Un audit pour améliorer l’efficacité du secteur de la recherche en Tchéquie
La recherche tchèque doit être plus méthodique quant à l’évaluation et le contrôle des projets scientifiques, ainsi que dans l’attribution de financements à la recherche. C’est en substance le constat de l’audit international réalisé par la société Technopolis group pour le compte du Ministère de l’éducation, de la jeunesse et des sports. Si cette enquête, commencée en mai 2010, devrait encore se prolonger jusqu’à l’été, certains résultats ont d’ores et déjà été dévoilés ce lundi.
Cela fait bien longtemps qu’une partie de la communauté scientifique appelait à une réforme de la gestion et de l’organisation des financements de la recherche. Le directeur de l’Académie des sciences, Jiří Drahoš, parle ainsi d’un système avançant laborieusement à coup « d’améliorations chroniques et de méthodes rapiécées qui ne permettent pas de tendre vers la qualité. » Le manque de perspectives à long terme, une certaine vision simpliste des liens entre recherche et société et le centralisme de la recherche tchèque seraient des facteurs de son inefficacité. Le Britannique Erik Arnold a dirigé cet audit. Il pointe du doigt les faiblesses du système tel qu’il existe aujourd’hui.
« La force du système actuel, c’est évidemment sa transparence. Si il n’y a pas de résultats, il n’y a pas d’argent. Néanmoins, il y a là un point à souligner : ce système n’apporte aucun résultat satisfaisant. Nous recommandons donc fortement d’arrêter l’utilisation de cette méthode d’évaluation. La répartition des financements ne devrait pas être aussi mécanique. »
Or c’est la Commission gouvernementale pour le développement, la recherche et l’innovation en Tchéquie qui coordonne ce système d’évaluation. C’est donc logiquement cet organisme qui est la cible principale des critiques. L’économiste Daniel Münich apporte un éclairage à ce sujet :« Pour commencer ce qui est aussi très important, c’est le mode de fonctionnement et de gestion au plus haut niveau. C’est la Commission gouvernementale pour le développement, la recherche et l’innovation qui est donc en cause et le rapport constate une prétendue surcharge de travail lié au micro management. Elle effectue une masse de petites tâches, répartit le budget et manque alors de temps pour s’occuper de choses plus stratégiques. »
Malgré cela, à la lecture du rapport, certains points positifs se dégagent. Ainsi, le niveau d’investissement dans la recherche est supérieur à certains pays d’Europe du Sud tels que l’Italie ou l’Espagne. C’est même le deuxième plus dynamique parmi les pays récemment entrés dans l’Union européenne. Si la structure de ces financements est jugée décevante, elle est pourtant similaire à celles de pays comme la France ou le Royaume-Uni. Selon les auteurs du rapport, la part des investissements privés serait trop faible par rapport à ceux du public.
Aussi, il est peu étonnant que Josef Dobeš, ministre de l’éducation, et Jan Koucký, son vice-ministre chargé de la recherche et de l’enseignement supérieur, semblent paradoxalement plutôt satisfaits des conclusions de cet audit. En effet, le rapport propose finalement une libéralisation du secteur de la recherche, avec un contrôle de l’Etat moindre sur l’argent investi et une plus large autonomie des laboratoires de recherche. Or les entreprises ne sont pas philanthropiques et financent des projets susceptibles d’avoir des retombées financières. Le plus important, pour Erik Arnold, est de lutter contre l’idée que financer la recherche crée automatiquement de l’innovation. Les liens entre recherche et innovation seraient autrement plus complexes.Pour autant, il convient de s’interroger : l’innovation est-elle l’objectif ultime de toute recherche ? Ce rapport défend en effet une vision de la science uniquement tournée vers l’efficience économique. Reste à voir dans quelle mesure le gouvernement s’inspirera ou non de ce texte pour réformer la recherche. De nouvelles méthodes d’évaluation pourraient être utilisées dès 2015.