Il y a treize ans, Boris Yelcine était venu à Prague. Depuis, aucun président russe n'avait rendu visite à la Tchéquie. Il n'est donc pas étonnant que la visite de Vladimir Poutine à Prague suscite une grande attention de la part de la presse tchèque. En dehors du côté officiel, elle s'intéresse aussi à l'image de la Russie d'aujourd'hui, et présente les opinions de diverses personnalités.
Le Président russe Vladimir Poutine, photo: CTK
Le quotidien économique Hospodarske noviny considère la Russie actuelle comme un bon partenaire économique avec lequel la Tchéquie entretient des relations au niveau standard. Il fait remarquer que ce sont surtout les milieux financiers et industriels qui tournent leurs regards vers le géant de l'est, un géant à l'égard duquel on continue à ressentir une certaine crainte. Dans cette optique, la République tchèque ne diffère guère des autres petits pays européens. Une crainte qui s'est révélée comme justifiée avec la récente affaire des livraisons de gaz à l'Ukraine qui avait touché l'approvisionnement en gaz de certains pays européens. D'un autre côté, les investisseurs tchèques sont intéressés par le marché russe, comme l'usine automobile Skoda, par exemple, qui devrait commencer à fabriquer son modèle « Octavia » en Russie, vers la fin de cette année. A ne pas oublier non plus les quelque 200 000 touristes russes qui sont venus en Tchéquie en 2005. A la question de savoir si la Russie actuelle serait un danger pour la démocratie, Jiri Dienstbier, ancien ministre des Affaires étrangères, répond qu'elle ne peut mettre en danger que sa propre démocratie. Josef Zieleniec, ancien chef de la diplomatie aussi et député européen aujourd'hui, est du même avis en ajoutant que la Russie peut être un facteur important de la stabilité mondiale à condition qu'elle-même connaisse une stabilité basée sur la démocratie et l'économie de marché. Les commentaires de la presse tchèque reconnaissent, en général, que la Russie a fait un grand pas vers cette stabilité, cela grâce aussi au président Vladimir Poutine. De bonnes relations existent donc entre le géant russe et la Tchéquie, mais certaines ombres subsistent : la Russie voit d'un mauvais oeil le soutien tchèque aux changements démocratiques dans d'autres pays, l'Ukraine, la Biélorussie, la Moldavie.
La Tchétchénie reste un grave terrain de friction. Le quotidien Mlada fronta Dnes reproduit d'ailleurs un article de l'association des journaux du monde entier, Project Syndicate. Il est intitulé « Ne fermons pas les yeux sur les actes de la Russie » et est signé par des personnalités de renom dont l'ex-président tchèque Vaclav Havel, le philosophe français André Glücksmann, le prince de la Jordanie Hassan Ibn Talal, ou Desmond Tutu, Prix Nobel de la paix. Ces personnalités font remarquer que le monde n'a pas le droit de se taire face aux actes des forces armées russes en Tchétchénie. Sous le couvert de la lutte contre les terroristes, des civils sont tués tous les jours, la capitale Grozny a été rasée. Les signataires rappellent que la guerre en Tchétchénie dure depuis trois siècles et qu'il s'avère comme indispensable d'aider la Russie à sortir de ce piège. Pour cela, la question tchètchène doit faire partie du sommet G 8 qui aura lieu en juin prochain à Moscou, et elle ne peut être ignorée à aucun forum du monde démocratique.