Presse : le soutien à l’Ukraine et le difficile débat autour de la situation des Palestiniens

Comment la société tchèque perçoit-elle le soutien à l’Ukraine et la situation des Palestiniens ? Un élément de réponse dans cette nouvelle revue de presse. Un mot ensuite sur les récentes positions du président français, à quelques jours de sa visite à Prague. Le magazine s’intéressera également au rejet par la Chambre des députés du mariage pour les couples homosexuels et au « désert informationnel » en Tchéquie. Un mot enfin sur le logement devenu inabordable en Tchéquie.

A l’occasion du deuxième anniversaire de l’invasion russe en Ukraine, l’éditorialiste de l’hebdomadaire Respekt a constaté que « les Tchèques se trouvaient du bon côté de l’histoire. » Le fait que le gouvernement soutienne l’Ukraine sur le plan humanitaire et militaire constitue, selon lui, une des meilleures choses que la représentation politique tchèque ait faites depuis la chute du régime communiste en 1989 :

« La société tchèque mérite également d’être reconnue, car le soutien à une aide active à l’Ukraine reste majoritaire, bien qu’il ait un peu diminué. Elle a également admirablement bien agi quant à l’accueil des réfugiés ukrainiens qui vivent toujours parmi nous. Nous ne pouvons qu’espérer que rien ne changera dans ce domaine, car il s’agit d’une question cruciale même pour nous. Si l’Ukraine tombe, le risque pour nous augmentera également. »

Toutefois, comme l’indique l’éditorialiste du magazine, la société tchèque devrait réserver un peu de place dans son cœur aux Palestiniens également. « Un simple coup d’œil sur les réseaux sociaux donne la mesure du ton hostile voire cynique à leur égard, ce qui devrait nous remplir de tristesse », explique-t-il avant de poursuivre :

« Même en tenant compte du bien-fondé de la décision d’Israël de se défendre, nous ne devons pas omettre la compassion. Ce n’est pas une faiblesse, c’est une question d’humanité qui nous distingue de personnes comme Poutine ou de membres du Hamas. Il est presque impossible de discuter à ce propos en Tchéquie. Si l’on exprime son soutien à Israël, on est pris pour un raciste. Si l’on prend en compte les civils palestiniens, on est considéré comme antisémite. Nous sommes et devons être des alliés d’Israël, mais en tant que tels, nous avons une plus grande responsabilité. Le sort des Palestiniens, et en particulier de leurs enfants, ne peut être ignoré en termes d’humanité, mais il ne peut pas non plus être ignoré eu égard à l’avenir d’Israël et du Moyen-Orient. »

En attendant la visite du président Macron à Prague

« Macron, le seul leader de l’Europe. Pourquoi la France trace la voie et continuera de le faire de plus en plus fort ». Tel est le titre d’un article publié sur le site info.cz, à quelques jours de la visite du président français Emmanuel Macron à Prague, prévue pour le 5 mars, dont l’agenda concernera prioritairement le domaine énergétique. Son auteure a observé :

Emmanuel Macron à la Conférance de soutien à l’Ukraine | Photo: Gonzalo Fuentes,  ČTK/AP

« Cette semaine, Emmanuel Macron a joué le rôle du faucon vis-à-vis de la Russie. Il a rapidement compris la situation, les Ukrainiens étant visiblement à court d’argent et d’armes après que le Congrès américain a bloqué l’approbation d’un nouveau paquet d’aide à l’Ukraine ce qui risque de permette à la Russie de progresser considérablement. C’est pour cette raison qu’il a convoqué à Paris une conférence sur l’aide d’urgence à l’Ukraine, pour que l’Europe puisse compenser, au moins temporairement, le manque américain. »

Selon l’éditorialiste du site, la France s’est ainsi placée en première ligne de la campagne contre l’agression de Vladimir Poutine en Ukraine :

« Elle a pris un rôle qui, jusqu’à présent, appartenait à la Pologne, un des pays qui se sent  actuellement parmi les plus menacés. Ce n’est guère étonnant, car la France est l’unique puissance nucléaire au sein de l’Union européenne qui, en plus, dispose de l’armée la plus puissante. Macron veut clairement démontrer la détermination et la force de son pays doté de l’arme nucléaire afin d’intimider la Russie. Il se trouve que nul autre dans l’Union n’est en position de le faire. »

La Tchéquie ne veut toujours pas du mariage pour tous

« Pour les défenseurs de l’égalité des droits pour les couples homosexuels, la décision de la Chambre des députés à l’issue des délibérations de mercredi est la plus mauvaise possible ». Voilà ce qu’on peut lire dans une note publiée sur le site Seznam Zprávy. Son auteure explique pourquoi :

Photo illustrative: Kampus Production,  Pexels

« Non seulement le mariage pour tous n’a pas été adopté conformément au projet initial qui stipulait l’égalité des droits et l’appellation de ‘mariage’ pour l’union des personnes de même sexe, mais même un compromis stipulant l’égalité des droits et l’appellation de partenariat pour une telle union n’est pas passé. Les députés ont soutenu une proposition qui, tout en améliorant les droits des couples homosexuels à bien des égards, omet l’élément le plus important, à savoir la possibilité d’adopter des enfants. Mais pour les partisans du mariage pour tous, la perte est bien plus grande. Un compromis bâclé, tant au niveau de l’appellation que des droits. »

Pour la chroniqueuse de Seznám Zpravy, il est étonnant que certains partisans du mariage pour tous aient accepté cette solution malhonnête. « Le raisonnement pragmatique selon lequel quelque chose vaut mieux que rien du tout semble avoir prévalu », relève-t-elle  avant de conclure :

« Les gays et les lesbiennes sont devenus victimes d’une lutte politique, car c’est ainsi que la chambre basse du Parlement fonctionne. Ce qui est à déplorer, c’est que les deux camps opposés réalisent bien  sûr que le mariage pour tous arrivera tôt ou tard. On assiste donc actuellement à un effort visant à ralentir l’inévitable. Un effort qui pourrait être risible s’il ne portait pas atteinte aux droits de nombreuses personnes et familles. »

Les « déserts informationnels » en Tchéquie

Les « déserts informationnels » en Tchéquie s’agrandissent. Un constat confirmé par une nouvelle étude européenne réalisée par plusieurs organisations de journalistes qui met en relief la détérioration dramatique de la situation des médias régionaux et locaux dans le pays. Le journal en ligne Hlídacípes.org précise :

Photo illustrative: kaboompics,  Pixabay,  Pixabay License

« Durant la dernière décennie, le nombre de journaux locaux a baissé de moitié. L’étude décrit un cercle vicieux bien connu depuis longtemps qui se resserre de plus en plus autour du journalisme régional : d’un côté le déclin de la publicité qui s’est approfondi avec la pandémie de Covid-19 et, d’un autre côté, la croissance de la pression commerciale et politique. Dès lors, le journalisme régional critique fait défaut, car pour conserver au moins quelques annonceurs, les médias préfèrent se résigner à ne pas publier des textes qui pourraient déplaire à des hommes d’affaires locaux. »

Comme le constate Hlídacípes.org, l’absence de médias indépendants dans les régions , ne peut être compensée par des studios régionaux de médias publics ou des versions régionales de journaux nationaux. « Dans la vie pratique, cela signifie que de moins en moins de personnes en dehors des grandes villes ont la possibilité d’apprendre par les médias ce qui se passe réellement à l’endroit où elles vivent », ajoute-t-il.

Le logement en Tchéquie plus inabordable qu’ailleurs

« La chose dans laquelle la Tchéquie excelle vraiment, c’est le logement inabordable », indique sur un ton ironique un texte publié dans le quotidien Hospodářské noviny  :

Photo illustrative: Filip Jandourek,  ČRo

« Ce constat concerne le rapport entre le prix des loyers et les revenus moyens, le  rapport entre le prix des appartements et les salaires, ainsi que celui entre le montant du paiement moyen d’un prêt hypothécaire et le revenu moyen. Tous ces indicateurs rangent la Tchéquie loin devant la plupart des pays d’Europe occidentale et de nombreux pays du bloc post-communiste. Aucun consensus sur la manière de résoudre la crise du logement n’existe en Tchéquie et plus la discussion sur ce sujet se prolonge, plus il semble que les opinions divergent. »

Comme l’indique l’éditorialiste du journal économique, le problème réside aussi dans un manque de données en la matière :

« Les villes ne disposent pas d’un véritable inventaire des logements vacants. Toute tentative d’y parvenir, par exemple sous la forme d’un contrôle de la consommation d’électricité, une mesure qui avait été proposée par les Pirates, est immédiatement étiquetée comme une violation des droits de propriété. Ce qui s’avère en revanche évident, c’est que le nombre de personnes qui ont réellement besoin d’aide pour trouver un logement se comptent en dizaines de milliers. »

Le logement est un problème dans la plupart des pays européens. Cependant, il n’y a aucune raison, comme l’ajoute encore l’éditorialiste, pour que la Tchéquie soit en tête du peloton. Il faut simplement, selon lui, que ce problème ne soit plus aussi inexistant pour la représentation politique.