« Prague, une ville verte, accueillante et sûre »

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Nouvel épisode de notre série consacrée aux ressortissants étrangers installés en Tchéquie. Aujourd’hui, rencontre avec Catherine Lhoste qui, contrairement à beaucoup d’expatriés, n’est pas arrivée dans le pays catapultée par une grande entreprise internationale, mais qui a choisi, avec son mari, de tout plaquer en France pour s’installer à Prague, par amour pour la capitale tchèque.

Catherine Lhoste,  photo: Archives de Catherine Lhoste

Catherine Lhoste, vous êtes française et installée depuis quelques années ici à Prague, en République tchèque. Nous vous avons invitée dans nos studios pour parler de votre expérience praguoise, dans le cadre de notre série consacrée aux ressortissants étrangers installés en Tchéquie. C’est l’occasion de parler de vos impressions, de vos bonnes et mauvaises expériences. Mais avant de commencer, si vous deviez qualifier en quelques mots la ville de Prague, qui est devenue votre deuxième demeure, quels seraient les trois mots qui la caractériseraient ?

« Pour moi, Prague est une ville verte, accueillante et sûre. Ce sont les trois mots qui me viennent à l’esprit. Après avoir vécu à Paris une vingtaine d’années, c’est vraiment ce qui me marque le plus. »

C’est un contraste avec Paris alors ?

« Oui, tout à fait. »

Après avoir passé une vingtaine d’années à Paris, cette envie de changer d’air a-t-elle été soudaine ?

« Ce n’était pas si soudain, car je suis venue à Prague en 1994 pendant un voyage d’étude, et j’ai tout de suite été charmée par la ville. Pourtant, les murs étaient noirs, on sentait encore l’odeur du charbon, il y avait quelque chose d’un peu décrépi, d’un peu ‘vieillot’, on sentait encore l’atmosphère communiste. Ça m’a fait un choc. Et puis j’y suis revenue avec mon compagnon quelques années plus tard, et lui aussi est tombé amoureux de la ville. Depuis la fin des années 1990, on revenait presque tous les ans à Prague. On prenait des trains pour découvrir les autres villes et la campagne. »

Comment êtes-vous passés des vacances à Prague une fois par an à l’installation définitive avec votre mari et votre fille ?

« Nous sommes installés à Prague depuis trois ans maintenant. C’est un projet qui a été mûrement réfléchi, on en a parlé très tôt, vers la fin des années 1990. Puis on a eu notre fille, et on s’est décidé quand elle a eu 14 ans, parce que nous avons vu qu’il y avait un lycée français à Prague. Cela nous a beaucoup aidés et confortés dans notre décision. En effet, faire déménager une adolescente, lui faire quitter sa ville, ses amis, ce n’était pas évident. On lui en avait parlé lorsqu’elle avait entre 10 et 12 ans, mais elle avait pleuré et on n’avait donc pas insisté. Puis à force de venir et de voir la ville, elle a changé d’avis et dès qu’on a eu son accord, on est partis. On n’avait pas de maison, pas de travail, pas d’amis. Mais mon conjoint a décidé de prendre des cours de tchèque au Centre tchèque de Paris ».

Donc il y avait l’idée de venir avec un minimum de préparation ?

Photo: Fraus

« Oui, et il adore la langue tchèque. Cela nous a beaucoup aidés pour les démarches administres. Il a ensuite fait un cycle de six mois à l’université Charles afin de mieux maîtriser la langue. Moi je commence à comprendre un peu, mais parler le tchèque fait partie des difficultés que je rencontre dans la vie quotidienne. »

Justement, en arrivant ici, comment avez-vous géré les démarches administratives ? Avez-vous fait appel à un intermédiaire ?

« Non, nous n’avons pas fait appel à un intermédiaire. Nous avons cherché sur internet et mon conjoint qui maîtrisait un peu le tchèque, a vu qu’il fallait aller dans les ‘úřady’, l’administration locale. Ça n’a pas toujours été facile, mais je dirais que par rapport à l’administration française, ce n’est pas plus compliqué. Nous avons été bien reçus, et je pense que le fait de savoir parler un peu la langue nous a beaucoup aidés. »

Dans les premiers temps, y-a-t-il eu un décalage entre le rêve de s’installer ici et la réalité du quotidien ? Avez-vous eu des moments de regrets ou de blues ?

« Je me souviens que nous sommes arrivés le 31 août 2017, le jour de mon anniversaire, et il tombait des cordes. Il a plu comme ça pendant un mois. Donc le premier mois a été un peu difficile. Mais tout s’est arrangé, une fois que nous avions trouvé un logement et que notre fille avait pris ses marques au lycée français. Je tiens aussi à dire que nous avons rencontré des gens exceptionnels au sein de l’association ‘Prague Accueil’. Cela a été important pour nous de rencontrer une communauté francophone. Ils nous ont aidés et nous ont donné un carnet d’adresses. Par exemple, notre fille est tombée malade un week-end, on ne savait pas où aller. Ils organisent également un apéritif une fois par mois, ce qui permet d’élargir son cercle de connaissances. Puis petit à petit, en prenant des cours de tchèque et allant faire ses courses, on rencontre des gens. »

C’est là que vous avez commencé à rencontrer des Tchèques ?

« Souvent ça a commencé avec des couples de Français ou de Françaises qui étaient mariés avec des Tchèques. Mais ce n’est pas évident, les Tchèques sont un peu en recul, ils n’ont pas ce côté latin que l’on peut avoir en France ou en Italie. Mais j’aime autant, je préfère prendre mon temps, découvrir les gens petit à petit et les relations se font donc doucement mais sûrement. »

Est-ce vous auriez une recommandation pour les gens qui veulent s’installer ici ? Peut-être quelque chose que vous auriez aimé savoir avant de venir ?

Photo: Ondřej Tomšů,  Radio Prague Int.

« Ma première recommandation, ce serait de prendre un minimum de cours de tchèque. Dans la vie quotidienne, cela simplifie les choses, même si beaucoup de gens parlent anglais à Prague. Mais à part ça, je n’ai pas rencontré de difficulté majeure. La vie est beaucoup moins stressante qu’à Paris. Les transports par exemple sont très ponctuels, ils sont propres, et les gens sont civilisés : lorsqu’une personne âgée entre dans le tramway, les gens se lèvent et laissent leur place. Depuis que nous sommes ici, ma mère est venue nous voir plusieurs fois et n’a jamais fait un trajet en tramway debout, ce qui n’a jamais été possible à Paris. »

Vous trouvez qu’il y a une qualité de vie ici qu’il n’y a pas à Paris ?

« Effectivement, c’est ce qu’on est venus chercher. On a eu cette qualité de vie à Paris au début, lorsque les prix étaient encore raisonnables. Mais vingt ans plus tard, alors que notre pouvoir d’achat avait augmenté, on pouvait faire moins de choses à cause du coût de la vie, surtout au niveau des logements. Le déclic pour moi, ça a été les attentats en 2015. C’était dans un quartier où on habitait, et je ne me voyais pas vivre plus longtemps à Paris avec une adolescente. Bien sûr le risque zéro n’existe pas, mais je sens beaucoup plus apaisée ici, la vie est plus sereine, plus agréable. Il y a plus de parcs, d’espaces verts, en faisant dix à quinze minutes en tramway on peut se retrouver dans la forêt. »

Puisqu’on parlait des aspects stressants, comment avez-vous vécu la période du confinement à Prague ?

Photo illustrative: congerdesign/Pixabay,  CC0

« Ça s’est plutôt bien passé. On a eu la chance de garder notre travail car nous étions en télétravail. Il y a eu quelques tensions, puisque nous ne sommes pas habitués à vivre 24h/24 ensemble mais ça s’est arrangé. Nous avons également été très rassurés par les mesures prises par la République tchèque. Et puis surtout, on pouvait sortir ! »

Est-ce que vous pensez que vous êtes installés de manière définitive à Prague ?

« Seul l’avenir nous le dira. Pour l’instant on s’y sent bien, on a beaucoup de choses à découvrir. J’aimerais beaucoup aller au théâtre, voir des pièces et des films en tchèque. Donc je pense qu’on est là pour encore un petit moment. »