Daniel Ernst Jablonsky, constructeur des ponts spirituels
Jan Amos Komenský - Comenius est une grande figure de la pensée européenne du XVIIe siècle, qui a jeté les bases de la pédagogie moderne. C’est à la vie et à l’oeuvre de son petit-fils, Daniel Ernst Jablonsky, qu’est consacrée une exposition que le public peut voir ces jours-ci au Musée national pédagogique de Prague. Le descendant du grand pédagogue, qui a vécu surtout en Allemagne, est aujourd’hui presque oublié dans la patrie de son illustre grand-père et les auteurs de l’exposition se proposent donc d’attirer l’attention du public tchèque sur cet homme qui a devancé son époque.
« La fille de Jan Amos Komenský, Alžběta, a épousé le plus proche collaborateur de son père, Petr Figulus. Daniel Ernst Jablonsky a été le deuxième fils né de cette union. Le nom de Figulus n’était cependant qu’un pseudonyme utilisé par le collaborateur de Comenius après avoir été contraint à l’émigration pour des raisons religieuses. »
Les fils de cet émigré qui sont nés pendant l’exil n’étaient plus obligés de se cacher. Ils ont donc décidé d’avouer publiquement les origines de leur père provenant de la commune de Jablonné et ont adopté le nom de Jablonsky. Jan Šimek évoque les principales étapes de la vie du deuxième fils de Petr Figulus :« Daniel Ernst Jablonsky a fait ses études à l’université protestante de Francfort sur Oder. Il a fait aussi un séjour d’études à Oxford où il a noué beaucoup de contacts précieux avec des ecclésiastes anglicans qui devaient occuper plus tard des postes importants dans leur Eglise. Ensuite il a été chargé de poste de prédicant de la cour tout d’abord à Königsberg et, au début des années 1730, il est devenu prédicant de la cour de l’Electeur à Berlin. Il devait occuper ce poste jusqu’à sa mort en 1741. »
L’éloquence de Daniel Ernst Jablonsky est très appréciée et le roi Frédéric-Guillaume le donne en exemple aux autres prédicants. Son prestige est tel qu’il devient confident des rois de Prusse et exerce une influence considérable sur ces souverains. C’est pour cette raison qu’il devient aussi représentant de l’Unité des frères tchèques. Les membres de cette Eglise protestante, qui vivent en émigration en Pologne et doivent faire face à la pression croissante de l’Eglise catholique, confient à Daniel Ernst Jablonsky le siège d’évêque. C’est par l’intermédiaire et avec l’aide de Jablonsky qu’ils cherchent à protéger leurs droits religieux. Selon Jan Šimek, Jablonsky a renoué avec l’oeuvre de son grand-père en cherchant à rapprocher les chrétiens protestants de divers pays :« Il a été précurseur de l’œcuménisme ce qui est un mouvement qui ne s’est développé qu’à partir du XIXe siècle. Il a été un constructeur des ponts qui cherchait à éliminer les différences entre les confessions. Il ne s’agissait cependant que des confessions protestantes. Il ne cherchait pas un dialogue avec les catholiques mais un langage commun avec les luthériens, les anglicans et d’autres confessions non catholiques. »Les activités théologiques ne sont cependant qu’une partie de l’œuvre de ce penseur. Il se classe parmi les meilleurs orientalistes et hébraïstes de son temps et publie avec ses collaborateurs entre autres la version hébraïque de la Bible. En commun avec le grand savant Gottfried Wilhelm Leibnitz, il fonde vers la fin du XVIIe siècle la Société des Sciences de Berlin qui se transformera plus tard en Académie royale des Sciences et des Lettres. Leibnitz est le premier président de cette institution et Jablonsky est son adjoint. Après le départ de Leibnitz, il devient lui-même président de la Société.
L’exposition consacrée à cet important savant et théologien du XVIIe siècle sera ouverte jusqu'au 20 novembre prochain.