Revue de presse : pandémie, Allemagne, IVG

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Les sujets de la semaine : la propagation de l’épidémie de Covid-19 en Tchéquie dans une atmosphère politique tendue. La Tchéquie est au centre de l’attention des médias allemands, toujours en rapport avec l’épidémie et la façon dont elle gérée est dans le pays. Les Tchèques redécouvrent le plaisir de la promenade. La Tchéquie, l’IVG et les femmes polonaises.

« Les élections parlementaires sont le meilleur allié du covid », titrait un texte publié dans l’édition de ce jeudi du quotidien Lidové noviny en rapport avec la mauvaise situation épidémique en Tchéquie. Son auteur la décrit comme suit :

« En Tchéquie, le nombre de contaminations et de malades grièvement atteints n’a de cesse de monter. Dans certaines localités du pays, les hôpitaux n’ont plus assez de lits dédiés aux soins intensifs. Ainsi, en dépit d’une grande capacité de lits hospitaliers et d’instruments, nettement supérieure à celle dont disposait au printemps l’Italie, les médecins évoquent désormais la possibilité de 'prioriser' les malades. Au même moment, la République tchèque, où vivent des gens raisonnables, prudents et solidaires, envisage d’ouvrir les écoles, de mettre fin au couvre-feu et discute d'une réouverture des magasins. On dirait que l’on a renoncé aux solutions. »

Selon commentateur du journal, la situation absurde dans laquelle se trouve la Tchéquie s’inscrit dans une logique politique. Il explique :

« Le gouvernement minoritaire d’Andrej Babiš n’arrive pas à faire valoir sa politique. Les partis d’opposition quant à eux ont décidé d’opter pour une solution par l’intermédiaire de l’assouplissement des restrictions. Or, un gouvernement minoritaire et une opposition à laquelle il est confronté constituent un cocktail mortel qui étouffe la république. Pourtant, seul un large consensus politique permettrait de lutter efficacement contre l’épidémie. »

Lidové noviny a publié également une note de la plume du médecin-chef d’une clinique de cardiologie de Prague :

« Les dirigeants politiques ont aujourd’hui une responsabilité inédite depuis les trente dernières années. Ils l’assument pourtant mal, cherchant à contenter tout le monde sans satisfaire personne. En 2021, la surmortalité sera supérieure à celle de l’année passée, en dépit du fait que l’on dispose de plusieurs vaccins efficaces qui pourraient nous protéger. Je pense que les politiciens sont les derniers qui devraient en bénéficier. Aussi naïve qu’une telle mesure puisse-t-elle paraître, elle aurait pourtant une valeur symbolique ».

Toujours à propos du déconfinement envisagé un temps, le journal Deník a pour sa part remarqué :

« Les discordes et les bagarres sur la scène politique tchèque vont bon train. Il y a pourtant un point qui fait l’unanimité : l’impératif de l’assouplissement des mesures de restriction. Le consensus du gouvernement et de l’opposition à ce sujet est surprenant notamment à la lumière de la propagation inquiétante de l’épidémie de coronavirus en Tchéquie. Aujourd’hui, aucun parti politique n’entend proposer des restrictions plus sévères. La demande de leur assouplissement au sein de la société est telle qu’une telle approche signifierait un suicide politique. »

La Tchéquie dans les médias allemands

Une note publiée dans le quotidien E15 rapporte que cela faisait longtemps que la Tchéquie n’avait été aussi présente et aussi « populaire » dans les médias allemands. Il s’agit pourtant, comme l’affirme son auteur, d’une popularité douteuse :

Photo illustrative: Jaroslav A. Polák,  Flickr,  CC0 1.0

« Pour l’Allemagne, la Tchéquie sert de contre-exemple, c’est un pays qui a renoncé aux précautions en pleine pandémie, qui n’a pas de plan pandémique et dont la représentation politique n’arrive pas à persuader la population qu’il faut respecter les mesures adoptées. La Tchéquie représente à ses yeux un épouvantail de la deuxième voire de la troisième vague de la pandémie. Le pays voisin de la Tchéquie peine notamment à comprendre qu’au moment où culmine la pandémie et se propage le variant britannique du virus, un assouplissement des restrictions soit envisagée. »

Les nouvelles restrictions aux frontières avec la Tchéquie en sont une conséquence logique, remarque le commentateur du journal E15. Celles-ci touchent particulièrement les travailleurs frontaliers et les poids-lourds. Mais le problème est, selon lui, ailleurs. « Tandis que la majorité des Allemands semblent vouloir protéger chaque vie menacée par la pandémie, les sondages révèlent que les Tchèques s’intéressent plus aux prix des denrées alimentaires qu’aux risques sanitaires de la pandémie », explique-t-il.

Le plaisir retrouvé de la promenade

Outre des craintes, des angoisses, des tensions au sein  de la société et des problèmes d’ordre économique, l’épidémie de Covid-19 a apporté certains points positifs, discrets et peu marquants. Le plaisir de la promenade qu’elle nous a fait redécouvrir en est un. C’est ce que constate un texte publié sur le site aktualne.cz qui chante les louanges des promenades. Son auteur a à ce propos écrit :

Photo: Kristýna Maková

« Le covid nous remet sur les pieds nous rappelant que nous sommes des êtres destinés à marcher et non à circuler en véhicule. Une promenade dans le quartier, dans les environs de notre domicile est quelque chose de très intime. On pourrait la comparer à un acte d’amour avec la ville qu’on habite, car elle permet de la de la découvrir et d’apprendre à la comprendre. Une promenade nous amène aussi à suivre les transformations de la ville, tantôt positives tantôt déplaisantes. Et, surtout, une promenade, une flânerie, sont de parfaits moyens pour fuir le lockdown. »

Le chroniqueur rapporte qu’en marchant aujourd’hui à Prague ou dans d’autres villes, on rencontre en effet un nombre de piétons beaucoup plus élevé qu’auparavant, tous ceux qui fuient les quatre murs dans lesquels le télétravail les a enfermés. « En avançant d’un pas lent, les gens regardent autour d’eux, attentifs à ce qu’ils ont depuis longtemps ignoré ou oublié », raconte-t-il avant de conclure :

« La marche nous permet également de voir dans quelle mesure les voitures enlaidissent, occupent et maîtrisent une ville et à quel point nous avons tendance à nous y soumettre ».

L’interruption de grossesse : la Tchéquie a hésité à aider les femmes polonaises

« En tournant le dos aux femmes polonaises auxquelles leur Etat a enlevé le droit à l’interruption de grossesse, la Tchéquie a raté une nouvelle fois l’occasion de manifester sa solidarité internationale, de présenter un visage accueillant et de tendre la main à ceux et celles qui en ont besoin ». C’est ainsi que l’un des derniers numéros du quotidien Deník N a commenté la position du pays selon laquelle une telle intervention n’est pas légale dans les établissements tchèques... Le dernier magazine Respekt a apporté à ce sujet quelques précisions :

Photo illustrative: Tomasz Kobosz / Freeimages

« En vertu de la loi qui a pris effet en 1986, une intervention aux citoyens d’autres pays ne peut être accordée que s'ils bénéficient d’un permis de résidence sur le territoire tchèque. Impossible donc pour une femme polonaise de subir en Tchéquie une interruption de grossesse et de repartir quelques jours après. Cette interprétation est reconnue par la Chambre des médecins et par la plupart des établissements sanitaires tchèques. D’un autre côté, les juristes spécialisés en droits médical et européen remarquent que le dispositif remontant à la période totalitaire, a été ‘mis à jour’ par l’appartenance du pays à l’Union européenne, ainsi que par les règles liées à la libre circulation et la directive sur les soins sanitaires transfrontaliers. Dans cette logique, les Polonaises auraient le même droit à cette intervention que les Tchèques ».

L’auteure de l’article publié dans Respekt estime que l’approche de la Tchéquie donne un nouvel exemple de ce que nous sommes habitués à voir les frontières là où elles n’existent plus. « Mais tant que nous respectons les règles européennes et défendons le droit des femmes de décider de leur corps, nous devons suivre les modèles suédois et danois et ouvrir la porte aux Polonaises qui sont de ce droit dans leur pays privées », conclut-il. Jeudi, le ministère de la Santé a réagi à la publication de cet article en admettant que le droit à l’IVG était bien ouvert en Tchéquie à toutes les ressortissantes d’un pays de l’Union européenne.