Pour l’association tchèque Caritas, une aide compliquée en Turquie et en Syrie en raison du contexte politique
Après le retour de l’équipe de secouristes, la Tchéquie continue d’aider la Turquie et Syrie suite aux tremblements de terre meurtriers. L’association humanitaire Caritas coopère avec trois partenaires dans les régions affectées.
Tandis qu’une de ces organisations opère dans la province d’Hatay en Turquie, les deux autres apportent leur aide dans les villes d’Alep et d’Idlib en Syrie. Ces trois régions figurent parmi celles qui ont été les plus touchées par les séismes.
Chez Caritas, Lucie Jašová travaille au département de l’aide humanitaire et de la coopération au développement internationales. Plus de deux semaines après la catastrophe, elle explique que les associations ont d’abord veillé à répondre aux besoins essentiels d’ordre alimentaire, sanitaire ou vestimentaire dans des zones où il fait actuellement particulièrement froid :
« Le tremblement de terre a frappé les deux pays en plein milieu de la nuit. Dans la panique, les habitants se sont donc enfuis de chez eux en portant ce qu’ils avaient sur eux pendant qu’ils dormaient, et c’est pourquoi ils avaient d’abord besoin de vêtements chauds et de couvertures. Aujourd’hui, nous pouvons dire que ces besoins de base ont été satisfaits et les partenaires de Caritas - République tchèque comme les autres ONG qui opèrent dans la région concentrent désormais leurs efforts sur la construction de douches, de latrines, mais aussi de réserves d’eau potable. Il s’agit non seulement de permettre aux gens qui se trouvent dans les refuges de vivre dans des conditions plus dignes, mais aussi d’empêcher la diffusion des maladies, car les risques d’épidémies sont très élevés dans des installations comme celles-ci. »
Le 14 février, l’Organisation mondiale de la santé a qualifié le séisme de « pire désastre naturel du siècle » à avoir frappé un pays européen. Les experts estiment que trois annéess seront nécessaires pour reconstruire les infrastructures. Rasés en quelques heures, des quartiers entiers ont été détruits.
En Turquie, une aide au relogement uniquement pour les Turcs
Dans l’attente d’une reconstruction de leurs logements, les rescapés doivent trouver un hébergement en urgence. Si certains ont trouvé une solution provisoire grâce par exemple à l’accueil chez un membre de leurs familles, les autorités turques s’efforcent d’aménager certains lieux comme des centres commerciaux ou des écoles. Lucie Jašová évoque une autre possibilité en Turquie :
« Une aide au relogement a été mise en place par le gouvernement, qui dépend du niveau de destruction de l’habitation. Une assistance financière peut être demandée ou il est possible d’être accueilli dans des logements temporaires tels que des caravanes ou des auberges. Mais cette aide ne concerne que les Turcs et les deux millions de réfugiés syriens qui vivent en Turquie n’y ont pas droit. Ils sont donc laissés pour compte et pris en charge par les ONG. »
Dans un contexte de montée des tensions entre Turcs et Syriens, la situation est, donc, particulièrement précaire et incertaine pour ces réfugiés. En début d’année, alors qu’élections présidentielle et législatives sont prévues en mai, le président turc, Recep Erdogan, avait annoncé vouloir renvoyer chez eux un million de migrants syriens et se réconcilier avec le régime de Damas. Lucie Jašová explique l’état d’esprit des rescapés :
« Notre collègue, qui est sur le terrain depuis le 20 février, nous dit que les gens paniquent. Je pense donc que la frustration se manifestera un peu plus tard, même si je suis certaine que certaines personnes sont déjà en colère comme, à juste titre, la communauté de réfugiés syriens en Turquie. »
En Syrie, « un contexte différent de celui de la Turquie »
En Turquie, de nombreuses voix s’élèvent pour critiquer le gouvernement et le président Erdogan. S’il leur est principalement reproché un déploiement des secours trop tardif, la construction de bâtiments de médiocre qualité est également dénoncée. Mais côté syrien, la situation est encore plus complexe :
« En Syrie, il n’y a pas d’aide au relogement. C’est impossible en raison de la situation politique. Les gens s’installent donc dans des tentes pour continuer à vivre à proximité de leurs anciennes habitations. Le contexte est très différent de celui de la Turquie et les ONG comme les agences de l’ONU sont confrontés à de multiples obstacles pour y acheminer l’aide. »
La Syrie est toujours une zone de guerre et les séismes dévastateurs se sont produits dans des régions contrôlées par différentes forces politiques. Une délégation de l’ONU n’a ainsi pu accéder aux zones rebelles du nord-ouest de la Syrie qu’une semaine après le premier tremblement de terre. La lenteur de l’arrivée sur place de l’aide internationale a d’ailleurs été critiquée par les secouristes.
L’association Caritas a organisé une levée de fonds en République tchèque pour soutenir l’action de ses partenaires dans les zones sinistrées. Jusqu’à présent, 14,5 millions couronnes ont été récoltés (environ 600 000 euros). Un montant encore provisoire mais qui, d’ores et déjà, réjouit Lucie Jašová :
« Je tiens à remercier tous les donateurs ! Nous avons vraiment besoin de leurs dons et le fait de disposer de moyens conséquents est vraiment très apprécié par tous ceux qui œuvrent sur le terrain. Cela fait une réelle différence pour, dans la mesure du possible, essayer d’améliorer la situation. »