Ostrava, là où une partie du fer de la tour Eiffel a été produite
C’est une ville que l’on aime, ou que l’on n’aime pas. Une ville comme aucune autre en Tchéquie, qui ne laisse personne indifférent. Une ville où le baroque, le gothique ou la Renaissance, autant de styles qui font le charme des lieux ailleurs, n’ont pas leur place. Mais aussi une ville dont le surnom, « Ostrava la noire », appartient désormais définitivement au passé et qui a su tirer profit de son riche héritage industriel pour se transformer.
François : « Les gens y sont sympas et la ville est active. C’est sûr que ce n’est pas la plus belle de Tchéquie. Pour cela, il suffit de faire 100 kilomètres pour aller à Olomouc. Il y a aussi Cracovie côté polonais. Mais il y a un état d’esprit et une âme à Ostrava. Que les gens trouvent ou ne trouvent pas, d’ailleurs, mais c’est un autre problème. La question avec Ostrava est de toute façon toujours la même : vous aimez ou n’aimez pas. Vous vous y sentez bien ou ne vous y sentez pas bien. C’est tout ! »
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Ils s’appellent François, David et Emmanuel, sont français ou belge et ont pour point commun de vivre depuis plusieurs années ou d’avoir vécu pendant longtemps à Ostrava. Ostrava, une ville que tous les trois ont appris à aimer et où ils se sentient bien...
David : « C’est une ville industrielle, mais qui dispose d’un énorme potentiel. Au fur et à mesure, beaucoup d’efforts sont faits pour moderniser le centre-ville avec des magasins, des restaurants, ou pour renforcer la culture et les activités sportives. En outre, les montagnes sont juste à côté, ce qui me permet, lorsque je veux me ressourcer, de partir deux ou trois jours dans ma maison de campagne. »
Emmanuel : « La ville a énormément évolué ces quinze à vingt dernières années. On est passé d’une ville un peu morte à une ville très vivante. La place centrale vit tous les jours, y compris le dimanche. Il y a toujours quelque chose qui s’y passe. Personnellement, ce que j’aime le plus, ce sont les parties historiques industrielles d’Ostrava. L’industrie métallurgique et minière ne fonctionne plus beaucoup aujourd’hui, mais les bâtiments ne sont pas restés abandonnées. On en a fait des zones de vie. C’est une architecture que j’appelle ‘noire et orange’ en raison de la rouille. Elle prend donc de la couleur et elle est utilisée. »
L’histoire industrielle d’Ostrava sert aussi à des fins touristiques. Depuis quelques années déjà, l’ancien complexe minier et sidérurgique de Dolní Vítkovice, dont les hauts fourneaux, avec le massif des Beskides en toile de fond, dominent toujours le panorama d’Ostrava, est devenu, après le funiculaire de la colline de Petřín, le zoo et le château de Prague, un des sites les plus visités de Tchéquie, comme nous l’avait expliqué, un beau jour d’été, il y a quelques années, Dominik Plíhal, jeune guide francophile :
« Nous avons effectivement devant nos yeux le site sidérurgique d’Arcelor Mittal, où on produit encore de l’acier, avec derrière le relief des Beskides de Moravie-Silésie. Il est très facile de se rendre à la montagne depuis Ostrava. »
Dominik précise pourquoi ce site pots-industriel de Dolní Vítkovice, avant sa transformation en un immense complexe culturel et touristique, est longtemps resté un endroit unique au monde :
« Ce qui fait sa particularité, c’est le système de production de l’acier, que l’on peut qualifier ‘d’enchaîné’. Cela signifie qu’il y avait une mine de laquelle était extraite la houille pour être transformé en coke. Puis cette coke était utilisée pour produire de la fonte brute, toujours ici dans les hauts fourneaux. »
Ce que le quartier du château de Prague est à la capitale du pays, Dolní Vítkovice est à Ostrava, chef-lieu de la région de Moravie-Silésie. Un lieu presque surréaliste qui a donc servi à la production d’acier jusqu’à la fin du XXe siècle.
« Cela fait maintenant une vingtaine d’années que l’on ne produit plus d’acier ici. Mais avant cela, il a été en activité pendant 170 ans. C’est d’ailleurs ici qu’une partie du fer de la Tour Eiffel a été produit… En fait, lors des excursions, je propose aux visiteurs un jeu dans lequel ils doivent reconnaître quelques monuments célèbres qui ont été construits avec l’acier de Vítkovice. Et souvent on me demande si cela vaut aussi pour la Tour Eiffel. Et c’est vrai pour une petite partie… Mais ce n’est pas le seul monument. En République tchèque, on peut citer la tour de Ještěd au-dessus de Liberec ou celle de Žižkov à Prague. »
Et si le nom Dolní Vítkovice résonne, aux oreilles de nombreux amateurs de musique, d’abord parce qu’il est le théâtre de son grand festival estival Colours of Ostrava, Dominik souligne que le site est bien que plus cela :
« Il y a beaucoup plus que cela. Cela devient un quartier à part entière de la ville avec sa propre vie. Une partie est dédiée à l’art avec des ateliers ouverts non seulement aux artistes professionnels mais aussi au grand public, une salle de cinéma, etc. La partie dans laquelle nous nous trouvons est, elle, davantage dédiée à l’éducation et à la culture en général. L’ancien gazomètre a été transformé en une grande salle multiculturelle. Il y a aussi deux musées consacrés au monde de la technique où sont expliquées différentes choses en relation avec la chimie, la biologie ou la révolution industrielle qui a marqué la vie de nous tous. »
Bref, comme l’est David, il y a tout pour être heureux à Ostrava :
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« Je suis relativement positif par rapport à Ostrava, parce que j’ai toujours dit que le jour où je deviendrai négatif et y serai mal à l’aise, je ferai quelque chose d’autre. En attendant, c’est vraiment un bonheur d’être ici. J’insiste beaucoup sur le bonheur d’avoir les montagnes à une heure d’ici. Les grands-parents de ma copine ont une maison de campagne, donc il suffit de prendre la voiture pour aller y passer un petit week-end. Autrement dit, maintenant je suis comme un poisson dans l’eau de l’Ostravice (la rivière qui traverse Ostrava). C’est génial ! »
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