Olomouc, « la ville où Mozart a souffert de la petite vérole »
Visite guidée aujourd’hui d’un des plus beaux endroits de la ville morave d’Olomouc, Bezručovy sady, en compagnie de la musicienne Bohdana Horecká. Installée en France depuis plus d’une douzaine d’années, la violoncelliste a grandi et fait ses gammes dans cette cité historique de la région Haná.
« Je suis né à Karlovy Vary mais ai déménagé à l’âge de 4 ans avec ma famille vers Olomouc, où j’ai vécu jusqu’à 18 ans et où j’ai commencé mes études de musique. »
Où sommes-nous ?
« Nous sommes sur un escalier qui mène au deuxième parc de la ville par sa taille, un parc qui fait le tour des fortifications. L’autre parc, de l’autre côté du centre-ville historique est connu pour l’exposition internationale Flora qui s’y déroule depuis très longtemps. »
Cela a-t-il beaucoup changé ici depuis votre enfance ?
« Beaucoup, beaucoup. Avant c’était beaucoup plus sauvage et le parc était moins entretenu. »
Si on se retourne, d’en bas du parc on voit derrière nous les remparts au-dessus…
« Oui, les remparts ont été rénovés et on voit que la ville investit beaucoup, surtout dans ce parc-là, qui n’était pas une priorité avant et qui a un peu été laissé à l’abandon sous le communisme. »
Ça devait être bien pour les adolescents comme vous, qui pouvaient venir se cacher ici…
« Exactement, on venait grimper sur les remparts… Maintenant ce n’est plus possible, tout est rénové et joli. On voit de moins en moins souvent des façades qui n’ont pas été rénovées derrière les remparts. »
C’est donc ici à Olomouc que vous avez commencé la musique classique…
« Oui, ma mère était mélomane et malgré sa taille relativement réduite Olomouc a deux orchestres. Je suis allée assister aux concerts et j’étais fascinée. Ma mère m’a inscrite dans une école primaire avec horaires aménagés. »
Nous passons un cours d’eau et entrons dans le jardin botanique, dont l’entrée est gratuite…
« Très beau… Cela a aussi beaucoup changé depuis mon enfance, avec de nouveaux espaces, des belles fleurs… »
D’Olomouc, vous êtes ensuite partie étudier à l’Académie de musique de Prague HAMU…
« Oui, et ensuite j’ai décidé de poursuivre mes études en Allemagne, à Nuremberg, où j’ai commencé à jouer dans un orchestre international dirigé par Justus Franz, avec lequel je faisais des tournées dans le monde entier et où j’ai rencontré mon futur mari français, clarinettiste, ce qui explique mon installation en France. »
Parvenez-vous à vivre de votre musique en France ?
« Ce n’est pas facile… Je suis intermittente du spectacle, un statut controversé et toujours remis en question mais qui heureusement survit encore. C’est sûr que la pandémie a secoué tout le milieu artistique mais j’ai des projets pour l’année prochaine à partir de novembre. On espère que la deuxième vague ne va pas faire annuler tout ça, on attend et on croise les doigts ! »
Avec quels orchestres jouez-vous ?
« J’ai passé quelques concours mais hélas je n’ai jamais obtenu de place fixe, c’est compliqué. Il y a beaucoup de musiciens en France et le métier est considéré comme plus prestigieux qu’en République tchèque… »
Peut-être parce que chaque Tchèque est un musicien, comme dit le proverbe tchèque, Co Čech, to muzikant…
« Peut-être oui, il y a tellement de musiciens naturels qui ne vivent pas de leur musique ici. Ici le musicien est vraiment la dernière roue de la culture… »
« Pour les opéras tchèques, les chanteurs me sollicitent pour la prononciation »
Est-ce qu’Olomouc vous manque ? Même si vous vivez à Meudon où il y a de beaux espaces verts aussi, ce n’est pas pareil…
« Olomouc me manque beaucoup ! »
Aux Français qui vous demandent d’où vous venez, vous leur expliquez comment ?
« Il n’y a quasiment personne qui connaît Olomouc, donc je dis que c’est à côté de Brno et si j’ai de la chance la personne va connaître. En tout cas les musiciens connaissent souvent Brno, grâce notamment à Janáček. D’ailleurs les Français adorent la musique tchèque. C’est assez touchant pour moi, parce que les chanteurs me sollicitent pour la prononciation dans les opéras tchèques, pour la diction. »
Avez-vous un compositeur tchèque favori ?
« Janáček bien sûr et pour le violoncelle spécialement c’est Martinů. »
Y a-t-il une diaspora d’Olomouc en France ?
« Je suis tombée par hasard l’année dernière sur une expo… J’enseigne dans une petite ville à côté de Paris, Antony… »
… jumelée avec Olomouc !
« Oui et ils ont organisé une exposition avec des artistes d’Olomouc. C’était très étonnant d’être invité à cet événement ! »
On est en train de remonter des escaliers qui nous ramènent vers le centre-ville. Avez-vous un personnage célèbre lié à la ville d’Olomouc qui a votre préférence ?
« C’est Mozart bien sûr. Il a passé deux semaines ici je crois environ. Mais il est tombé gravement malade à Olomouc. Il était très jeune et faisait déjà des concerts mais a souffert de la variole (appelée aussi petite vérole) qu’il avait attrapée plus tôt dans son voyage. »
NB : c’est à Olomouc que Mozart, bien que convalescent, complètera à 11 ans sa Symphonie n°6 en fa majeur.