Presse : Andrej Babiš, futur candidat à la présidence de la République?

Le Premier ministre sortant Andrej Babiš envisage-t-il la  présidence de la République ? Cette nouvelle revue de la presse donne une réponse hypothétique à cette question. A son menu ensuite quelques observations liées aux récentes élections législatives et qui s’intéressent entre autres à ce qu’elles ont révélé au sujet des forces populistes et extrémistes en Tchéquie. Quelques remarques enfin concernant la situation pandémique dans le pays.  

« Andrej Babiš a décidé de devenir président ». Tel est le titre d’un texte mis en ligne sur le site Echo24.cz dans lequel son auteure prétend :

« Après avoir reconnu sa défaite aux élections législatives à laquelle il ne s’était pas attendu, le Premier ministre sortant a réévalué ses priorités en annonçant que son mouvement ANO passait dans l’opposition. Il ne va pas quitter la scène politique, car il ne veut pas perdre son influence sur l’enquête menée sur ses affaires et sur les subventions nécessaires pour le fonctionnement de son groupe Agrofert. Le pari concerne effectivement la protection de sa liberté personnelle et de ses biens. »

« C’est pour cette raison et au vu l’état de santé du chef de l’Etat Miloš Zeman qui se dégrade, qu’Andrej Babiš a pris la décision de se lancer dans la course à la présidence de la République, car il n’a rien à perdre », suppose la chroniqueuse du site Echo24.cz. Elle explique encore :

« Pour sa campagne présidentielle, Andrej Babiš se servira de sa position dans l’opposition pour attaquer le nouveau gouvernement qui a devant lui une des périodes les plus difficiles à gérer de ces dernières années. Il aura effectivement à résoudre beaucoup de problèmes dont en premier lieu la hausse des prix. Il s’agira d’un grand défi pour la majorité gouvernementale. »

La pire chose qui puisse arriver, selon la journaliste, ce serait de voir se créer face à Andrej Babiš un peloton de candidats présidentiels ambitieux. « Le moment est venu de s’accorder sur une figure qui serait capable de le battre », conclut-elle.

Après l’euphorie électorale des gagnants, le temps du doute

« L’enthousiasme qui accompagne un succès obscurcit en général la raison ». C’est ce qu’estime l’auteur d’un commentaire concernant les élections législatives du week-end dernier qui ont apporté la victoire aux deux coalitions d’opposition de droite et de centre-droit, Spolu (Ensemble) et PirSTAN (Pirates et Maires et Indépendants). Il explique :

La coalition SPOLU | Photo: René Volfík,  ČRo

« Hélas, il ne fait aucun doute que seul un jeu de circonstances heureuses a mené à la défaite de l’oligarque Andrej Babiš. Ce dernier n’a en effet perdu que peu de voix par rapport au passé, tandis qu’il n’a fallu que quelque dizaines de milliers de voix à ses partis satellites, les sociaux-démocrates et les communistes, pour qu’ils franchissent le seuil des 5% nécessaires.. »

Une de ces circonstances heureuses, selon Hospodářské noviny, est l’émiettement du camp nationaliste et populiste qui a vu émerger plusieurs nouvelles formations. Pour illustrer le caractère « illusoire » de la victoire des deux coalitions démocratiques, le chroniqueur du journal indique que celles-ci ne représentent que 2  333 000 électeurs tchèques, tandis que le camp adverse constitué du mouvement ANO et duparti d’extrême-droite SPD, compte près de 300 000 votants en plus. « Or, tout en ayant réussi à mobiliser une majorité écrasante de ses électeurs, mathématiquement parlant, les coalitions victorieuses ont perdu », écrit-il avant d’ajouter :

« Il serait faux de croire que les résultats de ces élections législatives signalent un recul du  populisme autoritaire en Tchéquie voire même en Europe centrale. C’est plutôt le contraire qui est vrai. Le gouvernement des partis démocratiques qui va voir tôt ou tard le jour aura paradoxalement une très faible légitimité démocratique, ne représentant en fait qu’un tiers des électeurs. Le camp populiste va guetter toute erreur de sa part pour pouvoir reprendre la main et revenir aux manettes en pleine forme. Une nouvelle occasion se présentera lors de la prochaine élection présidentielle qui se déroulera au plus tard en janvier 2023. »

Convaincre les indignés et les déçus

Un commentaire publié sur le site aktualne.cz constate à son tour que le courant populiste et nationaliste ne s’est pas réellement affaibli en Tchéquie, en dépit de ce que les résultats des élections législatives semblent montrer :

Photo: Olga Vasinkevich,  Radio Prague Int.

« Plus d’un million de suffrages se sont évanouis lors de ces élections. Un chiffre jamais vu dans l’histoire de la République tchèque. Jamais il n’y aura eu une chambre basse qui reflète si peu la volonté manifestée par les gens dans les urnes. Le nouveau gouvernement aura à déployer beaucoup d’efforts pour convaincre les indignés et les déçus qui n’auront pas de représentants à la Chambre des députés. De même, la disparition d’élus de gauche à la Chambre des députés ne devrait pas être ignorée par la nouvelle chambre basse. »

« En politique, une victoire est ni plus ni moins qu’une victoire. L’enjeu consiste désormais dans la manière dont celle-ci sera gérée ». C’est ce qu’indique l’hebdomadaire Respekt qui se penche également sur les doutes liés au prétendu faible mandat du prochain cabinet :

« La vigilance et la modération sont des qualités dont devrait faire preuve le futur gouvernement, car ce n’est pas la force de son mandat mais le climat au sein de la société qui sera décisif. De ce fait, il ne doit pas oublier les électeurs qui n’ont pas voté pour lui. Sa tâche est effectivement d’assurer un bon niveau de vie à l’ensemble de la société. Une tâche difficile à gérer lorsqu’il  aura à affronter de graves problèmes : les conséquences de la gestion du pays par le gouvernement sortant d’Andrej Babis, la crise énergétique, l’inflation, les problèmes de Škoda Auto, la pandémie qui revient en force. »

En attendant une meilleure position de la Tchéquie sur la scène internationale

Pour le commentateur du quotidien Deník, la fin du gouvernement dirigé par Andrej Babiš contribuera à améliorer la position de la Tchéquie sur la scène internationale :

Andrej Babiš | Photo: Archives du Gouvernement tchèque

« En raison du conflit d’intérêts du Premier ministre Andrej Babiš lié à son groupe Agrofert, la Tchéquie a eu tendance à être classée aux côtés des pays problématiques comme la Hongrie ou la Pologne. Andrej Babiš ayant refusé de résoudre son problème, c’est l’ensemble du pays qui a été appelé à le prendre en charge, diplomates, ministères, fonctionnaires, juristes. Le ‘problème Babiš’ risquait également d’avoir un impact sur l’octroi des fonds de l’Union européenne. »

Les élections législatives ont apporté une solution, selon le commentateur. Ainsi, la Tchéquie aura enfin l’opportunité de se consacrer aux véritables défis qui sont nombreux et qui sont restés longtemps en marge de l’intérêt général. « Le retard à rattraper est important mais, heureusement, on ne doit plus s’occuper du ‘problème Babiš’ », conclut-il.

La situation sanitaire, un défi pour les vainqueurs des élections

« Le Covid-19 ne va pas attendre les résultats des négociations post-électorales. Ce sont des vies qui sont en jeu ». Tel est le titre alarmant d’une note mise en ligne sur le site Seznam Zprávy qui s’intéresse à la situation sanitaire qui se détériore en Tchéquie. Son auteur écrit :

Photo illustrative: René Volfík,  iROZHLAS.cz

« On ne sait pas comment les vainqueurs des élections législatives entendent gérer cette situation. Pourtant, c’est dès aujourd’hui qu’il serait opportun et raisonnable d’en parler. Certes, des choses importantes comme la répartition du pouvoir et des responsabilités sont à l’ordre du jour, mais les gens ont le droit de connaître les futurs scénarios envisagés en cas de la propagation de la pandémie. »

Selon le chroniqueur du site, la gestion chaotique de la pandémie par le gouvernement Babiš a été une des causes principales de sa défaite. Une raison de plus pour  les partis vainqueurs de dessiner au plus vite possible leurs intentions à ce sujet. « En dépit des données actuelles sur la pandémie qui sont en ce moment relativement bonnes, les perspectives ne s’annoncent pas très favorables. Même si le taux de vaccination se situe autour de 60% et l’immunité de la population tend à croître, on doit s’attendre à une nouvelle vague  », explique-t-il en conclusion.