C’était, il y a vingt ans…

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Stella Maris est une soliste soprano tchèque et professeur de chant, installée à Bordeaux. Elle est aussi fondatrice et présidente de l’Association franco-tchèque d’Aquitaine. Comment a-t-elle vécu les événements qui se sont déroulés il y a 20 ans dans son pays d’origine, communément appelés la révolution de Velours, et qui ont eu raison du régime communiste ? C’est à ce sujet qu’elle s’est confiée à Radio Prague.

« Je m’en souviens très bien, parce que j’était étudiante à l’AMU, Ecole supérieure de musique Janáček de Brno. J’étais déjà un peu au courant de ce qui se passait. J’ai travaillé aussi au théâtre et comme on le sait, les écoles et les théâtres étaient les premiers endroits où tout a en fait commencé ».

A Prague, les étudiants et les comédiens étaient les premiers à faire la révolution.

« A Brno, il y avait bien sûr la même ambiance. On a essayé de soutenir nos collègues à Prague, on a vécu pratiquement la même chose. On ne jouait plus, on a arrêté les cours, mais en revanche on avait beaucoup de contacts, beaucoup de rencontres avec le public. L’ambiance était vraiment exceptionnelle. Et ce sont surtout les étudiants qui ont tout organisé ».

Comment vous vous êtes retrouvée à Bordeaux ?

« Je suis venue d’abord pour travailler, à la base d’un contrat. J’ai chanté Stabat Mater et Te Deum d’Antonín Dvořák, du Saint-Saëns, dans le cadre des projets franco-tchèques. Bordeaux m’a charmé et ébloui, voilà pourquoi au bout d’un certain moment, j’ai décidé de m’installer et de vivre en France ».

Vous revenez souvent en Tchéquie. Quelle évolution voyez-vous, est-ce que les mentalités ont changé au fil et à mesure, dès votre départ ?

« Les gens ont changé. Après la révolution de velours on a dit – on va faire mieux. Et maintenant, vingt ans après, je me demande, si on a fait vraiment mieux. Je trouve que ceux qui ont dit on va être frères, on va s’aider, on va faire des choses bien, ne l’ont pas fait tout à fait. L’argent n’est pas mauvais, bien sûr, mais je pense que la période actuelle est trop ciblée sur l’argent et sur le pouvoir. Et c’est un peu dommage, car ce n’est pas le plus important ».

William Sirben, mari de Mme Stella Maris, est un auditeur fidèle de Radio Prague. Il explique :

« Ca remonte déjà très loin, j’ai découvert Radio Prague par des amis qui m’ont indiqué cette radio et par internet. J’ai très vite pris le goût à m’informer sur le site de Radio Prague qui est très bien fait et très complet. Maintenant, je le consulte presque quotidiennement. Nous sommes informés d’événements qui vous touchent particulièrement et dont on est mal informés en France. En consultant le site de RP, on peut être informés, par exemple, sur le problème des Roms, sur certains événements politiques, etc. ».

Depuis 1993, est ce que la République tchèque, est-ce que les Tchèques ont changé ?

« Tout a changé énormément par rapport à ce que j’ai connu en 1993. En RT, le changement a été très marquant, plus marquant par exemple qu’après le changement de régime en Espagne. Le changement a été très rapide. J’ai pu le constater en me rendant dans votre pays en voiture. En 1993, 1994 ou 1995, j’ai pu me permettre de doubler encore les voitures tchèques, un peu usées et fatiguées, tandis que deux ans après, c’étaient les voitures tchèques qui me doublaient. Donc, le niveau de vie a très vite évolué dans ce pays. Les changements ont été significatifs, tous les six mois quant on s’y rendait régulièrement, on voyait des changements très importants… Il y a eu une rénovation complète du paysage tchèque, au niveau urbain notamment. »

Voyez-vous quand même des vestiges du communisme dans la vie quotidienne ?

« Maintenant difficilement. Au début, oui. Au début des années 1990, on voyait un passé qui était là. Maintenant, il faut avoir un œil un peu exercé, un peu averti pour voir les quelques témoignages du passé. Peut-être ce passé est plus remarquable dans les petits villages où on peut en retrouver des traces. Mais dans les grandes villes le changement était radical ».

Est-ce que les Tchèques aiment parler politique comme les Français ?

« Non, pas du tout. Je l’ai remarqué avec ma femme qui est Tchèque. Quand nous sommes avec ses amis, moi en tant que Français, j’aime bien discuter politique, économie, etc., on aime débattre, mais avec les Tchèques, ce n’est pas une habitude, au contraire. Poliment, on nous fait comprendre que ce n’est pas la peine d’en discuter. Ils ne souhaitent pas s’étendre sur le sujet. Il est donc difficile de connaître la véritable opinion des Tchèques en politique. C’est très flou. Pour un étranger, il est difficile de situer politiquement les opinions des Tchèques actuellement. C’est un peu dommage et j’estime qu’il serait souhaitable imposer une élection présidentielle au suffrage universel dans les années à venir. Cela permettrait de connaître la véritable opinion politique du peuple, et cela pousserait peut-être les hommes politiques à faire la politique pour le bien commun de la société et s’engager un tout petit plus vis-à-vis du peuple. »