Mucha : l’image, le bruit et l’odeur dans une exposition immersive à Paris
L'exposition « Éternel Mucha » se tient au Grand Palais Immersif de Paris depuis le 22 mars et jusqu’au 5 novembre. Cette exposition immersive et interactive fait découvrir ou redécouvrir au public français l'œuvre et l'héritage d'Alfons Mucha (Alphonse Mucha en français), l'un des artistes les plus célèbres d'Europe à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, dont la vie a été partagée entre la Moravie, Prague et Paris.
Marcus Mucha, l’arrière-petit-fils du peintre, est aujourd’hui le directeur exécutif de la Fondation Mucha :
« Avant de travailler pour la Fondation Mucha j’ai eu un peu de succès en tant que producteur à Hollywood. Il y a environ dix ans, mon père m’a annoncé qu’il voulait prendre sa retraite et m’a proposé de continuer ce qu’il avait entrepris avec la Fondation Mucha à Prague. Décision difficile – le magazine Variety venait juste de me classer parmi les meilleurs jeunes producteurs – mais j’ai pris la décision en dix minutes. C’est quelque chose dans mon cœur, dans mon sang, très important pour moi de travailler avec l’héritage de mon arrière-grand-père. Alors je suis rentré à Prague avec ma famille. Nous sommes une famille tchèque. Pendant la deuxième partie du XXe siècle, nous avons dû vivre en exil mais nous sommes aujourd’hui dans notre pays. »
Organiser une exposition Alfons Mucha à Paris ce n’est pas anodin au regard de la relation entre la ville et votre arrière-grand-père. D’où est venue cette initiative et pourquoi ici au Grand Palais immersif dans l’enceinte de l’Opéra Bastille ?
« C’est toujours très particulier à Paris, parce qu’il y a des choses d’Alfons partout dans la scénographie de la ville. Notre expo au Palais du Luxembourg en 2018 a engendré des conversations avec le département numérique la RMN-Grand Palais, qui avait organisé cette très belle exposition. Ils ont la même ligne éditoriale que nous : faire quelque chose de spectaculaire mais avec la rigueur académique – c’est ce que nous voulons faire avec l’héritage de mon arrière-grand-père. Nous avons commencé à travailler là-dessus en 2018, cela a pris du retard avec la pandémie, mais maintenant nous sommes très heureux de pouvoir proposer cette expo à Paris. »
« Les films pour cette exposition immersive sont dans un esprit en trois actes, donc les montrer dans un lieu qui appartient à l’Opéra de Paris est extraordinaire pour nous. »
Etait-ce important pour vous d’avoir non seulement l’image mais aussi le son et l’odeur ?
« Oui, pour nous immersif cela doit impliquer tous les sens. Vous pouvez écouter la très belle musique de l’Orchestre national de Radio France spécialement jouée pour cette exposition. Vous pouvez voir dans les films l’évocation de l’esprit d’Alfons Mucha en plus d’archives visuelles et sonores. »
« Il y a aussi la participation d’une des meilleures parfumeuses du monde, Marie-Caroline Symard, qui a créé pour nous quatre parfums qui évoquent notamment son atelier, sa Moravie natale et un des parfums de Sarah Bernhardt, créé à l’origine par Guerlain. »
Cette exposition immersive doit-elle être installée ailleurs dans le monde ?
« Nous voulons que les gens partout dans le monde puissent en apprendre plus sur Mucha. L’avantage de cette expo est qu’elle permet de montrer les œuvres qui sont trop fragiles pour voyager, comme le pavillon de la Bosnie-Herzégovine de l’Exposition universelle de 1900 ou les toiles de l’Epopée slave. Nous espérons qu’avec les possibilités numériques que nous avons maintenant nous pourrons montrer cela dans d’autres villes du monde. »
Cette Epopée slave est un véritable feuilleton depuis plusieurs années à Prague. On aura j’espère l’occasion d’en reparler mais que pensez-vous de la potentielle installation de cette œuvre gigantesque dans le Palais Savarin du centre de Prague ?
« Nous sommes très heureux de cette idée de l’exposer là-bas. La famille Mucha est 100% d’accord avec ce projet. Normalement dans les musées du monde où nous choisissons les œuvres en fonction des murs, mais pour ce Palais Savarin nous avons l’opportunité de travailler avec l’un des meilleurs architectes du monde, Thomas Heatherwick – architecte du Hudson yard à New York ou du siège de Google en Californie – qui va concevoir le projet en fonction des vingt toiles de l’Epopée slave, pour une sorte de cathédrale de ce chef d’œuvre de Mucha. Faire cela en coopération avec lui et la ville de Prague va je crois permettre d’avoir quelque chose d’équivalent au Musée Van Gogh pour Amsterdam. Prague sera sur la carte du monde de l’art d’une manière nouvelle, pour les touristes mais aussi pour les locaux. Ce devrait être prêt en 2026 ou 2027, ça dépendra des travaux de construction. »
Le plus grand collectionneur des œuvres de Mucha est l’ancien tennisman Ivan Lendl. Quelle est la relation entre lui et votre fondation ?
« Je ne l’ai pas encore rencontré. Il a une collection de 150 œuvres et je suis fier qu’un tennisman aussi célèbre collectionne ces œuvres. Nous voyons maintenant des joueurs plus jeunes qui sont intéressés par Mucha, notamment Barbora Krejčíková, qui a passé son enfance dans la ville natale d’Alfons en Moravie, à Ivančice. Et puis il y a une autre très bonne joueuse qui porte notre nom, Karolína Muchová ! »