas devaient alors attendre et beaucoup de gens se rendaient à Prague afin de pouvoir assister à ces films au plus vite. »
Mais la République tchèque dispose du réseau de cinémas le plus dense en Europe et sur les 426 établissements que compte le pays, seuls 155 ont à ce jour procédé à cette numérisation. En 2012, de nombreux films étaient encore distribués sur des copies argentiques 35mm. Mais celles-ci sont condamnées à se raréfier et il sera alors de plus en plus difficile pour les salles non-équipées pour la projection numérique de proposer une programmation riche et diversifiée. C’est ainsi que le président de l’Union des cinémas numérisés Petr Zurek peut résumer :« Les cinémas qui n’auront pas été numérisés, n’auront pas de films à projeter, et c’est une réalité très cruelle. »
L’obstacle est surtout financier pour les salles municipales qui n’ont pas les moyens, même avec l’aide du Fonds pour le soutien et le développement de la cinématographie tchèque, de se standardiser. Miroslava Jeřabková, la maire de Sedlec-Prčice, une commune de moins de 3 000 habitants, a été confrontée à ce problème :
« Nous avons voulu conserver le cinéma car l’offre culturelle est évidemment moins développée que dans des villes plus grandes. Néanmoins, cela n’est pas sans poser des problèmes avec la distribution car la diffusion de films sur pellicule argentique classique est désormais relativement faible. Et malheureusement, la ville n’a pas les moyens d’investir près de deux millions de couronnes (80 000 euros environ) dans la numérisation. Actuellement, nous cherchons donc une alternative à la numérisation avec des technologies plus simples. »Aussi, pour beaucoup de ces cinémas, l’année à venir s’annonce cruciale. Selon Pavel Štěpán, qui dirige une salle à Dobruška, les établissements qui ne parviendront pas à se moderniser, disparaîtront.
Paralèllement, la numérisation du patrimoine cinématographique tchèque a également pris du retard. En 2010, le ministère de la Culture prévoyait de numériser 200 films en quatre ans. En 2012, seules deux œuvres avait été restaurées : Markéta Lazarová de František Vláčil et Au feu les pompiers ! de Miloš Forman.