Les Tchèques confrontés à la pénurie de vaccins contre la grippe
Seuls 5 à 7% des Tchèques répondent chaque année à l’appel des autorités sanitaires et se font vacciner contre la grippe saisonnière, alors que le taux moyen de vaccination en Europe est de 20%. Cette année, les médecins appellent encore davantage à la vaccination antigrippale dans le contexte de la crise sanitaire du Covid-19. Nombreux à répondre à cette alerte, les candidats à la vaccination se voient toutefois confrontés à une pénurie de vaccins, notamment dans les grandes villes.
Les Tchèques, d’ordinaire assez réticents à se faire vacciner contre la grippe saisonnière, responsable d’environ 1 500 décès par an ans le pays, ont changé d’avis en cette période de pandémie. Même ceux qui ne sont pas considérés comme des « personnes à risque » sont nombreux à vouloir se faire administrer le vaccin antigrippal.
C’est aussi le cas de Šárka, une Pragoise qui a décidé de se faire vacciner cette année pour la première fois de sa vie :
« Toute ma famille est dans mon cas. L’épidémie de coronavirus nous inquiète et nous a fait réfléchir un peu plus sur la prévention des maladies », a-t-elle confié à la Radio tchèque.
Pour pouvoir se faire vacciner, Šárka a été obligée de passer par le cabinet de son médecin traitant. Car en République tchèque, les généralistes sont les seuls qui peuvent administrer les vaccins contre la grippe. Le système de distribution est ici compliqué et peu flexible, ce qui serait dû, justement, au faible intérêt des Tchèques pour ce type de vaccination.
Les médecins tchèques doivent acheter, à leurs frais, avant chaque saison hivernale, une certaine quantité de vaccins, en fonction du nombre approximatif de patients qui voudront se le faire administrer. Rien que l’année dernière, environ 40 000 doses de vaccins inutilisées ont ainsi été détruites.
Cette année, la situation est tout autre : en été, les autorités ont annoncé qu’environ 900 000 doses allaient être fournies avant le début de la saison grippale, soit 15% de plus que l’année passée. Confrontés à une demande qui a presque doublé comparée aux chiffres habituels, les généralistes craignent la rupture de stock. Josef Štolfa, qui a son cabinet à Prague, a commandé 150 vaccins, soit à peu près le même nombre que les années précédentes. Or il a été sollicité par 300 patients :
« Je constate un énorme intérêt pour la vaccination contre la grippe chez les personnes jeunes et en bonne santé. Leur nombre a doublé comparé à l’année dernière. Les personnes à risque et atteintes de maladies chroniques que nous prenons en charge ont pour la plupart déjà été informées et vaccinées. »
Mais toutes les personnes susceptibles de développer des complications et, par conséquent, de menacer les capacités de traitement des cabinets et des hôpitaux, ne recevront probablement pas le vaccin cet automne. Le père de Tereza, âgé de 69 ans, a été refusé par son médecin généraliste dans le IXe arrondissement de Prague. Tereza raconte :
« Le médecin a informé mon père du fait qu’elle avait commandé suffisamment de doses, mais qu’elle n’en avait finalement reçu qu’un nombre très restreint. Alors elle a été obligée de faire le tri parmi les patients, c’est-à-dire de donner la priorité aux personnes les plus âgées et les plus malades. Mon père, même s’il s’était fait vacciner contre la grippe chaque année, a été refusé cette fois-ci. Le médecin lui a prescrit une ordonnance électronique en lui recommandant d’essayer de se procurer le vaccin lui-même. J’ai contacté une dizaine de pharmacies, ainsi que deux branches de l’Institut national de la santé et partout, c’était la même réaction : les stocks ont déjà été épuisés et il n’y aura pas de doses supplémentaires cette saison. »
Président de l’Association des médecins généralistes, Petr Šonka propose une solution :
« Dans le cadre de notre association, nous sommes en train de mettre en place un système de communication. Il permettrait aux médecins en pénurie de doses d’envoyer les patients chez leurs collègues qui en ont peut-être en trop. Ainsi, les gens pourront se faire vacciner aussi dans les cabinets où ils ne sont pas enregistrés. »
En République tchèque, le vaccin contre la grippe est gratuit pour les patients atteints de maladies chroniques et les personnes âgées de 65 ans et plus. Il est également pris en charge à 100% par l’assurance maladie pour les personnes séjournant dans un établissement de soins ou d’hébergement médico-social. Pour tous les autres assurés, le vaccin est payant. Son prix s’élève à environ 500 couronnes (près de 18 euros).