Première étoile Michelin pour un restaurant pragois
Pour la première fois, une étoile Michelin a été attribuée, mardi, à un restaurant en République tchèque. Mieux encore, le restaurant Allegro, dirigé par le chef italien Andrea Accordi et situé au cœur de la Vieille-ville, à deux pas du Pont Charles, est le premier établissement étoilé d’Europe centrale et orientale à figurer dans le Guide Michelin Main Cities of Europe, dont l’édition 2008 sera mise en vente ce jeudi. Un événement majeur dans l’évolution de la gastronomie en République tchèque dont nous nous sommes entretenus avec Jean-Luc Naret, directeur des Guides Michelin, ouvrages gastronomiques de référence un peu partout dans le monde. Nous avons d’abord demandé à Jean-Luc Naret ce qui avait motivé les commissaires Michelin à attribuer cette première étoile historique au restaurant pragois Allegro :
« Tout d’abord, ce sont nos inspecteurs qui ont visité plusieurs fois au cours de l’année ce restaurant. Nous avons déjà suivi ce chef, Andrea Accordi, puisqu’il était déjà étoilé à Florence et lorsque nous avons appris qu’il venait à Prague au Four Seasons, nous l’avons suivi avec beaucoup d’intérêt. Notre décision est donc basée sur les rapports de nos inspecteurs, qui ont fait plusieurs visites et ont déjeuné et dîné à plusieurs reprises dans ce restaurant. Quant à nos facteurs, qui sont le choix des ingrédients, la maîtrise des cuissons et des saveurs, et la régularité, ils nous ont permis de proposer et de confirmer cette étoile. Et effectivement, cette étoile à Prague est bien la première étoile dans les pays de l’ancien bloc soviétique. »
-L’annonce de l’attribution de cette médaille a fait beaucoup de bruit dans les médias tchèques. Cet intérêt vous surprend-il ?
« Je crois que dans tous les pays où nous avons une sélection, le Guide Michelin est toujours attendu avec intérêt. Cette année, nous avons effectivement dans le guide Main Cities of Europe une étoile à Prague qui fait beaucoup de bruit, et c’est tant mieux. Je suis convaincu qu’elle donnera l’envie à de jeunes chefs de suivre cette mission, cette immense reconnaissance de la gastronomie et de vouloir développer des restaurants qui puissent être reconnus ensuite mondialement. Je rappelle que lorsque vous avez une étoile, vous êtes non seulement un des meilleurs établissements de votre ville, mais vous faîtes également partie des 1 500 meilleures tables dans le monde. »-Quel regard portez-vous sur l’évolution de la gastronomie en République tchèque et dans les autres pays d’Europe centrale et orientale ces dernières années ?
« Ce que l’on voit véritablement, c’est que depuis quelque temps, l’accès à de nouveaux produits permet aux jeunes chefs de pouvoir faire une cuisine beaucoup plus appropriée. Je vous rappelle qu’il y a effectivement le talent du chef mais également l’accès aux produits qui est important. Fort heureusement, ces produits commencent à arriver dans cette partie du monde. Ensuite, cette région attire de plus en plus de chefs puisque, par exemple, le chef britannique Gordon Ramsay vient d’arriver à Prague où il a récemment ouvert un restaurant Maze qui est inscrit dans le guide mais qui n’est pas encore étoilé. Néanmoins, cela donne une idée qu’il se passe quelque chose dans cette région et pourrait donner envie à de nombreux gastronomes de découvrir petit à petit Prague, qui fait partie des 41 villes présentes dans le Guide Main Cities of Europe de cette année. Et puis cela pourrait donner envie à certains jeunes chefs de venir s’installer et de prouver que Prague est une ville qui mérite d’être connue et reconnue pour sa gastronomie dans les années prochaines. »-Alors cette première étoile a été attribuée à un restaurant qui propose essentiellement une cuisine italienne, qui fait partie d’un hôtel canadien, le Four Seasons, et dont le chef est italien. On ne peut donc pas parler d’une reconnaissance de la cuisine tchèque.
« Ce que l’on reconnaît aujourd’hui, c’est qu’il y a une étoile à Prague et le fait que l’on parle de Prague non seulement à Prague mais aussi dans le reste du monde. C’est donc important, quel que soit le type de cuisine. Par exemple, le guide de New York, où nous avons récompensé un grand nombre de restaurants, reprend aujourd’hui 42 types de cuisine différents. Peu importe donc que ce soit la cuisine italienne qui soit aujourd’hui mise à l’honneur et offre une première étoile à Prague. Je suis sûr qu’elle sera suivie par de nombreuses autres. Gordon Ramsay fera ainsi, par exemple, certainement une cuisine dans l’esprit de ce qu’il fait déjà à Londres. Et puis il y a beaucoup de jeunes chefs qui sont partis suivre une formation dans plusieurs pays d’Europe et qui reviendront dans leur pays d’origine, ouvriront des restaurants ensuite reconnus par le Guide Michelin. »