Turbulences dans l'aviation civile et militaire
Ces dernières semaines ont vu l'industrie aéronautique connaître quelques turbulences en République tchèque. Qu'il s'agisse du domaine civil ou militaire, l'aviation tchèque peine à se remettre d'une conjoncture morose. Pour le fabricant d'avions militaires Aero Vodochody, la solution devrait passer par la privatisation. La compagnie nationale CSA, quant à elle, est sur le point de vendre les restaurants qu'elle détient à l'aéroport de Prague.
La privatisation du fabricant tchèque d'avions Aero Vodochody est sur le point d'aboutir, après l'annonce, par le ministre du Commerce et de l'Industrie Martin Riman, de sa volonté de vendre la société aéronautique. A sa voix s'est jointe celle du ministre des Finances, qui affirmait que tout délai mettrait durement à l'épreuve une entreprise déjà affectée. Un acquéreur semble bien en vu : Penta, via sa filiale Oakfield, laquelle s'est montrée la plus offrante.
Bien sûr, tant que la situation politique reste incertaine et que le mandat du gouvernement actuel n'est pas officiel, la direction de Penta refuse de crier à la victoire. Son argument : l'Union Européenne verrait d'un mauvaise oeil l'arrêt de la privatisation presque finie d'Aero. Quant aux 1 000 employés de la compagnie, ils restent dans l'expectative.
Martin Riman a suggeré que la société acquéreuse d'Aéro assume également une plus grande partie des frais de location des pistes de décollage de l'aéroport de Prague Ruzyne. Tout en précisant que ce n'était pas là une condition indispensable à la vente. Malgré des réticences de la part de Penta, les négociations semblent sur la bonne voie.
La privatisation d'Aéro marque une nouvelle page dans l'histoire agitée de l'avionneur tchèque. Jusqu'en 2004, il était détenu à parts égales par le gouvernement tchèque et la compagnie américaine Boeing. Depuis la chute du communisme et du marché de l'ancien bloc de l'Est, Aero avait dû concurrencer les plus grands exportateurs d'armes pour s'ouvrir des marchés en Inde, au Kenya, en Amérique latine et au Moyen-Orient.
Son bilan était plutôt prestigieux : construction d'un avion de combat L-159 pour les forces aériennes tchèques, d'hélicoptères Sikorsky et production de pièces de rechanges pour Boeing. Magré cela, la stratégie commerciale ne permettait pas au fabricant de décoller et, en 2004, le gouvernement, actionnaire majoritaire, avait décidé de se séparer de son partenaire américain. La négociation n'avait pas été facile car Boeing, bien que minoritaire, gardait un contrôle sur le management.
En 2006, face à la mauvaise conjoncture, la seule consolation pour Aero, c'est qu'elle n'est pas seule face aux problèmes. Du côté de l'aviation civile, CSA est à nouveau dans le rouge.
La compagnie aérienne nationale sera sans doute amené à opérer des coûts dans ses frais, afin d'assainir une situation économique des plus moroses. Pour la première moitié de 2006, CSA a enregistré des pertes de 773 millions de couronnes (plus de 27 millions d'euros) tandis que les pertes cumulées atteignent 1,1 milliards de couronnes (39 millions d'euros).
La compagnie aérienne n'a pas confirmé les bruits de gel des salaires mais celui-ci reste bien à l'ordre du jour. C'est ce qu'a indiqué la CAAE, Union des Ingénieurs de l'Aéronautique tchèque, l'une des neuf entités qui couvrent CSA. Le 9 octobre dernier, celles-ci ont demandé à CSA de leur présenter une analyse financière de sa future stratégie. Une deuxième réunion s'est tenue le 16 octobre dernier.
Si la nouvelle se confirme, les 5 000 employés de CSA seront sans doute tentés de brandir les conventions collectives. Celles-ci prévoient une augmentation salariale allant de 4,2 % pour les employés au sol à 15,5 % pour les pilotes et valent jusqu'à la fin de l'année 2007. Selon le président de CSA, l'augmentation des salaires représenterait, chaque année, la somme de 500 millions de couronnes, soit environ 17,5 millions d'euros.
En attendant, les coupes bugétaires sont réalisées partout où cela est possible. Au début du mois, CSA a annoncé qu'elle mettrait en vente les restaurants qu'elle gère dans l'aéroport Ruzyne ainsi que les sites de chargement dans le terminal. Elle devrait en revanche conserver ses magasins duty-free et ses ventes à bord de l'avion. Les nouveaux propriétaires des restaurants ne seront pas connus avant février 2007.La direction de CSA affirme que sa priorité est, pour le moment, de conserver ses 50 appareils et ses 5 000 employés. D'autant que les ventes des sites de l'aéroport coûteront déjà leur emploi à 500 personnes. Si CSA n'a pas encore annoncé le prix auquel elle espère vendre ses deux entités, elle a confirmé que celles-ci étaient rentables. Des contacts avec des acheteurs potentiels semblent être en revanche déjà pris.
La société de restauration Airest de la compagnie nationale autrichienne, détenue par le groupe de restauration italien Save, a annoncé avoir entamé des pourparlers pour l'acquisition des restaurants CSA à l'aéroport de Prague. Pour Airest, il s'agit d'une stratégie d'expansion en Europe centrale et orientale. Déjà présente en Autriche, la compagnie possède des filiales en Slovaquie et en Slovénie et devrait s'étendre à la République tchèque, la Hongrie et l'Ukraine. Airlet souhaite-t-il concurrencer le premier fournisseur de restauration des aéroports et avions, LSG Sky Chefs, qui appartient à la Lufthansa ?