« L'euroscepticisme tchèque est une anomalie de l'histoire »
Les Verts ne sont pas les seuls perdants du scrutin européen. Parmi les autres perdants, Lukáš Macek, tête de liste du SNK-ED, petite formation libérale pro-européenne qui a totalisé 1,66% des voix. Radio Prague l’a rencontré pendant sa campagne et lui a posé quelques questions sur l’euroscepticisme en République tchèque.
Pourquoi selon vous la République tchèque est-elle considérée comme le pays ou l’un des pays les plus eurosceptiques de l’UE ?
« C’est une réputation en partie non méritée mais tout à fait compréhensible, bien évidemment à cause du président de la République, Václav Klaus, qui donne cette image ultra-eurosceptique à l’ensemble du pays. Mais ce qu’il faut rappeler est que le président en République tchèque joue un rôle essentiellement protocolaire et il n’a absolument pas le même poids politique que le président français par exemple. »
Mais – on le voit notamment pour la ratification du traité de Lisbonne – il n’y a pas que Václav Klaus qui donne cette image au pays.
« Václav Klaus a créé une école de pensée. Son influence sur son ancien parti, l’ODS, principal parti de droite, reste très importante et continue à s’exercer. Effectivement, Václav Klaus n’est pas un solitaire. C’est quelqu’un qui a su établir sur la scène politique tchèque un euroscepticisme viscéral. Mais en même temps je crois que c’est une sorte d’anomalie de l’histoire, car cet euroscepticisme très largement importé de Grande-Bretagne s’intègre mal dans les intérêts réels d’un pays comme la République tchèque qui se trouve au centre de l’Europe, avec une taille moyenne et avec une expérience historique qui nous amène plutôt à profiter de la chance qu’apporte l’intégration européenne. »« Il y a environ 20% de Tchèques qui ont voté contre l’adhésion à l’UE en 2004. L’euroscepticisme existe, comme ça existe en France, aux Pays-Bas ou un peu partout, mais en pourcentage de la population finalement je ne pense pas que l’euroscepticisme soit si dominant que ça en République tchèque, mais il est très visible et très audible. »
Est-ce que l’euroscepticisme disparaîtra quand Václav Klaus quittera la scène politique tchèque ?
« Son héritage va évidemment subsister mais va perdre de l’élan et je pense qu’à terme l’euroscepticisme va prendre en République tchèque des proportions semblables à des pays comparables. C’est aussi une affaire conjoncturelle. Nous sommes dans une conjoncture en République tchèque qui pousse l’euroscepticisme notamment à cause du débat sur le traité de Lisbonne. Mais je pense que nous allons revenir dans les dix prochaines années dans des proportions beaucoup plus raisonnables. J’espère aussi que l’image de la République tchèque en Europe sera plus en conformité avec ce qu’est réellement ce pays, ses intérêts et l’idée majoritaire dans sa population. »
Quand on vous interpelle, à Dijon, à Bruxelles ou ailleurs sur l’euroscepticisme tchèque, quelle est votre réponse en général ? Vous réfutez que la République tchèque soit le pays le plus eurosceptique de l’UE ?« Je réponds que c’est beaucoup plus compliqué que ça. J’aime dire aux Français que peut-être l’influence eurosceptique d’un certain M. Guaino sur le président de la République est beaucoup plus importante pour le sort de l’Europe que l’influence de Václav Klaus. Il ne faut pas oublier non plus que la République tchèque a donné des grands européens. Václav Havel était le premier à parler de la constitution européenne – devant le sénat français d’ailleurs – à l’époque où peu de gens y croyait. Une de mes ambitions est de montrer que dans la jeune génération aussi il y a des vrais pro-européens, des hommes politiques qui sont conscients des intérêts de leur pays mais qui sont aussi conscients des intérêts de l’UE et cherchent à les concilier et à faire avancer leur pays dans l’UE et l’UE dans son ensemble.