Presse : l’humour et ses limites dans l’espace public
Cette nouvelle revue de la presse tchèque propose d’abord quelques commentaires relatifs aux limites de l’humour dans l’espace public. Il y sera également question des principaux débats menés actuellement en Tchéquie ou encore des perspectives démographiques du pays et du goût particulièrement prononcé des Tchèques pour les soldes.
L’éditorial du dernier numéro de Respekt a évoqué un débat sur l’humour qui a été récemment mené sur les ondes de la Radio tchèque pour réfléchir aux limites de l’acceptable et de ce qui ne l’est plus. Le rédacteur en chef de l’hebdomadaire libéral écrit à ce propos :
« En tant que journaliste, j’ai noté à plusieurs reprises que les mots pouvaient blesser, voire même tuer. Une fois cela dit, il me faut défendre l’humour, car la satire, l’ironie et les plaisanteries sont importantes dans une société ouverte. Et ce sont justement ‘les blessures’ qu’elles comportent qui animent les débats et brisent les différents tabous. L’humour est un outil important dans la lutte contre les différentes formes de totalitarisme. C’est pour toutes ces raisons que les appels qui dénoncent ces ‘blessures’ infligées aux autres sont discutables. En fait, tout ce que l’on fait ou communique dans l’espace public risque de heurter, blesser ou vexer quelqu’un. »
Toujours selon le rédacteur en chef de Respekt, tous ceux qui évoluent dans l’espace public se doivent de s’efforcer de s’exprimer en adoptant un langage « correct », dans le sens de non offensant. « Mais en même temps, nous devons apprendre à accepter l’humour incorrect ou la polémique et être prêts à accepter les critiques de ceux à qui cela ne plaît pas », conclut-il.
« Arrêtons de fixer des limites à l’humour », appelle dans ce même contexte un chroniqueur du site Seznam Zprávy, avant de noter :
« Cessons de juger l’humour en fonction de la façon dont il correspond ou non à notre conception du monde ou au regard que nous portons sur le monde. Le seul critère de l’humour est le suivant : A-t-on ri ? Quelqu’un a-t-il ri ? Si oui, c’était de l’humour. Dans le cas contraire, nous sommes désolés. Ce n’est que plus tard que nous nous occuperons du reste. »
Des débats qui évitent le contexte européen
« La politique tchèque continue de réinventer la roue », pouvait-on lire en titre d’une chronique publiée sur le site du journal en ligne Deník Referendum. Son auteur s’explique :
« En Tchéquie, trois grandes questions sont actuellement débattues: l’adoption de l’euro, l’adoption du vote par correspondance et le mariage pour tous. Autant de questions qui ont déjà été débattues et tranchées depuis belle lurette dans la plupart des pays occidentaux. Les différents débats menés en Tchéquie montrent une fois de plus que tant le gouvernement que l’opposition sont noyés dans un égocentrisme provincial. Tant les politiciens que les médias aussi souvent malheureusement ignorent le contexte européen lié à ces changements, et l’opinion publique prête attention à des arguments qui ont été réfutés dans d’autres pays qui possèdent pourtant souvent une culture démocratique plus avancée que la nôtre. »
Or, tous les arguments soumis en Tchéquie l’ont déjà été dans d’autres pays, et il suffirait souvent, toujours selon le journal, de s’y référer :
« Nous n’avons vraiment rien de nouveau et d’inédit à proposer. Nos débats mettent en relief la question de savoir si nous appartenons à l’Occident, où nous aimons tant nous situer, ou si nous appartenons encore à la zone marécageuse du post-communisme, qui flirte de plus en plus avec l’autoritarisme, le tout au nom de la souveraineté nationale et de prétendues traditions. »
« L’adoption de l’euro dans cinq ans », toujours la même rengaine des politiques tchèques
« Les arguments pour ou contre l’adoption de l’euro mis à part, il faut souligner que l’adhésion à la zone euro est une décision purement politique, à condition bien évidemment de respecter des critères économiques stricts. » L’auteur de ce constat dressé dans le journal en ligne Hlídacípes estime que dans un pays comme la Tchéquie, où le scepticisme à l’égard de Bruxelles règne depuis des années et où 73 % des gens se disent hostiles à l’adoption de l’euro, l’approche politique est claire. Ainsi, la date de l’adoption de l’euro serait facile à évaluer :
« Depuis 2004, les hommes politiques ne cessent de répéter que ‘nous adopterons l’euro dans environ cinq ans’. Il y a eu une petite exception au tout début, au moment de l’entrée dans l’Union européenne en 2004, lorsque le gouvernement social-démocrate de Jiří Paroubek n’a pas procédé à de calcul exact et a fixé la date de l’adoption de la monnaie européenne à 2010. Ses successeurs ont renchéri en déclarant, chacun à leur tour, qu’un horizon de cinq ans était le plus proche et le plus réaliste pour un tel processus. On pourrait continuer ainsi jusqu’à l’actuel Premier ministre, Petr Fiala, avec sa thèse peu surprenante selon laquelle ‘nous n’aborderons pas la question de l’adoption de l’euro avant la fin du mandat du gouvernement’ (les prochaines élections législatives se tiendront en 2025, ndlr). »
« Attendons donc le nouveau gouvernement, même si nous savons d’ores et déjà que l’euro en Tchéquie, ce ne sera pas avant cinq ans », ironise encore Deník Referendum.
L’arbre de vie de la Tchéquie continue de se flétrir
« Au lieu d’évoquer un sapin de Noël dont les branches les plus longues se trouvent au bas de l’arbre, le futur arbre de vie tchèque ressemblera davantage à un thuya, dont les branches inférieures sont trop faibles pour soutenir le reste de la couronne. » Telle est l’image démographique qui a été dessinée par le site Aktualne.cz. Celui-ci s’est appuyé sur des évaluations de l’Office tchèque des statistiques pour proposer un regard sur ce à quoi la Tchéquie ressemblera en 2100 :
« Au cours des prochaines décennies, la population tchèque va vieillir et progressivement disparaître, car le nombre de décès sera plus important que celui de naissances. Alors qu’aujourd’hui les quadragénaires constituent la catégorie d’âge la plus importante, la société tchèque sera bientôt dominée par les quinquagénaires et, à la fin du siècle, par une génération encore plus âgée. Le nombre de personnes âgées de plus de 60 ans, qui était de 2,2 millions au début de cette année, sera supérieur à trois millions à la fin des années 2050. »
Peu d’enfants sont nés dans le pays depuis la chute du régime communiste en 1989. Pourtant, d’après ce qu’indique le site, la population totale est désormais de 10,8 millions d’habitants, grâce à l’entrée dans la parentalité des fortes années de population, nées dans les années 1970, et grâce aussi à l’arrivée massive d’immigrés en provenance de l’Est. « Jusqu'à récemment, les démographes prévoyaient que le solde migratoire positif permettrait de compenser un solde naturel négatif et maintiendrait la population au-dessus de la barre des 10 millions d’habitants tout au long du XXIe siècle. Désormais, leurs prévisions sont plus sombres. Ils estiment que la faible natalité ne permettra même pas d’assurer le simple renouvellement des générations dans la population tchèque », avertit encore Aktualne.cz, avant de conclure, malgré tout, sur une note un peu plus optimiste :
« Les Tchèques vivront plus longtemps. Les nouveaux-nés de 2100 auront une espérance de vie de 90 ans environ. Fêter son 100e anniversaire sera devenu relativement courant à la fin du XXIIe siècle, le sexe jouant un rôle beaucoup moins important qu’aujourd’hui dans l’espérance de vie. »
Les Tchèques aiment les soldes
L’année dernière, le commerce de détail en Tchéquie a été marqué plus encore que jamais par les soldes. D’après le site Seznam Zprávy, près de 66 % des marchandises vendues dans les supermarchés et les hypermarchés du pays ont fait l’objet d’un rabais :
« La part des rabais n’a jamais augmenté aussi rapidement. La Tchéquie a ainsi renforcé sa position de royaume du discount en Europe. Les soldes sont un outil commercial puissant en Bulgarie et en Slovaquie aussi, mais leur part y reste inférieure à 50 %. S’agissant de produits alimentaires, les Tchèques achètent en soldes principalement les ‘produits de base’ tels que le lait de longue conservation, le sucre ou le beurre, pour lesquels la part des ventes en promotion dépasse jusqu’à 80 % du total des ventes. »
« L’intérêt pour les produits soldés en Tchéquie a augmenté ces deux dernières années en raison de la crise économique », précise encore le texte :
« Cette utilisation massive des prix au rabais peut aider les gens à faire face à une situation économique défavorable. D’un autre côté, elle fausse la perception des consommateurs quant à la valeur réelle d’un produit, tout en rendant difficile la comparaison avec les politiques de prix pratiquées dans les autres pays. Le ministère de l’Agriculture, quant à lui, accepte les remises et les promotions en considérant qu’elles font partie intégrante de la politique marketing des sociétés commerciales. Et ce d’autant plus qu’il ne peut pas les interdire puisqu’il n’a pas le pouvoir de réguler les prix. Le contrôle des opérations de promotion revient donc à l’Inspection tchèque du commerce, un devoir qu’elle devrait remplir plus strictement qu’elle ne l’a fait jusqu’à présent. »