La Russie « sur une trajectoire de conflit avec l’Alliance », selon le patron des armées tchèques
La menace russe est au cœur de nombreuses préoccupations en République tchèque ces derniers jours. Tandis que selon le chef d’État-major de l’Armée tchèque, une guerre entre la Russie et l’OTAN est un scénario tout à fait « possible », le chef du service de contre-espionnage a, lui, prévenu que la Russie mettrait tous les moyens en œuvre pour empêcher l’approbation par le Parlement de l’accord tchéco-américain de coopération en matière de sécurité signé à Washington la semaine dernière.
En République tchèque, les violons ne sont peut-être pas toujours parfaitement accordés. Preuve en est, tandis que le ministre des Affaires étrangères, Jan Lipavský, qui participait lundi à Bratislava à la conférence internationale sur la sécurité GLOBSEC, a appelé l’Union européenne à se préparer à une longue guerre froide avec la Russie en raison de sa vision impérialiste du monde, c’est bien l’éventualité d’une guerre chaude, et du « pire scénario pour nous », que le chef de l’État-major de l’Armée tchèque avait, lui, évoquée un peu plus tôt dans la journée.
Invité à s’exprimer devant les députés, le général Karel Řehka a ainsi déclaré qu’une guerre entre la Russie et l’OTAN n’était « pas impossible, elle est possible ». Un scénario auquel la République tchèque, qui s’apprête à effectuer d’importants investissements dans ses armées et son matériel de défense, doit donc se tenir prête, car « si un conflit de haute intensité avec un adversaire technologiquement avancé devait éclater, la République tchèque y participerait dès les premiers instants », a-t-il encore averti tout en souligant que la Russie était « aujourd’hui sur une trajectoire de conflit avec l’Alliance ».
Au-delà de la diversité de ces déclarations et du caractère plus ou moins chaud ou froid que pourrait donc prendre ce conflit, il est néanmoins un point sur lequel tout le monde s’accorde à Prague parmi les autorités : la Russie reste plus que jamais considérée comme une menace sérieuse non seulement pour la sécurité de la République tchèque mais aussi, plus généralement, pour celle de l’ensemble du continent, comme l’a confirmé le chef de la diplomatie :
« La Russie représentera un danger pendant encore de longues années, et ce même si le conflit en Ukraine ne devait plus traverser de phase de combats intenses. »
Expliquant que « cette guerre ne se résume pas à Poutine » et qu’elle relève davantage « de l’impéralisme russe », Jan Lipavský s’est aussi inspiré d’une pensée de l’ancien président tchèque Václav Havel en affirmant que « la Russie ne sait pas où se trouvent ses frontières ». « Nous devons être prêts à contrer l’influence de la Russie et, surtout, nous devons protéger l’Europe de l'impérialisme russe », a-t-il encore insisté.
Une lutte qui ne s’arrête d’ailleurs pas aux frontières de la Russie ou de l’Ukraine, selon le chef du BIS, le service de contre-espionnage. S’exprimant lui aussi devant les députés lundi, soit six jours après la signature à Washington de l’Accord de coopération en matière de sécurité entre les États-Unis et la République tchèque, Michal Koudelka a mis en garde les parlementaires.
Alors que le document en question, qui définit notamment les conditions auxquelles des soldats américains pourront séjourner sur le territoire tchèque en cas de besoin, doit encore être approuvé par la Chambre des députés et le Sénat, Michal Koudelka a prévenu l’assistance que « les activités des services de renseignement russes [étaient] encore plus dangereuses que celles des services chinois ».
« On peut supposer que les Russes utiliseront tous les moyens dont ils disposent, y compris la désinformation dure, même de nature personnelle et intime, la cinquième colonne dans notre pays et ainsi de suite, pour empêcher l’approbation de ce traité », a encore déclaré Michal Koudelka.