Elections municipales et sénatoriales : amère pilule pour le gouvernement de coalition
On votait ce week-end en République tchèque. Vendredi après-midi et samedi matin, un peu moins de 45 % des électeurs se sont déplacés aux urnes pour un double scrutin : appelés à renouveller partiellement le Sénat et à choisir de nouveaux représentants dans les mairies, les Tchèques ont lancé un avertissement au gouvernement de centre-droite du Premier ministre Petr Nečas, partisan de l’austérité budgétaire. Et infligé une cuisante déconvenue à son parti, l’ODS, qui perd son bastion praguois au profit de son parti allié conservateur, TOP 09. C’est d’ailleurs la seule chose dont peut se targuer ce récent parti qui, après son succès aux législatives de mai, fait chou blanc avec seulement 9,5% des voix aux municipales.
« Nous craignons un Sénat destructeur. Tous les citoyens tchèques devraient avoir peur de cette éventualité. Nous avons besoin de réformes, nous avons besoin d’aller de l’avant, mais nous n’avons pas besoin de négation et de destruction. »
Une victoire de la social-démocratie à la Chambre haute signifierait pour le gouvernement de coalition le blocage ou un frein conséquent à sa politique de réformes. En effet, outre les réformes économiques, la Chambre haute intervient dans des dossiers tels que les missions militaires à l’étranger, par exemple sur le nombre de soldats du contingent en Afghanistan, et l’élection présidentielle. Un rôle de contrepoids que se voit tout-à-fait endosser le leader du ČSSD, Bohuslav Sobotka :« Le Sénat peut avoir un rôle de garant contre les fautes du gouvernement de coalition de Petr Necas. Je pense justement que c’est positif. Si au Sénat il y a une majorité différente que celle à la Chambre des Députés, le Sénat aura enfin un sens. »
Trois mois à peine après son installation, soutenu par une majorité confortable à la Chambre des Députés, le cabinet de Petr Nečas passe donc difficilement le test de ce double scrutin, dans un contexte de grogne des fonctionnaires contre les mesures d’austérité dont le Premier ministre a fait son cheval de bataille. Rappelons en effet qu’environ 40 000 personnes ont manifesté fin septembre à Prague contre ces réformes.
C’est en outre une double déception pour le chef du gouvernement, membre du principal parti de droite, ODS : celui-ci perd en effet son fief hautement symbolique de Prague pour la première fois depuis 19 ans. C’est le parti conservateur TOP 09 qui a remporté la majorité des voix dans la capitale tchèque, avec 30%. Avec seulement 23% des faveurs des Praguois, l’ODS a perdu la moitié de ses électeurs par rapport aux dernière municipales il y a quatre ans. Il est toutefois probable que TOP 09 et l’ODS s’allient dans la capitale tchèque, même si des négociations vont également avoir lieu avec la social-démocratie : le vote-sanction des électeurs contre une ère ODS aux relents de corruption pourrait faire pencher la balance dans un sens bien différent. Prague devrait en tout cas bientôt avoir un nouveau maire aux couleurs de TOP 09, en la personne de Zdeněk Tůma, l’ancien président de la Banque nationale tchèque :« Le message des électeurs a été très clair : ils veulent des changements au sein de la direction de la mairie de Prague. Dans les négociations, je vais donc insister pour qu’il y ait un vrai renouvellement du personnel à la tête de la mairie. »Grand perdant du double scrutin : le parti Affaires publiques et son leader Radek John, membre de la coalition gouvernementale, apparu avant les dernières législatives. S’il avait bénéficié de l’effet ras-le-bol et de nouveauté qui va de paire avec les aspirations au changement des électeurs, il se voit infliger une claque retentissante avec seulement 3% des suffrages aux municipales, un échec total à Prague et un seul candidat au Sénat encore en lice, alors que le parti tablait sur au moins cinq représentants à la Chambre haute. D’ailleurs, de manière générale, à Prague, les petits partis ont été rayés de la carte, notamment les Verts. Leur chef de file Ondřej Liška entend d’ailleurs porter plainte à la Cour constitutionnelle : il reproche en effet à l’ODS la nouvelle répartition des circonscriptions dans la capitale qui aurait été défavorable aux petits partis.
En tout état de cause, c’est l’heure du bilan pour l’ODS, mais aussi pour de nombreuses autres formations politiques en échec, comme également le Parti communiste. Le verdict définitif des sénatoriales partielles, ce sera au second tour les 22 et 23 octobre prochains, un résultat qui pourrait donner une autre orientation à la vie politique tchèque.