Prague veut moins d’alcool dans ses rues

Photo: CTK

Après le scandale sanitaire de l’alcool frelaté, qui a causé la mort par intoxication de près de cinquante personnes ces douze derniers mois, deux nouvelles initiatives visant à lutter plus efficacement contre l’alcoolisme suscitent l’intérêt des médias ces derniers jours. La première est l’arrêt relatif au durcissement des mesures législatives limitant la consommation des boissons alcoolisées dans les lieux publics. Quant à la seconde, elle a pour but de réduire le risque d’alcoolisme chez les Tchèques, grâce à une méthode que souhaite introduire le ministère de la Santé. Avec plus de 500 000 alcooliques chroniques, les Tchèques figurent depuis longtemps parmi les champions européens en terme de consommation d’alcool.

Photo: CTK
L’arrêt récemment adopté par la municipalité de Prague a été repris par plus de trois cents autres villes tchèques. Les mesures législatives interdisant la consommation de boissons alcoolisées dans les lieux publics ont été considérablement élargies. A Prague même, le nombre d’endroits où boire de l’alcool est interdit a quasiment doublé pour passer à plus de 850. Outre les endroits classiques, comme les alentours des écoles ou des terrains de jeux, les sorties de métro ou les arrêts de tram, vous ne pourrez désormais plus ouvrir de bouteille de vin pendant votre pique-nique à Petřín ou sortir bière à la main d’un des nombreux bars de la rue Dlouhá. La liste complète de ces endroits sera publiée dans le courant du mois d’octobre. Et le risque à courir n’est pas négligeable, comme l’explique un conseiller de la municipalité de Prague, Lukáš Manhart :

Lukáš Manhart,  photo: CT24
« En cas de violation de cet arrêt, la police municipale pourra imposer une contravention de 1 000 couronnes. Si la personne qui a consommé de l’alcool dans un lieu proscrit ne coopère pas, il est possible d’entamer une procédure judiciaire qui peut déboucher sur une amende de 30 000 couronnes. Bien évidemment, dans certains cas, il peut y avoir un problème avec le réglement de l’amende, mais c’est un autre problème. »

C’est précisément cet aspect qui est vivement critiqué, une grande partie des personnes concernées étant des sans-abri, qui n’auront donc pas de quoi payer l’amende. Porte-parole de la police municipale de Brno, Jakub Ghanem admet comprendre cette objection :

« C’est bien sur une question importante, néanmoins cet arrêt nous permet d’employer une série d’autres moyens. A partir du moment où nous pouvons accuser une personne d’une infraction, il nous est ensuite permis de l’expulser de l’endroit en question. Cette méthode est très efficace. De plus, les agents de la police municipale savent dans la majorité des cas à quels ‘clients’ ils ont affaire. Pour la plupart d’entre eux, ils sont donc en mesure de les raisonner sans avoir à les sanctionner outre mesure. »

Photo: Archives de Radio Prague
Parallèlement, le ministère de la Santé, avec le soutien financier de l’Organisation mondiale de la santé et du Fonds social européen, lance un projet de prévention, déjà en place dans de nombreux pays. Ce projet a pour but de détecter le premier stade d’alcoolisme chez les patients. Les médecins traitants sont à présent invités à soumettre leurs patients qu’ils soupçonnent d’avoir une consommation à risque à une méthode appelée « SBI ». Ce sigle anglais qui signifie « dépistage et intervention brève », est utilisé pour une méthode qui consiste en un questionnaire et un petit entretien. Le cas échéant, le buveur sera envoyé chez un spécialiste addictologue, comme il est aujourd’hui envoyé chez un podologue s’il a mal au pied.

La méthode présente également une grille représentant le volume acceptable de consommation : deux pintes de bière par jour, soit deux shoots d’alcool fort pour les hommes, la moitié environ pour les femmes et les personnes âgées. Le projet est cependant critiqué et jugé par avance inefficace par certains spécialistes, notamment parce qu’un alcoolique par définition ne reconnaît pas son état et a tendance à mentir.