Staline et Gottwald privés de leur titre de citoyen d’honneur de České Budějovice

Joseph Staline et Klement Gottwald

Le dictateur soviétique Joseph Staline et le premier président de la Tchécoslovaquie communiste Klement Gottwald se sont vu retirer leur titre de citoyen d’honneur de České Budějovice, la capitale de la Bohême du Sud. Cette décision a été prise lundi par les conseillers municipaux de la ville. Le vote a toutefois été serré : il a été précédé par un long débat et finalement 23 sur 39 élus présents se sont exprimés en faveur de la proposition. Les membres du parti communiste ont quitté la salle du conseil municipal en signe de protestation.

Joseph Staline et Klement Gottwald
Joseph Staline est devenu citoyen d’honneur de České Budějovice en 1945, après la libération de la ville par les troupes de l’Armée rouge. Le secrétaire général du parti communiste tchécoslovaque de 1929 à 1945 et premier président de la Tchécoslovaquie communiste, Klement Gottwald, lui, s’est vu accorder ce statut un an plus tard. Ce n’est qu’un peu plus de 27 ans après la Révolution de velours et la chute du communisme dans le pays que leur citoyenneté d’honneur a été mise en cause par un groupe d’étudiants et de conseillers municipaux d’opposition. Mais la proposition d’enlever les noms des deux anciens dirigeants communistes de la liste des 118 citoyens d’honneur que possède la ville et sur laquelle figurent également par exemple les deux premiers présidents tchécoslovaques, Tomáš Garrigue Masaryk et Edvard Beneš, a suscité un débat pour le moins passionné.

Si les membres des mouvements ANO et des Citoyens pour Budějovice ont voté pour le projet, les représentants d’autres partis politiques ont abordé le scrutin en ordre dispersé. La majorité des conseillers sociaux-démocrates et du parti civique démocrate (ODS) ne se sont pas exprimés et les communistes ont quitté la salle avant la tenue du vote. De son côté, Tomáš Bouzek, de TOP 09, était partisan de l’idée :

« Nous ne garderions sûrement pas les statues d’assassins érigées sur la place de la ville, nous ne donnerions pas leur nom à une rue… Nous ne devrions donc pas leur laisser le titre de citoyen d’honneur. »

Les arguments les plus divers ont été invoqués à propos du cas de Klement Gottwald. Deux semaines avant le vote final, une partie des représentants de la mairie souhaitait en effet lui laisser ce titre et le retirer au seul Joseph Staline. Les conseillers municipaux ont donc revu leur position et tous ne sont pas forcément satisfaits, comme le confirme le social-démocrate Miroslav Joch :

Milada Horáková
« Je ne sais pas s’il était un assassin. Dire que Klement Gottwald était un assassin me semble assez dur. »

Pour beaucoup de Tchèques, l’ancien président tchécoslovaque est néanmoins un disciple de Joseph Staline et le symbole des procès politiques des années 1950 qui ont abouti à la mort de plusieurs centaines de personnes, parmi lesquelles la députée tchécoslovaque démocrate Milada Horáková. C’est aussi l’avis de l’historien et journaliste Jan Ziegler :

« Klement Gottwald est responsable de l’exécution de Milada Horáková. Il a pu sauver sa vie mais il a refusé de lui accorder la grâce présidentielle. Il est ainsi le responsable de la mort de centaines de personnes. Il était donc tout à fait juste de lui retirer sa citoyenneté d’honneur. »

Le maire de České Budějovice affirme pour sa part qu’il ne comprend pas les émotions que suscite cette décision et ne voit aucun intérêt à retirer ces deux noms de ladite liste. Selon Jiří Svoboda (ANO), Staline et Gottwald avaient obtenu la citoyenneté d’honneur de la ville à une époque où de bonnes raisons le justifiaient :

« Les opinions sur ce sujet sont très différentes. Mais comme cela a été dit avant le vote : quelle que soit la décision, nous ne pouvons pas changer l’histoire. »

Cet acte symbolique n’est pourtant pas unique en son genre en République tchèque. Outre la ville de České Budějovice, Joseph Staline et Klement Gottwald ont déjà perdu leur statut de citoyen d’honneur dans plusieurs autres municipalités tchèques, notamment à Prague, à Plzeň, à Zlín ou encore à Opava.