Quand une mobilisation citoyenne paie
Cet été dernier, Radio Prague vous a informé à propos d’une lutte que mènent depuis plusieurs années les habitants du quartier pragois de Malvazinky, à la fois contre leurs élus et la compagnie Geosan Sigma, promoteur immobilier, afin de sauver le parc Na Pláni, qui s’étend sur deux hectares. A la fin du mois de novembre, la municipalité du cinquième arrondissement de Prague a pris une décision clé qui devrait aboutir à la résolution de cette affaire et ce en faveur des citoyens.
« L’association civique « Les Amis de Malvazinky » a été créée afin d’empêcher la construction de logements en lieu et place du parc Na Pláni et j’ai le plaisir de constater que la première phase de cette mobilisation a été couronnée de succès. Ce 21 novembre 2013, les élus municipaux ont décidé à l’unanimité de résilier le contrat avec la compagnie Geosan. »
Ce succès qu’évoque Martin Lepšík est le résultat de six années de mobilisation d’habitants du quartier, réunis par la même désapprobation quant au projet de construction qui ferait disparaître le parc. Depuis le début de l’année 2013, des citoyens actifs se sont rassemblés en une association civile et Martin Lepšík explique la contribution de celle-ci dans la résolution de cette affaire :
« Avant que l’association soit créée, les efforts des habitants du quartier étaient éparpillés. Certains ne savaient sans doute pas que leurs voisins s’engageaient pour la même cause. L’association a donc permis une meilleure coordination et s’est montrée également efficace afin de mobiliser les autres habitants du quartier. Jusqu’à trois cent personnes ont participé lors d’une des manifestations. Au niveau juridique, l’existence de cette association signifie également l’implication d’une entité ayant le statut de personne juridique dans cette affaire, ce qui constitue un poids certain. »Le projet de construction de ces logements, qui devraient par ailleurs être baptisés Sydney, Tokyo, Singapour, Londres ou Paris, a rencontré également des critiques en termes juridiques. Des irrégularités ont en effet été dénoncées dans les deux contrats qui ont été signés en 2006 et dans lesquels la mairie est censée céder l’exploitation du terrain en question au promoteur immobilier. Le prix de cette transaction aurait sensiblement été sous-estimé, ce qui représenterait non seulement des pertes considérables pour la mairie, propriétaire du terrain, mais permettrait aussi à la municipalité de Prague 5 de garder toute compétence décisionnelle. En effet, selon les règles en vigueur, toute transaction supérieure à 50 millions de couronnes (soit un peu moins de 2 millions d’euros) doit être approuvée par la mairie de Prague, l’autorité supérieure aux municipalités des arrondissements. Or, le contrat en question s’éleve à 49 millions de couronnes, somme très proche de la limite légale. Finalement, ce calcul suspect s’est avéré d’une certaine façon comme le coup de grâce du projet. Martin Lepšík explique :
« Le conseil de la Mairie de Prague a recommandé à la mairie du cinquième arrondissement d’interrompre ce projet notamment par crainte que la valeur réelle du terrain dépasse de manière significative la somme convenue dans le contrat. Ce conseil a également esquissé des voies juridiques permettant l’abandon du contrat. »Les vœux de l’association « Les Amis de Malvazinky » ainsi que des autres habitants du quartier sont donc bientôt susceptible d’être exaucés. Mais, comme le remarque Martin Lepšík, il ne s’agit que d’une première étape, car une discussion publique devrait maintenant être ouverte. Et ce n’est pas la décision de la municipalité qui redonnera la vie aux 200 arbres qui ont déjà été coupés.