Législatives, Donald Trump, Ukraine : un Petr Pavel raisonnablement optimiste

Petr Pavel

Petr Pavel était l’invité de la Radio tchèque, vendredi 10 janvier. Des prochaines élections législatives à la possible évolution de la guerre en Ukraine, en passant par le retour aux affaires de Donald Trump aux États-Unis, le président tchèque s’est exprimé, sur un ton généralement optimiste, sur de nombreux sujets d’actualité.

Ce n’est pas encore officiel, mais on connait désormais, avec quasi-certitude, les dates des élections législatives qui se tiendront à l’automne prochain : il s’agira très probablement des vendredi 26 et samedi 27 septembre, et non pas du premier week-end d’octobre en raison de la proximité avec les vacances scolaires qui, selon le président, pourrait nuire à la participation au scrutin.

D’ici-là, Petr Pavel, qui souhaite qu’une coalition gouvernementale majoritaire lui soit ensuite présentée en fonction des résultats des urnes, entend contribuer à faire en sorte que la campagne électorale, malgré une tension croissante entre le gouvernement et les partis de l’opposition, et plus encore entre le Premier ministre Petra Fiala et son prédécesseur Andrej Babiš, soit « menée de manière décente et la plus factuelle possible », et ce, notamment en soulevant « des questions [qu’il] considère comme importantes pour le pays et les électeurs ».

Petr Pavel était l’invité de la Radio tchèque | Photo: Khalil Baalbaki,  ČRo

Dans son discours du Jour de l’An, où il avait notamment déclaré que « l’état de la République tchèque est loin d’être aussi mauvais que nous le pensons parfois sur la base de sentiments négatifs délibérément répandus », le chef de l’État avait regretté que « le discours des responsables politiques se réduise de plus en plus à des slogans marketing ».

Surtout, conscient de la précarité économique et sociale dans laquelle vivent encore un grand nombre de Tchèques, il avait promis de continuer à veiller à ce que « la voix de tous ceux qui n’ont pas de bonnes conditions de vie, qui n’ont pas autant de possibilités de trouver un bon logement, un bon emploi, un médecin ou une école, soit entendue ». Et vendredi, sur les ondes de la Radio tchèque, Petr Pavel a rappelé sa volonté d’être au plus près des préoccupations des Tchèques :

Petr Pavel avec le ministre de la Santé,  Vlastimil Válek | Photo: Zuzana Bönisch,  Château de Prague

« Je continuerai à me rendre dans les régions comme je l’ai fait jusqu’à présent. Le programme et les sujets abordés sont toujours très divers, de sorte que cela me permet d'abord d’être confronté aux problèmes qui concernent vraiment tous les aspects importants de la vie et tous les domaines d’activité, et ensuite, lorsque je rencontre les ministres, de leur faire part de ce que j’ai vu et entendu [lors de ces déplacements]. Hier encore, par exemple, j’ai organisé une table ronde avec le ministre de la Santé et différents experts pour débattre des soins primaires. »

« Gardons notre calme », après les déclarations de Donald Trump

En matière de politique étrangère, la première question a porté sur le prochain retour aux affaires de Donald Trump aux États-Unis et ses déclarations faites la semaine dernière, dans lesquelles il a menacé d’annexer tout à la fois le Groenland, le canal de Panama et de faire du Canada le « 51e État américain ». Autant de velléités expansionnistes auxquelles Petr Pavel, en attendant l’investiture de Donald Trump le 20 janvier, a réagi en faisant preuve d’une grande réserve :

Donald Trump | Photo: Doug Mills,  New York Times/Profimedia

« Ma première réaction serait probablement de dire ‘gardons notre calme’. Déjà avant son premier mandat, Donald Trump avait procédé à des ‘tirs d’essai’ similaires pour voir les réactions que ses déclarations suscitaient, puis ajuster la formulation de ses politiques officielles en fonction de ces réactions. […] Je pense qu’il ne faut pas les balayer d’un revers de la main, parce que ce sont là les déclarations d’un président élu. Mais attendons son investiture. Attendons de voir à quoi ressemble son administration et comment les politiques concrètes de cette nouvelle administration seront formulées. Ce n’est qu'à ce moment-là que nous pourrons discuter sérieusement de la manière de réagir à de telles déclarations. »

En sa qualité de général d’armée et d’ancien président du comité militaire de l’OTAN, Petr Pavel a également estimé qu'il ne fallait pas prendre à la lettre la volonté déclarée de Donald Trump de voir les pays membres de l’OTAN augmenter leur budget de défense à 5 % du produit intérieur brut :

Summit de l’OTAN | Photo: NATO

« Tout d’abord, il convient de dire que les dépenses de défense ne sont pas régies par les souhaits des dirigeants de l’Alliance, qu’il s'agisse du président de la République tchèque ou du président des États-Unis. Les dépenses de défense sont déterminées par les besoins, qui reposent sur une évaluation précise des menaces pour la sécurité. Si tous les États membres identifient ensemble les risques, nous déterminerons alors les ressources dont nous avons besoin en fonction de ces risques. Nous les chiffrons ensuite en coûts, qui sont répartis entre les États membres. »

Et s’il a admis que la Tchéquie, « à l’horizon 2030 », pourrait être amenée à consacrer jusqu’à 3 % de son PIB aux dépenses militaires, son président n'en considère pas moins qu’il ne s’agit là que d’un chiffre abstrait :

« Nous sommes constamment englués dans des débats qui ne portent que sur des pourcentages. Je pense que c’est totalement trompeur, car cela ne dit rien à personne. J’ai toujours insisté, même lorsque je travaillais encore au sein de l’Alliance, sur le fait que nous devions parler du contenu qui se cache derrière les chiffres. Autrement dit, de combien de troupes et de quel niveau de préparation, de combien d’avions, de combien de navires, de combien de systèmes antiaériens nous avons besoin pour nous défendre efficacement contre les menaces que nous avons identifiées. »

Petr Pavel était l’invité de la Radio tchèque | Photo: Khalil Baalbaki,  ČRo

« Ne pas négocier la paix pour l’Ukraine sans l’Ukraine »

Enfin, s’il ne s’est exprimé qu’à mots couverts au sujet de la Slovaquie ou de la Hongrie, en raison des visites de Robert Fico et de Viktor Orban à Moscou, Petr Pavel s’est voulu raisonnablement optimiste quant à l’évolution de la guerre en Ukraine.

« J’aimerais beaucoup que l’on déclare que la guerre en Ukraine est terminée et que la période de reconstruction de l’Ukraine commence », a-t-il ainsi affirmé au sujet du prochain sommet de l’OTAN, auquel il participera en juin prochain aux Pays-Bas. Et s’il a précisé être conscient qu’une telle déclaration ne se produirait « très probablement pas », le président tchèque continue toutefois de penser que parvenir, sinon à une paix, au moins à un cessez-le-feu est possible dès cette année :

Refuge dans le métro de Kyiv,  Ukraine | Photo: Efrem Lukatsky,  ČTK/AP

« Je ne veux pas être trop optimiste, mais le fait est que les deux parties belligérantes, y compris celles qui les soutiennent, sont fatiguées de la guerre. Elle ne profite à personne, pas même à ceux qui se trouvent en arrière-plan. Eux aussi estiment que la guerre entraîne de nombreux effets négatifs sur les plans économique, social et autre. »

« Par ailleurs, l’investiture du nouveau président américain est un symbole qui peut constituer un tournant psychologique aussi chez Vladimir Poutine. Éventuellement aussi pour d’autres acteurs, comme la Chine, qui doit absolument faire partie de la solution. Il y a là une opportunité à saisir. Je suis convaincu que des efforts seront entrepris pour la saisir, pour amener les deux parties à la table des négociations et pour convenir, premièrement, d’un cessez-le-feu et, deuxièmement, d’une paix durable qui soit aussi équitable que possible pour la victime de cette agression. Et il s’agit de l’Ukraine. »

Une Ukraine qu’il conviendra de convier à participer « à toutes les négociations », « négocier la paix pour l’Ukraine sans l’Ukraine [n’ayant] aucun sens », toujours selon le président Pavel.

Auteur: Guillaume Narguet | Source: iROZHLAS.cz
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