Presse : l’excellent travail des chercheurs tchèques apprécié à sa juste valeur

Tomáš Jungwirth

Cette nouvelle revue de la presse tchèque de la semaine écoulée se penche d’abord sur le grand succès de jeunes scientifiques tchèques avant de revenir sur la fusillade à la Faculté des lettres de l’Université Charles à Prague, un an après. Autres sujets au sommaire : la communion rare entre le gouvernement et l’opposition, la possible arrivée en masse de médecins slovaques en Tchéquie et le nombre élevé d’enfants qui passeront Noël dans des foyers d’accueil.

« Les scientifiques tchèques ont remporté un succès extraordinaire cette année en obtenant dix subventions prestigieuses dans le cadre du concours du Conseil européen de la recherche (ERC) », rapporte la rédactrice en chef du Vedavyzkum.cz, un site consacré au monde de la recherche, selon laquelle il s’agit même d’une grande surprise :

« Les Tchèques ont obtenu plus de subventions que les Belges ou les Danois et, comparé à la population, plus encore même que les Allemands. S’il s’agit d’une évolution remarquable par rapport au passé, où ils ne recevaient que deux ou trois subventions au maximum, il faudra néanmoins attendre quelques années pour avoir la confirmation que ces chiffres élevés peuvent être maintenus. »

L’auteure souligne que le succès de cette année n’est certainement pas le fruit du hasard, plusieurs éléments étant à son origine :

« Tout d’abord, une génération de jeunes chercheurs nés dans les années 1980 ou plus tard est en train de s’établir. Ils ont fait une partie de leurs études à l’étranger, ont une vision globale des choses, parlent plusieurs langues et ont du courage. Certaines institutions offrent à ceux qui reviennent de l’étranger des bourses pour qu’ils puissent créer leurs propres groupes de recherche. Enfin, la Tchéquie dispose d’une excellente institution consultative pour les scientifiques et les gestionnaires de projets : le Centre technologique de Prague, qui fait office de centre national d’information pour la recherche européenne. De même, nous pouvons constater que nombre de nos institutions sont très bien équipées, ce dont profitent également les chercheurs étrangers. »

Comme on peut encore le lire sur le site, il faut donc espérer que les dix subventions accordées par l’ECR ne sont pas la résultante d’un simple coup de chance et qu’elles marquent le début d’une nouvelle tendance sur le long terme. « Et peut-être qu’un jour, nos boursiers remporteront même le prestigieux prix Nobel. Dans ce contexte, le nom dont on parle le plus est celui du physicien Tomáš Jungwirth pour sa découverte de l’altermagnétisme qui permettra d’augmenter la capacité des mémoires. Un travail rendu possible aussi par les deux bourses de l’ECR dont il a bénéficié par le passé », conclut l’auteure.

Un an après la fusillade à la Faculté des lettres de Prague

Les médias sont nombreux à revenir sur la fusillade survenue il y a un an, le 21 décembre 2023, à la Faculté des lettres de l’Université Charles de Prague, qui a fait 14 morts et 25 blessés. L’hebdomadaire libéral Respekt s’intéresse à la manière dont la faculté, où étudient ou travaillent près de 10 000 personnes, s’est efforcée de « prendre soin » d’une communauté semblable en nombre à la population d’une petite ville régionale. On y lit :

Photo: René Volfík,  iROZHLAS.cz

« Au lendemain de la tuerie, un événement appelé ‘Un mois pour la faculté’ a été lancé dans le cadre duquel différents groupes, enseignants et étudiants ont organisé des conférences, des workshops ou un concert. Un feu est resté allumé sur la place Jan Palach, devant la faculté, où les gens ont veillé. Parallèlement, la faculté est restée ‘à moitié ouverte’ pour permettre aux étudiants d’entrer dans le bâtiment principal. Cinq mois après la fusillade, son quatrième étage, où la plupart des victimes ont été tuées, a été rouvert pour devenir la place de la Piété. Ces jours-ci, cet étage se transforme pour accueillir de nouveau cours et conférences. De même, le drapeau noir qui flotte toujours sur le bâtiment, sera bientôt retiré. »

Selon vice-doyen de la faculté, Martin Pehal, cité par Respekt, la deuxième année après la tragédie devrait être synonyme de retour à la ‘normale’. La faculté entend se consacrer à une réflexion détaillée sur la manière dont elle a relevé les défis liés à la première année et quels sont les procédés et les voies qui ont fait leurs preuves.

L’autouroute D4 : une entente rare entre le gouvernement et l’opposition

Suite à l’ouverture, mardi 17 décembre, d’un nouveau tronçon long de trente-deux kilomètres de l’autouroute D4 reliant les villes de Příbram et de Písek, le journal en ligne Forum24.cz remarque que la Tchéquie, dans le climat de conflits aigus et persistants entre les partis gouvernementaux et le mouvement d’opposition ANO, a connu un moment quasiment sans précédent :

L’ouverture,  mardi 17 décembre,  d’un nouveau tronçon de l’autouroute D4 | Photo: Václav Pancer,  ČTK

« L’événement a vu le vice-président d’ANO, Karel Havlíček, se tenir à côté du Premier ministre, Petr Fiala. Alors que ce dernier a remercié le précédent gouvernement d’Andrej Babiš au nom du gouvernement actuel, Karel Havlíček a remercié le gouvernement actuel au nom du gouvernement précédent. Ainsi, le gouvernement Fiala remercie l’opposition actuelle d’avoir préparé l’autoroute, tandis que l’opposition remercie le gouvernement actuel d’avoir achevé le tronçon préparé. Tout s’est déroulé de façon civilisée comme si nous nous trouvions soudain dans un pays où les politiciens ne se disputent pas sur la nature même de l’État et sur son orientation internationale, mais où le gouvernement et l’opposition ne sont divisés que par des points de vue différents sur la gestion des affaires publiques. Qu’il serait bon de vivre dans un pays aussi normal et civilisé. »

Le journal ajoute que le gouvernement de Petr Fiala célèbre un grand succès en termes de rapidité dans la construction des autoroutes. « Ce succès est d’autant plus réjouissant qu’il le partage avec son adversaire politique », souligne encore Forum24.cz.

Une fuite de médecins slovaques vers la Tchéquie ?

La Slovaquie est secouée par un vaste mouvement de protestation de ses médecins, dont les revendications concernent en premier lieu leurs salaires et le nombre d’heures supplémentaires. Une protestation qui, en bien des points, ressemble à celle qu’a connue récemment également la Tchéquie, bien que le mécontentement en Slovaquie soit beaucoup plus virulent. C’est ce que remarque le site Seznam Zprávy. Son auteur explique :

Photo illustrative: tungnguyen0905,  Pixabay,  Pixabay License

« Il est difficile de savoir comment évoluera le conflit entre le gouvernement slovaque et les médecins et quelle en sera l’issue, mais les deux parties semblent déterminées et les enjeux sont importants. Or, sur la base de la situation en Slovaquie, on peut déjà imaginer dans une certaine mesure ce qui se passera aussi en Tchéquie vers le milieu de l’année prochaine, à l’approche des élections législatives. »

L’auteur estime, par ailleurs, que de nombreux médecins slovaques en colère pourraient trouver un nouvel emploi chez le voisin tchèque :

« Les différences de salaires entre les deux pays ne sont plus aussi importantes que par le passé. La situation est beaucoup plus calme et la qualité générale des soins de santé plus élevée en Tchéquie aussi. On peut s’attendre à ce que presque tous les médecins slovaques y soient accueillis à bras ouverts, compte tenu de la pénurie de personnel dont souffrent les hôpitaux tchèques. La situation n’a encore jamais été aussi propice à une fuite active des cerveaux de ‘nos frères de l’Est’. »

Un Noël sans famille pour de nombreux enfants tchèques

« En Tchéquie, plus de 7 000 enfants fêteront Noël dans un foyer. » Un constat dressé par Mladá fronta Dnes en s’appuyant sur les données fournies par l’Office supérieur de contrôle. Le quotidien généraliste précise :

Photo illustrative: Jana Zemková,  ČRo

« Seize années et des centaines de millions de couronnes dépensées n’ont pas suffi au ministère des Affaires sociales pour réussir à transformer le système de soins aux enfants en situations de risque. Bien que le nombre de familles d’accueil augmente, celui des enfants placés dans des foyer d’accueil n’a diminué que d’un millier environ au cours des trois dernières années. Par ailleurs, cela fait désormais douze ans que le ministère ne remplit pas son obligation légale de gérer en bonne et due forme le système d’information qui vise à faciliter la mission des travailleurs sociaux. »

Le ministère des Affaires sociales se défend en affirmant avoir réussi à moderniser le système et à augmenter considérablement le nombre de familles d’accueil.  En tout état de cause, comme l’indique encore Mladá fronta Dnes, « le processus du placement des enfants en foyer dans des familles d’accueil reste très long ».